Cotonou : une ville à part

Cotonou est-elle une ville ? Quelle question ? Cotonou, en plus d’être notre capitale économique, est la vitrine du Bénin. Pourtant, à y regarder de plus près, Cotonou ne nous semble pas répondre aux critères classiques pouvant l’identifier  comme une ville à part entière.

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En tout cas, au sens où l’entendent les géographes et les urbanistes par exemple. Soutenons, quant à nous, que Cotonou est une ville. Mais une ville à part, une ville pas comme les autres. Qu’est-ce qui distingue Cotonou des autres villes d’Afrique et d’ailleurs ?

Nous avons souvent mis le doigt sur certains anachronismes propres à Cotonou. On ne les verrait dans aucune grande ville du monde. Exemple : les animaux domestiques en divagation dans les rues. C’est parce que la culture rurale de base a toutes les peines du monde pour accoucher d’une culture urbaine. Un autre exemple : certaines artères de la cité sont souvent barrées. Pour cause de mariage ou de décès. Pour cause de funérailles ou de baptêmes. Ceux qui délivrent les autorisations pour de telles occupations anarchiques de la voie publique ne sont encore sortis, ni mentalement ni culturellement, de leurs villages d’origine. Voici trois phénomènes propres à Cotonou. Ils sont à tenir pour la particularité de notre capitale économique.

Premièrement. Cotonou n’a pas de quartiers résidentiels à proprement parler. Ceux des quartiers tenus pour tels ne le sont que par abus de langage. Un quartier résidentiel en impose par son cadre formel. Il est rigoureusement construit. Il a un style. Il se distingue d’une manière ou d’une autre. Un quartier résidentiel en impose également par son standing, par la qualité de ses habitations et de ses logements. Toutes choses assez indicatives du niveau de vie des occupants.

Rien de semblable à Cotonou où l’amalgame est roi. C’est la confusion joyeuse des genres. On mélange à l’envi les torchons avec les serviettes. Les baraques insalubres font bon ménage avec des logements de luxe. Des citoyens au niveau de vie fort contrasté partagent le même espace. Ils cohabitent, pour ainsi dire. Même s’ils ne se rencontrent pas pour autant. Le quartier résidentiel à Cotonou s’ordonne comme un fourre-tout. Ce qu’on ne voit nulle part ailleurs. Un sociologue crédite le Bénin, de ce fait, d’une forte capacité d’intégration sociale. Pas d’exclusion. Mais plutôt, selon lui, un bel exemple de cohabitation non conflictuelle et non discriminatoire de toutes les composantes humaines du pays.  C’est un point de vue.  

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Deuxièmement. Cotonou ne bénéficie point d’un système de transport public urbain. Toutes les expériences faites en ce domaine ont fini en eau de boudin. Elles ont été conclues par un échec retentissant. La dernière expérience en date, avec l’entreprise Benafrique, montre des signes d’essoufflement. Cette entreprise se prépare-t-elle à jeter l’éponge ?

L’Etat ne s’est jamais engagé franchement dans une expérience de transport public urbain comme c’est le cas au Sénégal ou en Côte d’Ivoire. Ce en quoi Cotonou est une ville bien orpheline à côté de Dakar et d’Abidjan. L’entreprise privée n’a pas beaucoup fait pour suppléer à l’absence, sinon à la carence de l’Etat. Plus décisive a été l’action des taxis-motos. En quelques années, ils ont envahi l’espace national. Des jeunes diplômés sans emploi ou des jeunes ruraux en rupture de ban, produits de l’exode rural, y ont trouvé un exutoire à leur chômage.

Le développement foudroyant des taxis-motos a ainsi conduit à remettre aux calendes grecques tous les projets de transport public urbain. Et Cotonou, bien sûr, en a fait les frais. Si l’espoir suscité par l’entreprise Benafrique devait tourner court, Cotonou retournerait à la case départ. Elle se confirmerait ainsi comme l’une des rares villes d’Afrique, sinon la seule, à ne pas disposer d’un service de transport public urbain.

Troisièmement. Cotonou ne dispose pas d’un service de taxis-ville. Des taxis qu’on peut héler dans la rue ou appeler par téléphone. En lieu et place, on trouve des taxis collectifs qui racolent tous azimuts. Des étrangers, de passage à Cotonou, s’étonnent qu’il en soit ainsi. Ils ne peuvent prétendre à rien d’autre qu’aux véhicules de location auprès des agences et structures spécialisées. Avec tout ce qui distingue ainsi Cotonou, posons-nous la seule question qui s’impose : Cotonou est-elle en voie de devenir une ville ou est-elle une ville à part, une ville pas comme les autres ?

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