Le Président de la Cour Suprême s’est clairement exprimé contre toute révision de la Constitution qui serait source de trouble pour la nation. Ousmane Batoko a profité de cet entretien pour apporter un peu plus d’éclaircissement sur la rencontre des présidents des cours suprêmes d’Afrique avec le Président Barack Obama.
C’était samedi sur Bbc Afrique dans l’émission Afrique matin.
Quels sont ces présidents des cours suprêmes francophones?
Il y a notre hôte sénégalais le Président Sako, il y a mon collègue de la Côte-d’Ivoire, le Président Mamadou Koné, celui du Niger, le Président Oumarou Yayé, celui du Gabon, le Président Madounga, et puis moi-même.
Pourquoi le Président Obama a tenu à rencontrer les présidents des cours suprêmes du continent?
Bon ! Je crois que la préoccupation qui était celle du Président Obama, était de préciser l’importance que lui-même accorde à la justice, et en particulier à la place de la justice dans l’édification de l’Etat de droit en Afrique. Il a affirmé sa conviction que la justice était la colonne vertébrale de la démocratie sur le continent africain.
Les présidents des cours suprêmes en Afrique sont souvent accusés d’être inféodés à l’exécutif. Est-ce que ce n’est pas pour cela que le Président Obama vous a rencontrés?
Je ne sais pas si votre affirmation peut-être confirmé par quelqu’un comme moi, parce que c’est vrai que j’ai été nommé, en ce qui me concerne, par le Président de la République du Bénin. Mais, je n’ai aucune redevance ; je n’ai aucun recours à faire à l’endroit du Président de la République, et je me sens tout à fait à l’aise et tout à fait indépendant dans les actes que je pose en ma qualité de Président de la Cour Suprême.
Alors ce que vous venez de dire c’est que la Cour Suprême du Bénin est totalement indépendante de l’Exécutif?
Totalement indépendante. Même le Procureur Général de la Cour Suprême, qui est proposé à la nomination au Conseil Supérieur de la Magistrature par le Garde des Sceaux, n’a aucun lien de hiérarchie avec le Garde des Sceaux.
Le Président Boni Yayi est suspecté au Bénin même, de vouloir modifier la Constitution pour briguer un troisième mandat. Si cela devrait arriver, vous allez dire au Président Boni Yayi de ne pas le faire?
Je ne sais pas sur quoi vous vous fondez pour estimer que le Président Boni Yayi voudrait modifier la Constitution par rapport à des intérêts personnels qu’il pourrait viser ? La modification de la Constitution s’impose après plus de vingt ans d’expérience de sa mise en œuvre au Bénin. Nous avons été un certain nombre dans le pays, juristes de haut niveau, qui avons été sollicité dès 2008 déjà, par le Président Boni Yayi, pour une relecture de la Constitution. Les premières propositions de modifications qui ont été faites au Bénin émanent de l’équipe à laquelle moi-même j’appartenais et qui avais obtenu du Chef de l’Etat du Bénin que les fondamentaux de la Constitution béninoise ne soient pas modifiés. Les fondamentaux de la Constitution béninoise c’est quoi ? C’est la laïcité de l’Etat, c’est également la limitation du nombre de mandats, c’est également la limitation en plancher et en sommet de l’âge des candidats à la Présidence de la République ; et d’après ce que l’on dit aujourd’hui au Bénin, les propositions qui sont parvenues sur la table de l’Assemblée Nationale n’ont, en aucune manière, touché à ces fondamentaux de la Constitution béninoise.
Ce qui signifie en clair que vous êtes opposé à toute modification de la Constitution béninoise pour permettre au Président Boni Yayi, s’il voulait se représenter, de le faire.
Je ne suis pas opposé à toute modification de la Constitution. Je dis que j’ai été de ceux qui ont fait les premières propositions de modification de la Constitution. Mais de modification de la Constitution qui ne porte atteinte à aucun des éléments fondamentaux de ladite Constitution. J’ajoute que, si la modification de la Constitution doit conduire à des perturbations à l’intérieur du pays, je suis de ceux qui estiment qu’il y a plus important en ce moment, à faire pour le pays, plutôt que de s’engager dans un processus de modification de la Constitution. Voilà mon point de vue M. le journaliste.
Avez-vous demandé au Président américain Barack Obama d’appuyer les cours suprêmes africaines pour plus d’indépendance?
Absolument. Nous le lui avons demandé, mais j’ai été de ceux qui ont dit au Président Obama qu’à l’exemple de ce qui se passe actuellement dans certains de nos Etats, pour ne citer que le cas du Bénin, nous bénéficions du soutien financier et matériel de certaines ONG, en particulier des ONG allemandes qui contribuent d’une manière ou d’une autre au renforcement des capacités d’action de la justice.
Interview réalisée par BBC Afrique
Transcription : Abd’el Khader ACHIROU (stg) , Enock LAHADE (stg)
Article publié dans L’Informateur et le matinal
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