L’intervention militaire française contre le Djihad au Nord-Mali, qui a permis une énième fois de mettre à nu l’incapacité des chefs d’Etats africains à résoudre eux-mêmes les problèmes du continent, vient de valoir à François Hollande le prix Félix Houphouët Boigny pour la recherche de la paix.
Hier, mercredi 05 juin 2013, est sans aucun doute, l’une des dates les plus importantes de la vie politique du Président Français, François Hollande. Tout comme le fut d’ailleurs celle de février où il avait été accueilli en héros au Mali. En fait, c’est hier mercredi qu’a été officiellement remis à Hollande, à Paris et en présence d’une dizaine de chefs d’Etat africains, le prix Félix Houphouët Boigny pour la recherche de la paix. Ce prix est décerné à Hollande en reconnaissance de son engagement pour la paix au Mali. Avec, notamment, l’opération Serval qui a permis de libérer le pays de Modibo Keita de l’emprise djihadiste qui le menaçait, ainsi que toute la sous-région ouest-africaine.
Sans surprise, mais…
Ce n’est pas surprenant que l’engagement militaire français au Mali soit aujourd’hui auréolé par le décernement d’un prix pour la recherche de la paix à Hollande. A part l’indignation de quelques chefs d’Etats, l’opération Serval a reçu l’approbation de bon nombre de dirigeants africains. L’intervention a été applaudie, donnant à la France d’Hollande l’image de sauveur du Mali. L’intervention militaire française au Mali a pu sortir les populations du nord du pays, des affres de l’occupation djihadiste, et sauver, in extremis, Bamako de la menace des « fous d’Allah ». C’est à saluer. N’empêche que la guerre de la France au Nord-Mali, contre le djihad, est l’expression de l’incapacité des Etats africains à régler eux-mêmes les problèmes du continent, et aussi celle du néo-colonialisme de la France en Afrique. Il faudra à ce niveau s’adonner à un simple jeu de déductions. La guerre est la manifestation de l’incapacité de l’Afrique et de la mainmise de l’ancienne puissance colonisatrice sur le continent. Il en est de même pour son issue et pour le prix décerné, ce mercredi, au héros de cette guerre, François Hollande.
Comme par coïncidence, Hollande le « pacifiste » est célébré à un moment où les combats ont repris, entre l’armée malienne et la rébellion du Mnla, pour le contrôle de la localité de Kidal. On a l’impression qu’on revient à la case départ, simplement parce que, sur la question Touarègue, Paris n’a pas joué franc-jeu avec Bamako. Si l’on ne s’attendait pas à ce que les soldats français livrent une guerre aux rebelles du Mnla, comme ce fut le cas pour les djihadistes, on espérait au moins de Paris, plus de fermeté envers cette rébellion qui fait d’ailleurs partie des facteurs ayant entrainé la transformation du Nord en tanière pour islamistes armées.
Feu vert
Au fond, cette intervention salvatrice de la communauté internationale au Mali n’est pas à condamner. Loin s’en faut. Mais, ce qui indigne et indignera tout panafricaniste, c’est la manière dont a été menée cette guerre contre le Djihad en territoire africain. Les balbutiements, les tergiversations, les débats parfois stériles et les contradictions entre chefs d’Etats africains, ont permis à la France d’avoir un alibi pour venir, une fois encore, bomber le torse et montrer ses muscles, sur le continent, au nom d’une pseudo cause humanitaire et historique. Depuis l’intervention Serval au Mali, sur le plan militaire et même politique, tout est mené par la France, comme si elle était en territoire conquis. On se rappelle encore des premières semaines de Serval où on avait l’impression que le Mali était devenu un autre Territoire d’outre mer de la métropole. En lieu et place de la France, la logique aurait voulu que les institutions régionales et panafricaines prennent vraiment le devant de la scène. Mais Hélas !
A travers le décernement de ce prix, avec la horde de chefs d’Etat qui se sont rendus à Paris pour y assister, les dirigeants africains viennent de donner caution à la politique africaine d’Hollande. Une politique visiblement plus appréciée que celle de Sarkozy. Qui a été marquée par les interventions controversées de « sa » France en Côte-d’Ivoire et en Libye en 2011. Et voilà qu’Hollande s’en sort ragaillardi. On aurait été tout de même encore plus fier si ce prix était décerné à une entité africaine (Etats, institutions sous-régionales ou panafricaines), qui aurait abattu au Mali le même travail que l’opération Serval. Félicitations à Hollande. Mais c’est là tout le regret qu’exprime cette prime à l’incapacité et au néo-colonialisme.