Bénin : la Cour Holo prend ses marques

En moins de deux mois après son installation, la Cour Constitutionnelle présidée par le professeur Théodore Holo vient de rendre sa deuxième décision défavorable au Président Boni Yayi. Elle annonce, sans doute, les couleurs de sa mandature. 

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La Cour Holo ne sera sans doute pas une Cour dans l’arrière-cour de Yayi. C’est du moins l’impression que donne cette Cour, depuis son installation le 07 juin dernier. Parlant de cette Cour, allusion est bien évidemment faite à la Cour Constitutionnelle, cinquième mandature, dirigée le professeur de Droit public Théodore Holo et le Vice président Zimé Yérima Kora-Yarou. Avec comme membres,  Marcelline Gbeha Afouda, Bernard Degboe, Simplice Dato, Lamata Nassirou et Ibrahim Akibou Gbaguidi.

Après la désignation des membres de cette Cour, en mai dernier, les observateurs de la vie politique béninoise redoutaient qu’elle fasse l’affaire du Chef de l’Etat. En rendant, bien entendu, des décisions favorables à ce dernier.  Mais, depuis son installation, la Cour Holo a rendu deux décisions en sa défaveur.

La première claque de Holo et ses pairs au Président de la République, a été l’invalidation de la nomination du magistrat Euloge Akpo à la Cour Constitutionnelle. Conformément à la Constitution, Boni Yayi avait désigné Euloge Akpo comme l’un de ses trois représentants au sein de la haute juridiction. La polémique relative au nombre d’années d’expérience de celui-ci – il en faut 15 au moins selon la loi – a emmené des citoyens à formuler un recours en inconstitutionnalité contre sa nomination. Fraîchement installée à l’époque, la Cour Holo a débouté le Président de la République, l’amenant à désigner un autre magistrat, Ibrahim Gbaguidi, en remplacement d’Euloge Akpo.

Il a violé la Constitution

La seconde claque de la Cour Holo au Chef de l’Etat, lui a été donnée le 11 juillet dernier. Mais, elle a été rendue publique hier. La Cour a, en fait,  déclaré contraire à la Constitution certains propos tenus par le Chef de l’Etat dans son entretien «à cœur ouvert» du premier août 2012. Pour elle, «Le Président de la République a méconnu l’article 36 de la Constitution». Cet article stipule que «Chaque Béninois a le devoir de respecter et de considérer son semblable sans discrimination,  de renforcer et de promouvoir le respect, le dialogue et la tolérance réciproque, en vue de la paix et de la cohésion nationale.»

La Cour a rendu sa décision, après avoir été saisie pour un recours en inconstitutionnalité par le juriste Serge Prince Agbodjan et Aristide Domingo, membre du mouvement "y en a marre". On se rappelle que dans cet «à cœur ouvert», Boni Yayi avait tenu, sur un ton agressif et outrageant, des propos «graves» et «dangereux pour la paix et la cohésion nationale.» Les «je leur opposerai les miens du Bénin profond et ils vont s'affronter» ; «Je dis que les gens sont trop petits avec Boni Yayi», martelés par le Chef de l’Etat dans cet entretien, résonnent encore dans les mémoires. Surtout qu’un autre 1er août s’annonce à grand pas.

Ces deux décisions de la Cour Holo, viennent comme  pour rassurer les observateurs, sur sa capacité à jouer, pleinement et sans compromission, son rôle. Pourvu qu’elle maintienne le cap. Surtout qu’elle sera appelée à se prononcer sur un sujet aussi sensible que la révision de la Constitution.  

Les marcheurs de Yayi doivent doivent s’excuser 

Il faut s’en souvenir. L’entretien «à cœur ouvert» du 1er août 2012 avait suscité un grand tollé dans l’opinion. On se rappelle les nombreuses sorties médiatiques des forces de l’opposition politique et de la Société Civile, pour fustiger des propos qualifié d’ «indignes» de la part d’un chef d’Etat. Qui a prêté serment pour être garant de l’unité nationale. On se rappelle aussi des nombreuses marches organisées, et des déclarations faites en soutien au Président de la République par ses partisans. On se rappelle aussi que, pendant que l’opposition et la Société Civile étaient empêchées de dénoncer les propos de Boni Yayi, ses partisans se la coulaient douce.  Avec sa décision, la Cour Constitutionnelle vient de donner raison à l’opposition et la Société Civile. Du coup, les partisans du Chef de l’Etat, qui lui ont déclaré sans esprit critique, à cor et à cri, leur «soutien sans faille», sont désavoués. Ils doivent, par conséquent, présenter des excuses publiques à l’opposition, à la Société Civile et par delà à toute la Nation béninoise. 

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