Ecole et société

C'est inédit : l'année scolaire 2012-2013 se déroule sans histoire. Pas d'arrêts de cours, pas de grèves, pas de menace d'une année blanche, pas de saisie des copies, pas de boycottage des corrections. Une année normale telle qu'il ne nous est pas souvent donné d'en vivre. C'est un progrès notable.

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L'esprit ne donne le meilleur de lui-même que dans un environnement calme et serein. La cuvée scolaire 2012-2013 est à labéliser. C'est une année modèle pour toutes nos écoles. Tous les ingrédients qui ont participé à cet exploit doivent être identifiés, étudiés et reproduits. Les mêmes causes ne produisent-elles pas les mêmes effets ?

Depuis des lustres, c'est la toute première grande victoire de l'école béninoise. Ne faisons pas la fine bouche : cette victoire est bonne à prendre. Reste à l'inscrire dans la durée. Pour le devenir heureux de nos enfants. La concurrence, de plus en plus rude entre les nations du monde, se joue sur le terrain stratégique et décisif de l'intelligence. Les peuples qui cautionnent l'école buissonnière se disqualifient. Ils compromettent leur participation à cette compétition pour l'excellence.

Les résultats des tous prochains examens et concours   constitueront un test de vérité grandeur nature. Quelles retombées pour une année apaisée ? Nous n'avions que trop invoqué les remous dans l'école pour expliquer, les années passées, nos échecs et nos contreperformances. Maintenant que tout semble rentrer dans l'ordre, avec derrière nous des grèves en cascades et des années blanches, la logique ordinaire voudrait que de bonnes semailles appellent de bonnes moissons.

On ne saurait cependant limiter les problèmes de l'école béninoise au climat des études, à l'environnement mental et matériel de l'institution scolaire. Notre école souffre d'autres lacunes. Elles méritent que l'on s'y attarde. On ne doit ni les dissimuler ni les camoufler derrière le paravent de la paix retrouvée. La sérénité des esprits doit contribuer, au contraire, à délier et à libérer les langues. Pour l'école au Bénin, il urge d'engager immédiatement deux grandes batailles. Il faut, d'une part, relever le niveau des maîtres. Il faut, d'autre part, assainir le milieu scolaire sur le plan éthique et moral.

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Pourquoi devons-nous nous appliquer à relever le niveau des maîtres ? Les résultats plutôt catastrophiques enregistrés par des maîtres, cette année, à deux examens professionnels, nous interpellent gravement. Le Brevet d'aptitude à la profession d'enseignant du secondaire (BAPES) et le Certificat d'aptitude à la profession d'enseignant du secondaire (CAPES) ont respectivement enregistré des taux d'admission de 20 et de 16%. Nous ne sommes pas loin d'une calamité nationale. Ce qui aurait pu bien justifier la convocation d'un conseil extraordinaire des ministres. Si les maîtres échouent aussi massivement, qu'adviendra-t-il des jeunes gens et des jeunes filles qu'ils ont la charge d'encadrer et de former ? "Les pères mangent du raisin vert, et les dents des fils en sont agacés" (Ezéchiel 18, verset 1 à 3). Pour dire que les infortunes des encadreurs ne sont pas sans conséquences pour les encadrés. L'enseignement est un métier. Nous gagnerons donc à former de vrais hommes et de vraies femmes de métier pour le salut de l'école, si ce n'est pour le salut de la société tout entière.

Pourquoi devons-nous nous appliquer à assainir, au plan éthique et moral, le milieu scolaire ? Les journées culturelles   s'organisent, chaque année, dans toutes nos écoles et sur toute l'étendue du territoire national. Ces journées révèlent, dans et par leur organisation, un niveau de licence et de laisser-aller intolérable. C'est un peu l'école qui est mise à nu, débarrassée de l'uniforme règlementaire, soulagée des normes disciplinaires habituelles.  Ces journées culturelles, aux dires de certains chefs d'établissement, n'ont pas grand-chose de culturel. L'aliénation rime avec dépravation, libertinage avec dévergondage. L'école est en déficit de valeurs, alors que l'une de ses missions essentielles, c'est d'en transmettre aux apprenants. Et si, finalement, notre société n'avait que le type d'école qu'elle mérite. S'il devait en être ainsi, une toute première leçon mériterait d'être tirée : pour guérir l'école de ses infirmités, commençons par débarrasser la société de ses maux. Vaste programme !

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