Célestine Zanou met Yayi sur la sellette

La présidente de la Dynamique du Changement, Célestine Zanou, est intervenue hier  dans l’émission matinale «La caravane du Matin », sur Radio Tokpa. Pendant près d’une dizaine de minute, l’ancienne Directrice de Cabinet du Président Kérékou n’a pas mis de gants

Publicité

, en ce qui concerne la gestion de Boni Yayi, depuis son avènement au pouvoir en 2006. Dans le développement qu’elle a fait en direct dans l’émission, par Téléphone, elle a accusé Boni Yayi d’être comptable des nombreux dysfonctionnements que connait le Pays. Et ceci, à travers ses mauvais choix sans cesse répétés et ses réformes mal-engagées. Nous vous proposons, ci-dessous, la lecture de l’intégralité de la déclaration de Célestine Zanou.

Intervention  De Mme Zanou Sur Radio Tokpa

Bonjour le Plateau, bonjour à tous…et  bonne fête à nos frères et sœurs musulmans.

Merci de me permettre de m’exprimer sur ce thème crucial  qu’est l’administration publique au Bénin.

Le vrai est une force et la force du vrai s’est manifestée ce matin avec ce qu’a dit Monsieur Eloi Hounkponou  en introduction à la rubrique « savoir pour mieux vivre ».

Publicité

C’est dans cet ordre d’idées qu’au plateau, aux auditeurs et auditrices de Radio Tokpa, je dirai ceci : «seul ce qui a été accompli dans la vérité restera» Il va s’en dire que les Hommes et les Femmes politiques doivent, dans la situation actuelle de notre pays, faire le choix responsable de la cohérence entre le dire et le faire qui n’est rien d’autre que la Vérité. La vérité libère et élève ; la vérité n’a qu’un seul chemin et elle est mon choix.

Je dirai aussi avant mes propos sur le sujet qui m’interpelle que  chaque graine de vérité semée vous revient toujours multipliée.

Je ne crains donc pas les représailles en prenant la parole ce matin pour apprécier, sur la base de mon expérience à divers niveaux de responsabilité dans  l’administration, la situation de notre administration publique.

1.Je voudrais que vous reteniez sur ce sujet que, seuls ceux qui sont dans l’administration peuvent valablement en parler ; seuls ceux qui en ont l’expérience ont réellement droit à la parole si tant est que nous voulons faire un débat sérieux pour  faire jaillir des propositions objectives.

Les autres, notamment le secteur privé avec son livre blanc, les autres disais je, ne pourront que se prononcer sur la qualité des services attendus de notre administration.

Parole donc aux fonctionnaires et à eux principalement lorsqu’il s’agit de mesurer le niveau de déconfiture de l’administration publique, les causes de cette déconfiture et les solutions pour en sortir.

Qui mieux que les douaniers peut parler de l’administration douanière et des mesures pour la rendre performante?

Qui mieux que les cadres des Ministères des finances, de l’agriculture, de l’environnement, des travaux publics, de la justice, de la santé, de l’éducation etc…. peut parler des problèmes de ces ministères et leur rechercher des solutions adéquates?

Qui mieux que les Agents de la Police, de l’Armée, de la Gendarmerie et les fonctionnaires de la Présidence, peut parler de leurs problèmes pour être à même de les résoudre ? Il a bien fallu que j’aille à la Présidence en 1998 pour y découvrir une situation m’ayant conduite à tout faire pour instaurer des primes aux agents civils et militaires comme c’est le cas dans les ministères !!!

2. Je suis de l’Administration publique et ma qualité de pratiquant de cette administration et aussi d’observateur honnête, je puis vous affirmer que l’administration publique béninoise est dans un état de déstructuration avancée et ne peut impulser aucun développement.

Je donne quelques exemples

Dans notre pays aujourd’hui, du moins depuis 2006, nos ministres sont réduits à des microcosmes villageois, une situation qui leur enlève tout sens de la République.  En effet, dès qu’ils sont promus ministres, leurs villages célèbrent à leur demande l’évènement et les Ministres vont organiser des marches pour clamer leur soutien et leur allégeance au Chef de l’Etat; ils deviennent ainsi, et  sans transition aucune, des hommes politiques qui portent la parole du Chef de l’Etat. La République n’existe plus depuis 2006…..

