Égypte : un coup d’État au cœur d’une démocratie naissante

Pour tous les démocrates du monde, ce qui se passe en ce moment en Égypte ressemble beaucoup à un jeu de dupe. C’est une véritable mascarade organisée par des puissances extérieures qui peut avoir de lourdes conséquences au niveau politique, économique, sécuritaire et sociale, pendant plusieurs années.

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Qu’on aime ou pas les frères musulmans au pouvoir en Égypte, leurs idéologies, leurs méthodes ou leurs politiques, ils ont le mérite d’avoir été porté démocratiquement au pouvoir. Suite à la révolution dans le pays pour l’instauration de la démocratie et les libertés individuelles et collectives, l’islamiste Mohamed Morsi a été élu démocratiquement. Alors, pourquoi ce qui n’est pas possible ailleurs, l’est dans les pays en voie de démocratisation, notamment en Afrique ?

Quand le gouvernement fabrique lui-même des terroristes

Le 26 décembre 1991, à la surprise générale, au premier tour, le Front Islamiste du Salut (FIS) est en tête des élections législatives en Algérie. Cette élection gagnée de manière démocratique et transparente par les islamistes algériens avait été annulée par le gouvernement algérien en accord avec certaines puissances occidentales. De peur de les voir appliquer leur programme de campagne, qui stipulait entre autres, la révision des contrats pétroliers et gaziers entre leur pays et les pays occidentaux, notamment la France, cette décision aux conséquences dramatiques a été prise. La suite est malheureusement connue. L’Algérie a ensuite basculé dans l’horreur pendant une décennie en entrainant avec elle, dans les abysses de la terreur des attentats aveugles, la France et les États-Unis. Pour couronner le tout, les dirigeants du parti vainqueur de cette élection annulée, ont été arrêtés et jetés en prison, comme en ce moment en Égypte. Leur crime ; avoir gagné des élections de manière démocratique.

Voilà comment le gouvernement algérien soutenu par des puissances étrangères a lui-même « fabriqué » les différents groupes terroristes qui ont semé le chaos et la terreur pour se venger. On se souvient encore des vagues d’attentats en 1995 en France et chez l’oncle Sam. Les victimes de ces années noires, sont estimées entre 60 000 et 150 000 morts et des milliers de blessés et handicapés. Il paraît qu’en politique, pour défendre des intérêts économiques ou politiques, qu’il ait « mille morts à gauche et mille morts à droite », cela n’a vraiment aucune importance. Alors, nous voilà averti pour ce qui pourrait arriver en Egypte, sous nos yeux, comme d’ailleurs en Syrie, sans que personne ne soit offusqué.   

Les rasions de ce coup d’État militaire en Égypte sont multiples

Comme en Algérie, on imagine mal l’armée égyptienne opérer un coup d’État, car ça est un,  sans l’appui des services de renseignements des puissances étrangères. Les rasions de ce coup d’État militaire sont multiples. Entre autres, la politique menée sur les bases de la Charia (loi islamiste qui régit la vie politique, religieuse et sociale dans les pays musulmans). De fait, la proximité de l’Égypte avec Israël, les liens de ce pouvoir égyptien avec des groupes islamistes, ennemis de l’Etat Hébreu, ont favorisé le renversement de ce pouvoir démocratiquement élu. Il faut reconnaitre néanmoins que la menace pour Israël devait sérieuse avec l’islamisation de la société égyptienne, imposée par les islamistes au pouvoir. Comme en Algérie, en 1991, l’élection démocratique, et inattendue des frères musulmans égyptiens, a été vécue comme un réel danger pour Israël, par certaines Etats occidentaux, notamment les Etats-Unis. Pendant plusieurs  années, le régime militaire d’Hosni Moubarak a été chouchouté par les américains, parce qu’il garantissait la sécurité d’Israël et la stabilité dans la région. En échange, les occidentaux fermaient les yeux sur les actes anti-démocratiques de ces militaires.

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En renversant les frères musulmans, grâce aux agents de la CIA qui ont infiltré et instrumentalisé ces millions de jeunes pour défier les islamistes, puis, permettre à l’armée de se positionner comme recours, l’objectif aujourd’hui est de mettre au pouvoir, un acteur qui sécurise les intérêts des uns et des autres dans la région. Mais pour cela, le prix à payer risque d’être très lourd. Désormais, les islamistes qui se sentent humiliés et dépossédés de leur victoire, acquise démocratiquement après près de vingt ans de lutte, peuvent transformer cet affront en guerre religieuse.

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