De l’ombre à la lumière

Ceux qui ne connaissent pas le Bénin s’y trompent toujours. Notre pays serait un paradis sur terre. Ceci au motif que la fête rythme nos jours et nos nuits ; que les baptêmes riment avec fiesta, nouba et bamboula; que les mariages illuminent notre quotidien de mille soleils. 

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Les funérailles, dit-on, ne dérogent point à la règle générale. La fête serait ainsi comme un signe du zodiaque qui présiderait aux destinées du Bénin et des Béninois.

Si ces étrangers, qui nous voient par le petit bout de la lorgnette, devaient comptabiliser nos fêtes communautaires, du Nonvitcha à la Ganni, de la Pâques de Ouidah à l’Assomption de Savalou …etc. ils concluraient que nous sommes le fruit d’une intolérable discrimination : le Bénin serait alors un îlot de félicité dans un océan de désordre et de malheur.

La vérité est toute autre. Le Bénin n’est ni une terre de béatitude éternelle ni un eldorado. Le Bénin est un pays sous-développé dont l’immense majorité des habitants s’échinent à gagner leur maigre pitance quotidienne à la sueur de leur front. Des jeunes, après des années d’étude, sanctionnées par de prestigieux parchemins, rongent leurs freins à attendre un emploi. Les enfants continuent d’être cloués au berceau par l’action mortifère des grandes endémies.

Quand on s’attarde quelque peu sur l’actualité, on peut constater qu’au cours de ces trois dernières années, certains événements tristes ont littéralement endeuillé la communauté nationale et assombri l’horizon des Béninois. Leurs effets sur le quotidien de ceux-ci se voient à l’œil nu. Aucun baptême aucun mariage, bref aucune fête, si bien arrosée soit-elle, ne peut empêcher les corps de geindre, les cœurs de saigner.

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Quel Béninois a oublié l’affaire ICC Services ? La plus grosse des arnaques jamais conçue et mise en œuvre dans notre pays. Elle a précipité dans le trou noir des milliers de nos compatriotes dépouillés de leur épargne. Des rêves sont définitivement rangés au magasin des accessoires. Des vies sont irrémédiablement brisées. Des espérances qui ont tout l’heur d’être légitimes se sont irrévocablement dissipées. Pour nombre de nos compatriotes, il ne reste plus que le souvenir amer d’une aventure sans lendemain.

La crise du football, par exemple, a enlevé beaucoup de couleurs au quotidien des Béninois. Les autres avancent et accomplissent des exploits, mais nous, nous végétons. C’est à croire que nous préférons la boue fétide et les eaux saumâtres des bas-fonds aux pelouses bien taillées des stades. Nous avons dépeuplé nos week-ends de la fête du football. Il ne nous reste plus qu’à mâcher, nostalgiques, la kola de nos exploits passés.

Le dossier PVI -NG (Programme de vérification des importations nouvelle génération) parce que mal préparé et mal engagé a fait chou blanc. Nous continuons d’en payer le prix. L’inflation généralisée, la vie chère qui pèse lourd sur nos poches, porte-monnaie et autre panier de la ménagère tiennent leur origine de ce faux pas regrettable.

Pourrions-nous oublier ce dossier qui défraie actuellement la chronique et qui porte sur la tentative présumée d’empoisonnement du Chef de l’Etat ? C’est encore un peu moins de lumière dans le ciel déjà fort chargé d’un Bénin déboussolé qui ne sait plus à quel saint se vouer. Les jours passent et tout s’embrouille dans le cœur et dans l’esprit de nos compatriotes. Peut-on encore soutenir que ceux-ci sont des bienheureux qui égrènent des jours et des nuits agréables sur un bout de paradis sur terre ?

Pourtant, il aurait suffi que nous ayons l’audace d’une initiative courageuse de rassemblement des Béninois autour d’une tâche majeure d’intérêt national. Et nous pourrions repartir, ragaillardis, vers de nouveaux horizons. Les Béninois ont moins besoin de jeux politiciens portés par de petits calculs d’épiciers aux petits pieds. Les Béninois ont plus besoin de se parler, en vérité. Les Béninois ont plus besoin de parler, en se regardant dans le blanc des yeux, de leur pays, de son présent et de son avenir. Les Béninois ont besoin de transcender leurs querelles et chamailleries du moment. Il y a comme un appel du pays surgi de ses profondeurs. Il mérite d’être entendu. Et tout changera tout aussitôt et du tout au tout. Parole de chroniqueur !

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