Ifb : le procès de Benjamin Déguénon au tribunal des animaux

 

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L’espace Joseph Kpobly de l’Institut français du Bénin (Ifb) à Cotonou est transformé depuis quelques semaines, en une salle d’audience au tribunal des animaux, où le plasticien sculpteur d’origine béninoise Benjamin Déguénon se trouve au banc des accusés. Echos d’une audience hors commun.

Benjamin Déguénon. Artiste peintre et sculpteur de nationalité béninoise, originaire précisément d’Abomey, est à la barre pour péchés d’enfance commis sur les animaux. Loin des tribunaux traditionnels, le procès ouvert depuis le 04 juin 2013 se déroule dans un parquet spécial, devant des juges et une assistance peu ordinaires. L’espace Joseph Kpobly de l’Institut français du Bénin (Ifb) à Cotonou pris d’assaut par des animaux, toutes espèces confondues ; le plaignant, l’avocat et le juge, aussi des animaux. C’est du moins, la mise en scène au cœur d’une exposition d’œuvres de Benjamin Déguénon.

“Audience’’. Un procès suscité en réalité par l’accusé même, pour une réconciliation, dit-il, avec les animaux représentés ici par des sculptures et  des tableaux.

«“Audience’’, c’est aussi ma vie. Quand j’étais petit, je trouvais du plaisir à taper sur toute sorte d’animal que je croisais; à jeter des pierres à des animaux, à faire du mal à toutes sortes d'animaux que je rencontrais sur mon chemin», raconte l’artiste. Aujourd’hui qu’il s’est rendu compte des torts qu’il a faits, inconsciemment, à ces êtres, l’artiste reconnaît publiquement ses fautes et demande pardon. « […] Ce n’était pas normal, il faut que j’essaye de me réconcilier avec ces animaux, auxquels j’avais fait du mal.» Confie-t-il.

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L’exposition, dont le vernissage a eu lieu le 04 juin 2013, est accompagnée d’une projection faite de dessins. «Et quand vous suivez, vous sentez que ce sont des animaux qui ont été vraiment maltraités, qui sentent une certaine douleur. C’est un peu comme des livres qui s’ouvrent pour montrer ce qu’un homme aura commis comme erreur dans sa vie passée», explique Benjamin. L’exposition prend fin le 08 juillet prochain.

Désormais ami et défenseur des animaux

Au-delà de l’art, c’est effectivement une réalité dans la vie de l’artiste, d’après ses explications. Il raconte : «Ce n’est pas facile de reconnaître publiquement ses erreurs du passé. Cela n’a pas été facile, d’ailleurs. C’est un travail psychologique qui a été fait. Je me suis rapproché de mes aînés. Leur dire, voilà, il y a telle, telle chose sur mon cœur, et il faut que je me libère. Il faut que j’essaye de faire de mon mieux pour pouvoir me réconcilier avec ces animaux.»

Et ce travail, dont l’accouchement est la présente exposition, a duré 4 mois, aux dires de l’artiste qui, désormais, une fois l’exposition réalisée, se dit conscient et rassuré d’avoir été pardonné et se trouve libéré. Aujourd’hui, ajoute-il, j’ai des animaux, je les adore.

Outre son pardon, “Audience’’ est en effet une manière pour Benjamin, de donner l’exemple de la préservation des animaux. Dans ses propos, il se montre dur envers les braconniers qui, déplore-t-il, tuent les animaux en désordre dans les forêts. A l’en croire, c’est une lutte qu’il est en train de mener au profit des animaux. «Parce que dans le monde aujourd’hui, il y a beaucoup d’espèces animales qui sont en voie de disparition», regrette-il. L’exposition, “Audience’’, c’est sa manière à lui, de plaider pour la sauvegarde de la faune. 

Les boîtes de conserve, l’autre vie de Benjamin Déguénon

Dans la réalisation de toutes ses œuvres, Benjamin Déguénon utilise désormais des boîtes de conserve. C’est son choix depuis 7 ans, nous informe-t-il. C’est là encore, une histoire de vie d’enfance de l’artiste. Histoire qu’il nous raconte en ces termes : «Quand j’étais petit, je me suis beaucoup amusé avec toute sorte de boîtes de conserve. Une fois devenu grand, et une fois me suis-je retrouvé dans l’art, un milieu qui me passionne beaucoup et que j’aime beaucoup, quand je vois de ces boîtes qui traînent dans les poubelles, dans les rues, sur les tas d’ordures, partout où je passe, c’est un peu comme si j’ai un ami qui est en train de me quitter. J’essaye de récupérer ces boîtes qui ont été entre temps mes amis – ils continuent d’ailleurs de l’’être – et je leur donne encore une seconde vie. C’est au fond, la raison de mon art de récupération aujourd’hui.»

Le bruit de l’art

Mais, il y a aussi une autre raison de son attachement à ce matériel de travail. C’est l’amour du bruit de l’art. Les boîtes de conserve, quand elles sont mises ensemble, produisent ce bruit. «J’aime le son de la matière. J’aime vivre la matière.» Ce bruit qui permet à cet artiste du Danxomey, de mieux s’exprimer, plus qu’avec les vibrations de la peinture, sa première destination dans le domaine des arts plastiques.

En effet, Benjamin a commencé l’art par la peinture, avant de l’abandonner pour la sculpture. Et pour cause ! «Entre temps, je me suis rendu compte que je n’arrivais pas vraiment à m’exprimer à travers la peinture. Ce qui a fait que j’ai fini par lancer mes recherches artistiques dans la récupération.» Explique-t-il.

Pseudo récupération en réalité. «Je parle de récupération, mais en réalité, aujourd’hui au Bénin, il faut acheter. Pour la plupart, j’achète. Mais aussi, je n’hésite pas à ramasser ces boîtes dans la rue, dans les poubelles, ….» confie l’artiste. 

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