Révision de la Constitution : à propos de l’imprescriptibilité des crimes économiques

L’inscription de l’imprescriptibilité des crimes économiques dans la Constitution, fait partie des raisons avancées par le régime Yayi et ses  partisans, pour justifier le projet de réforme constitutionnelle engagée par ce dernier. Pourtant le nouveau Code de Procédure Pénale et la Loi anti-corruption disposent déjà de l’imprescriptibilité des crimes économiques.

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«Création et constitutionnalisation de la Cour des Comptes, constitutionnalisation de la Cena, inscription dans la Constitution de l’imprescriptibilité des crimes économiques».  C’est sur ces trois arguments que se fondent le Président Boni Yayi et ses partisans, pour justifier de la nécessité et de l’opportunité du projet de révision de la Constitution du 11 décembre 1990. L’argument relatif à la question de l’imprescriptibilité des crimes économiques, fait encore plus de débats, ces jours-ci. Pourtant, la question de l’imprescriptibilité des crimes économiques est déjà réglée par l’actuelle Constitution, la Loi anti-corruption et le tout nouveau Code de Procédure Pénale. Les crimes économiques sont en fait déjà déclarés comme étant imprescriptibles par l’arsenal juridique béninois.

Récemment, sur l’émission Libertas de la radio confessionnelle Immaculée Conception, le professeur Maurice Ahanhanzo-Glèlè, l’un des pères fondateurs de la Constitution béninoise, avait fait constater que  le gouvernement ne pouvait pas se prévaloir de la question de l’imprescriptibilité des crimes économiques pour justifier son projet de révision de la Constitution. Selon lui, l’article 37 de la Constitution de 1990 traite déjà de la question de la lutte contre la corruption. Cet article 37 dispose : «Les biens  publics  sont sacrés  et inviolables.  Tout citoyen  béninois  doit les respecter  scrupuleusement  et les protéger. Tout acte de sabotage, de vandalisme, de corruption, de détournement, de dilapidation ou d’enrichissement  illicite, est réprimé dans les conditions prévues par la loi.» Parlant de loi, le Bénin s’est doté de deux lois dans lesquelles il est écrit, noir sur blanc, que les crimes économiques sont imprescriptibles.   Ce sont, la Loi 2011-20 du 12 octobre 2011 portant lutte contre la corruption et autres infractions connexes en Républiques du Bénin, et la Loi 2012-15 du 18 mars 2013 portant Code de Procédure Pénale en République du Bénin.

Dispositions existantes

La Loi anti-corruption dispose en son article 21 de ce qui suit : «Pour les infractions visées par la présente loi, le délai de prescription des délits est de vingt (20) ans. Ce délai de vingt (20) ans court de la date de la découverte de l’infraction. Lorsqu’en raison de sa qualité, de l’emploi ou des fonctions assumées, l’auteur ou le complice n’a pu être poursuivi, le temps passé au poste interrompt la prescription. Les crimes économiques sont imprescriptibles.»  Le nouveau Code de Procédure Pénale stipule, quant à lui, aux alinéas 3 et 4 de son article 8 : «Les crimes économiques, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité sont imprescriptibles. Toutefois, en cas de contravention ou de délit connexe à un crime, ou de contravention connexe à un délit, le délai de prescription le plus long s’applique.»  

On pourrait donc voir l’inscription de l’imprescriptibilité des crimes économiques dans la Constitution comme une autre manifestation de la volonté du Président Boni Yayi à lutter contre la corruption. Mais pour la révision, c’est un argument léger, au vu de ce que prévoit déjà le cadre légal béninois.  Encore que, la volonté du Président Boni Yayi de lutter contre la corruption et l’impunité, doit se faire savoir, non pas seulement dans la prise des lois, mais aussi dans la manière dont le pays est gouverné sous son régime.

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