Des malfrats ont encore dicté leur loi le week-end dernier. Cette fois-ci, ce sont des hommes en uniforme, chargés d’assurer la sécurité des personnes et des biens, qui sont tombés dans le viseur des divorcés sociaux, à hauteur d’Ahlan, à quelques minutes de kpèdékpo, commune de Zangnanado.
Un échange de tirs nourris s’en est alors suivi. Le bilan fait état d’un mort et de cinq blessés, dont quatre civils. Le Lieutenant-colonel de l’armée nationale, Isidore Houssou, a succombé sur le champ à ses blessures. Quant au colonel Albert Badou, Chef d’Etat-major adjoint de la Marine Nationale, il a été grièvement blessé et serait actuellement admis à l’hôpital d’instruction des armées, au Camp Guézo à Cotonou, pour des soins. Selon les informations, les hommes en uniforme feraient partie d’un cortège qui revenait, samedi dernier, un peu avant minuit, de Kouandé. Ils étaient allés soutenir un confrère Général de l’armée, qui avait organisé une cérémonie d’action de grâces. Le véhicule du Directeur général adjoint de la Police Nationale, le Contrôleur général Nazaire Hounnonkpè, qui faisait également partie de la file, aurait reçu plusieurs impacts de balles mais l’officier supérieur et son garde du corps, seraient sains et saufs. Dans leur retraite, les malfrats, qui n’ont pas enregistré de dommages dans leur rang, auraient emporté un fusil AKM. Ce énième braquage vient relancer le véritable problème d’insécurité sur l’axe Kétou-Bohicon. Un axe fréquemment emprunté désormais par les usagers, vu l’état impraticable de l’axe Cotonou-Bohicon. Et c’est surtout sur des fronts comme ceux-ci que la promptitude de l’opération « Djakpata » est plus qu’attendue.
Emmanuel E. Creppy
Lire : Bohicon - Kétou : un cortège de hauts gradés tombe dans une embuscade (1 mort et 1 blessé grave)
Pourquoi les victimes doivent s’en prendre à elles mêmes
Triste nouvelle. Que des officiers supérieurs de l’armée tombent dans un braquage en pleine nuit. Que l’un des leurs y tombe sous les feux nourris des malfrats, cela ne peut qu’attrister et inquiéter le Béninois lambda, qui voit ainsi ceux qui doivent s’occuper de sa sécurité se faire avoir aussi béatement par ceux qu’ils doivent combattre. Mais, au-delà de la tristesse et de l’inquiétude, ce braquage doit permettre d’engager un débat franc sur la gestion de la sécurité au Bénin. Depuis quelques jours, on nous gargarise des prouesses de l’opération « Djakapta » initiée, dit-on, par le ministère de l’Intérieur pour éradiquer l’insécurité. La lutte contre l’insécurité se passe désormais dans les médias. Les patrouilles de policiers et de militaires essaiment les rues des grandes villes comme Cotonou, Porto Novo… On traque les menus malfrats et les toxicomanes, mais on brime et on terrorise aussi les populations, qu’on escroque parfois. L’opération « Djakpata » dépasse rarement Cotonou et ses environs. Aucune mesure ne semble être prise pour la sécurisation des personnes et des biens à l’intérieur du pays. Rien n’est fait pour quadriller les zones frontalières et les routes nationales. Les brigades n’ont souvent pas les moyens et le renseignement nécessaire pour arriver à bout de ses malfrats qui braquent, volent et tuent, et retournent dans leurs bases arrières. Le Bénin ne possède aucun plan de sécurisation globale du territoire national. Les frontières sont ouvertes, les contrôles sont faits avec désinvolture par ces mêmes militaires qui se font soudoyer pour des hors-la-loi pour passer. La lutte contre la vente de l’essence kpayo a encore empiré les choses. L’Armée et la Police, qui devraient s’occuper de la protection des populations et du territoire, sont investies d’une mission insolite qui est la lutte contre l’essence kpayo. Pendant qu’on pourchasse trafiquants et grossistes de kpayo, les malfrats eux, se réjouissent, se réorganisent pour mieux attaquer. En plus du fait qu’ils n’ont pu doter notre pays d’une bonne stratégie, d’un plan efficace de lutte contre l’insécurité, en leurs qualités et rangs de membres du Haut commandement militaire, ils ont commis l’imprudence de se hasarder dans une zone d’insécurité, nuitamment, sans prendre de précautions particulières. A maintes reprises, des Béninois ont été tués dans l’anonymat par des malfrats. Les jérémiades des uns et des autres n’ont certainement pas réussi à interpeller la haute hiérarchie militaire, pour qu’elle s’en préoccupe. Sûrement que cette attaque dans leur propre rang servira à quelque chose.
Marcel Zoumènou