Il en est de même pour les DG de sociétés, de simples Directeurs techniques ou des simples agents promus.

Désormais donc au Bénin, la région, la religion et le Parti du Chef de l’Etat (FCBE)  sont les critères de nomination en remplacement des critères compétence, expérience et mérite.

Je m’indigne contre cet état de chose, car lorsque nous étions aux affaires, la situation était toute autre ; elle n’était certes pas reluisante mais on s’employait à l’améliorer et je pensais que le «Changement» de Boni Yayi allait poursuivre  l’œuvre en cours. Je m’en voudrais de ne pas citer ici des exemples qui ont relevé de mon ressort :

° Laourou Grégoire, aujourd’hui député à l’Assemblée Nationale a été promu dans ce pays au poste de Directeur Général du Budget (DGB) alors qu’il était membre du NGR de Paul Dossou , Parti de l’opposition dont on connait la virulence des propos par rapport au Pouvoir. Il avait le profil et face à l’acharnement du pouvoir d’alors à positionner quelqu’un d’autre, j’ai résisté pour que place reste au mérite, à l’expérience et à la capacité. Je me souviens avoir dit «à compétence égale, proposez moi quelqu’un de la mouvance» et comme ce ne fut pas le cas, Laourou Grégoire a eu ce poste qui était en notre temps, un poste technique.  Il fut un bon DGB, tellement bon qu’il fut promu ministre en 2001.  Je ne vois pas aujourd’hui un cadre de l’opposition occuper un poste du genre  DGB fut il compétent, expérimenté et capable. C’est un dangereux recul…

° Je m’en voudrais dans cette foulée relative à Laourou,  de ne pas  citer le cas de son ministre d’alors, Monsieur Abdoulaye Bio Tchané ; contre toute attente et à mon initiative personnelle, ce fonctionnaire de la BCEAO, est devenu Ministre des finances. Il est là; posez lui la question. Il fut un bon ministre des finances et je suis fière de cet exploit que j’ai réussi dans l’intérêt de mon pays même si ce ne fut pas facile.

Je me souviens des tractations pour le renouvellement du mandat de Boni Yayi à la BOAD ; je veux seulement croire que l’actuel Chef de l’Etat et ancien Président de la BOAD n’a pas oublié les échanges que lui et moi avions eus à ce sujet en ma qualité de Directeur de Cabinet du Président de la République d’alors son Excellence Mathieu Kérékou et de membre du CA/BOAD.

Je veux aussi croire que le Président Boni Yayi se souvient encore des réticences motivées d’ailleurs du Président Kérékou ; Si Mathieu Kérékou avait tenu compte des considérations politiques soulevées par les détracteurs de Boni Yayi, il n’aurait jamais été reconduit à son poste et je sais le rôle que j’ai joué dans ce dossier en ma qualité de DC/PR pour défendre Yayi et faire prévaloir le sens de l’Etat ou la raison supérieure. Kérékou est encore vivant ainsi que d’autres témoins… Yayi n’était ni mon parent ni de chez moi !!! Je n’en dirai pas plus aujourd’hui…

° A la SBEE sous Kowé Corentin actuel Préfet Mono-Couffo et Mme Célestine Adjanohoun, mes empreintes de défense de la capacité  et du mérite sont restées indélébiles.

Je me souviens comme hier, des questions  toujours posées par le Président Kérékou à chaque nomination dans l’administration, en tout cas pendant que j’étais là : elles concernent : expérience, capacité et moralité.

Cela fut possible parce que le sommet qu’était Mathieu Kérékou  connait l’administration. L’administration c’est avant tout  HIERARCHIE  et lorsqu’elle n’est pas respectée, c’est la porte ouverte aux dérives et en cela je salue le combat et la résistance des magistrats qui ont refusé l’amalgame et le désordre que le régime a voulu leur imposer…ils doivent rester vigilants. 

