Entre coût élevé, longues files d’attente, rareté du produit et rupture de stock, les populations béninoises sont prises en otage par la lutte improvisée et sauvage contre l’essence frelatée.
La lutte improvisée contre l’essence de contrebande, communément appelée ‘’kpayo’’, est de nouveau d’actualité. Ses effets pervers sur la population aussi. En effet, depuis quelques semaines, les éléments des forces de l’ordre ont repris du service et ont intercepté des centaines de bidons de ‘’kpayo’’ dans plusieurs villes. Chose qui a provoqué, du coup, la rareté du produit dans le circuit informel, donc la hausse de son prix. «C’était à 450 F et on avait du mal à s’approvisionner ; aujourd’hui c’est à 800 F, comment allons-nous vivre avec ça alors que le Smig est toujours à 31250F», se plaint un motocycliste rencontré dans une des longues files d’attente formées devant les stations de la ville de Cotonou. Si le coût élevé du carburant dans le secteur informel, secteur qui occupe plus de 70% du marché pétrolier, fait fuir et entraîne l’affluence dans les stations-service, ici, «c’est les longues queues d’attente qui chassent». «Je suis là depuis un peu plus de 20 minutes mais je ne suis pas encore servi», affirme Marc, un jeune motocycliste attendant impatiemment de se faire servir par l’un des pompistes d’une station privée du carrefour ‘’la vie’’, ce samedi matin à la queue d’une file d’une vingtaine de motos et voitures. Le même jour, au carrefour ‘’Unafrica’’ non loin du Commissariat central de Cotonou, c’est le refrain «E dé ya (il n’y a en pas)» des pompistes de la Sonacop et le geste de la main de ceux de la station privée d’à côté en signe de rupture de stock qui renvoient les consommateurs de l’or noir. Qui, certains à cours d’essence, comme c’est le cas pour deux conducteurs de taxi-moto, sont contraints de traîner leur engin jusqu’à la prochaine station. Et si «par malchance, c’est vers chez moi là-bas, (dans la zone du marché Ouando, dans la capitale, Porto-Novo) que tu as la panne sèche, tu traîneras la moto jusqu’au pont (à l’entrée de la ville où se trouve les quelques rares stations)», confie un fils de la cité aux trois noms. Véritable chemin de croix, alors que les chrétiens ont fini de célébrer pâques et la résurrection de Jésus.
A tous ces calvaires que vivent les populations béninoises pour leur approvisionnement en carburant, s’ajoute un autre problème, les coupures intempestives d’électricité. Si déjà avec l’affluence, le temps d’attente était long, les coupures répétées de l’énergie électrique viennent rallonger ce temps d’attente. La pompe utilisant le courant électrique.
Chômage, insécurité…les autres effets secondaires
Les conséquences de la lutte contre le ‘’kpayo’’ annoncée à l’improviste par le Chef de l’Etat lors d’une rencontre avec les femmes, sont multiples et diverses. Outre les conséquences directes sur les consommateurs du carburant, la répression sauvage et improvisée contre l’essence frelatée pourrait avoir ‘’des effets secondaires’’. En effet, le problème de la reconversion des revendeurs et des contrebandiers n’étant encore résolu, des milliers de personnes pourraient se retrouver sans source de revenus. Choses qui, à en croire de nombreux commentaires, conduiraient à une recrudescence du grand banditisme et de l’insécurité déjà inquiétante dans le pays.
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Les stations faisant encore défaut sur toute l’étendue du territoire, le coût du kpayo en hausse, les queues s’allongeant de jour en jour, les populations sont comme prises en otages par la lutte contre le ‘’kpayo’’. Une lutte improvisée et bien préjudiciable aux populations béninoises.