3. A travers ces différents cas cités, je voudrais montrer que l’exemple doit toujours venir d’en haut, du sommet et c’est le moment de dire que le Président Yayi Boni n’ayant pas fait l’administration publique, a tout simplement foulé aux pieds les règles élémentaires de nomination dans l’administration publique et la gestion des ressources humaines.

Encore quelques exemples

a. Des cadres A1.3 sinon même B dirigent des A1.10 et A1.12

b. Des agents contractuels sont promus Directeur du recrutement des Agents Permanents de l’Etat parce qu’ils appartiennent à la bonne ethnie et à la bonne région

c. Des jeunes partisans n’ayant jamais travaillé sont propulsés DPP adjoints dans  des  ministères ;  Voir la centaine de nominations de février 2011

d. Des jeunes, certains délégués médicaux et d’autres ancien étudiant / Chef cabinet sont devenus par la force de la politique des DG de grandes structures de la place. N’est ce pas la porte ouverte à l’arrogance et au manque de respect ?

e. Des DG  et Directeurs techniques  sont en contact direct avec le Chef de l’Etat à l’insue de leurs ministres de tutelle qui parfois les croisent à la Présidence à leur grande surprise. Le Chef de l’Etat entretien directement des relations avec les collaborateurs des Ministre mettant à mal respect dû à la hiérarchie assorti de Compte rendu. On n’est plus dans une administration !!!! parce quand c’est ainsi, comment voulez vous que les DG et autres Directeurs respectent les ministres? Comment voulez vous que les Chefs de service qui sont directement connectés au Chef de l’Etat respectent les DG et Directeurs techniques ? Le désordre est à son comble dans notre administration publique !!!

f. Le Chef de l’Etat n’hésite pas à interpeller son ministre devant les collaborateurs de ce dernier, des collaborateurs qui affirmaient à qui voulaient les entendre qu’ils doivent leur nomination au Président de la République et juraient faire partir leur ministre. J’ai apprécié en son temps, l’attitude de ce ministre.

g. Dans notre pays, il a suffit qu’un cadre, je veux nommer Paul Gnimagnon du Parti NEP- MIXALODO se déclare de l’opposition pour qu’il soit relevé de ses fonctions et envoyé sous ordres dans l’Atacora. Il parait qu’il file depuis peu le parfait amour avec les autorités ….l’allégeance a dû passer par là…

h. Mes chers amis du plateau, auditeurs et auditrices, j’ai eu droit récemment à des confidences graves sur un ministère où une DAC qui n’est pas de l’administration, d’un âge bien jeune, s’est érigée au nom de la bonne ethnie et de la camaraderie  en vice ministre donnant des ordres à son supérieur qu’est le DC, aux Conseillers Techniques , ceci au nez et  à la barbe du cabinet . On est où là ? Je veux nommer ici le ministère de la micro-finance sous Mme Madougou.

i. Depuis 2006, des ministres viennent attendre des heures au palais sans être reçus par le Chef de l’Etat qui éprouve apparemment un plaisir à les voir traîner dans ses couloirs. Même les Présidents d’Institution sont logés à cette enseigne du mépris et de l’humiliation. J’ai été scandalisée par ces traitements infligés à de hauts responsables de notre pays. Où est le respect qui caractérise la gestion des ressources humaines?

j. Des pasteurs sont nommés dans notre administration

k. Le Chef de la majorité présidentielle, un émérite professeur d’Université est DC dans un Ministère. Vous voyez Harlem  DESIR  en France Directeur de Cabinet de Mme Taubira, de Fabius ou de Valls? Le mélange des genres est nauséeux…

l. Des ministres démettent des agents de leurs fonctions et le Chef de l’Etat demande de les remettre. Les Ministres Akoffodji Grégoire et Mamata Djaouga ont fait cette amère expérience.  Comment voulez vous que les ministres soient respectés dans un pareil élan de culte de la personnalité et de mépris des responsables de ce rang ?

m.Même dans l’armée et la police, les généraux sont contraints d’aller célébrer le Chef et c’est au retour  d’une de ces manifestations de célébration du Chef qu’un colonel a été tué par les malfrats et le DGPN adjoint a frôlé la mort sans que personne ne s’occupe du soutien psychologique dont tout être humain bénéficie en pareille circonstance

4. A tout cela s’ajoute les délations de tout genre

n. Vous êtes DG et vous manquez de respect publiquement à votre ministre en tenant  à son égard des propos désobligeants et paf, vous êtes promu ministre et votre ministre est limogé. Sur ce registre, je veux citer le cas de Djimba et Badarou. La bonne région et la bonne ethnie ont eu raison de la compétence de, de l’expérience et de la capacité car tout le monde connait Badarou dans le secteur portuaire !!!

o. Le Chef de l’Etat a relevé de ses fonction un DG de sociéte parce qu’elle aurait parlé de lui… NON !!!!  «il m’a été dit que tu as dit que» voilà en substance ce que me révélait  l’intéressée  il y a quelques années ; une DG limogée par une bande défilante à la télé après l’avoir fait attendre des heures au palais ; le temps qu’elle retourne à son bureau se posant des questions sur ce qu’elle venait de vivre, c’est son assistante et sa secrétaire qui lui annoncent son limogeage. NON !!! On ne peut traiter des responsables ainsi !!!

p. Des ministres de la République ont été sortis du gouvernement dans des conditions similaires ou presque;  je veux nommer Colette Houeto, Alexandre Dossou Kpèdétin, Gaston Dossouwi Mathys Adidja, des hommes et des femmes à la compétence éprouvée et reconnue

Il se révèle que notre président fonctionne à l’HUMEUR et l’HUMILIATION  est devenue le mode de gouvernance au Bénin. Le respect de la hiérarchie a disparu du fonctionnement de notre administration où règnent désormais irrespect, frustrations et dans le meilleur des cas, indifférence. Quelle émergence pouvez-vous avoir avec un contexte du genre ?

La liste est longue et je conclus en disant que le Président Boni Yayi est le Premier responsable de la déstructuration de l’administration publique  et toute idée contraire relèverait d’une «ventrocratie» ou d’une recherche puante de poste à laquelle je ne  voudrais pas que radio Tokpa, respectée pour le débat d’idées avec la Caravane du matin, serve de cadre tout trouvé.

5. Le Président Boni Yayi, dans la gestion des ressources humaines et donc de l’administration publique et semi publique est resté dans une logique de récompense et non de recherche de performance et d’efficacité  comme cela devrait être dans une administration que l’on veut porteuse de développement. Yayi Boni aime qu’on lui soit redevable en tout temps et en tout lieu et cet esprit est partagé par son système sinon comment peut on prendre le fait qu’un responsable aille en mission pour une faveur?

6. C’est donc le gros problème; ne pas faire un bon diagnostic, c’est être certain de passer à côté des solutions idoines.

Voilà donc avec des exemples précis, le diagnostic de l’administration publique  dans laquelle n’eut été notre lettre ouverte du 27 février dernier, on aurait déjà déversé des agents recrutés dans des conditions floues, calamiteuses et frauduleuses pour continuer à y entretenir le désordre, l’arrogance et l’incompétence au nom de l’appartenance à la bonne chapelle politique, la bonne région et la bonne ethnie.

7. Les solutions, j’en avais proposées dans mon recueil sur les 10 RECULS de Changement que j’avais d’ailleurs envoyé au Chef  de l’Etat.  Je reste disponible pour approfondir la question dans une émission où nous aurons plus de temps mais d’ores et déjà je pense qu’il faut des Etats généraux de l’administration pour faire se dire les vérités, faire rétablir la confiance et lancer une dynamique d’éclosion, d’épanouissement et d’indépendance des compétences.

Mesdames,  Mesdemoiselles Messieurs, au nom de la Hiérarchie cosmique, j’ai dit.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Publicité