Fidjrossè, mon amour

Il n’est pas trop exigeant le citoyen lambda. Il en faut peu pour le combler. Mais nos politiciens ne le savent pas toujours. Parce qu’ils ne connaissent pas le citoyen lambda en question. Ils l’appréhendent davantage comme un électeur potentiel. Il n’est intéressant que dans l’espace du temps utile des élections. Le citoyen lambda, pour le politicien, n’est qu’un mouton dans la masse d’un troupeau de moutons.

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En quelques années, le quartier Fidjrossè, à Cotonou, a pris un essor fulgurant. Il s’impose désormais comme un lieu de rendez-vous privilégié des Béninois, des jeunes Béninois notamment. Ne parlons pas de l’immobilier en plein boom. La jet-set locale y fait rivaliser de virtuosité et de créativité la crème de nos architectes. Nous voilà loin, en moins de deux décennies, de la petite bourgade perdue entre terre et mer.

Fidjrossè, comme on le voit, accueille, d’une part, un nombre de plus en plus important de Béninois. Il y a ceux qui s’y installent et en deviennent des résidents permanents. Fidjrossè offre, d’autre part, une multitude de services et de loisirs à des milliers de non résidents. Il y a ceux qui vont et ceux viennent pour leur plaisir et leur travail, jour après jour, semaine près semaine. Des touristes s’y invitent également. Ne parlons pas de la foule de petits métiers qui s’y développent. Ils nourrissent le garde-vélo. Ils font prospérer les affaires du tenancier de bar et de buvette. Ils font roter d’aise le propriétaire de maquis.

Dans les pays normaux, personne ne peut rester indifférent à ce phénomène de sociologie urbaine qu’est devenu Fidjrossè. Dans ces pays, le politicien imagine, conçoit et propose l’accompagnement indispensable au développement d’une cité en devenir. Et c’est le citoyen-électeur qu’il place au centre de ses préoccupations. Car ce dernier, avant d’être un électeur dont le suffrage compte, est d’abord et avant tout un être de besoin. De ce point de vue, il ne lui importe pas peu d’avoir accès à un certain nombre de biens et services, à certaines commodités et facilités. Nos politiciens à nous, devant des faits d’évidence, sont dans la posture plutôt problématique des trois fameux singes de nos légendes. Ils ne voient rien. Ils n’entendent rien. Ils ne disent rien.  

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1- Fidjrossè n’est pas un modèle de propreté. Quand un quartier devient un centre d’intérêt aussi important pour un aussi grand nombre de gens, le politicien ne peut ni laisser faire ni dormir du sommeil du juste. L’état de propreté des lieux doit le préoccuper. Il a à dire et à montrer à tous que nous sommes loin, bien loin d’une porcherie. Le quartier, par ailleurs, ne devrait plus évoluer en roue libre, sans qu’on ne se conforme, dans son développement, aux exigences d’un plan directeur. On ne peut plus s’y installer dans la confusion. On ne peut plus y construire dans le désordre. En somme, la pagaille à laquelle on nous a habitués dans la plupart des quartiers de Cotonou, devrait s’arrêter à la porte de Fidjrossè.

2 – Fidjrossè a vocation à être la lumière au propre et au figuré, de jour et de nuit. Pour souligner l’importance de l’éclairage public pour ce quartier qui est déjà un joyau naturel par sa plage. Fidjrossè est également une cité résidentielle par la qualité de nombre de ses maisons et infrastructures hôtelières. La lumière sera le plus sûr antidote contre l’insécurité. Elle sera aussi efficace que plusieurs patrouilles réunies de « Djapkata », les patrouilles armées préposées à nous garantir paix et sérénité, de jour comme de nuit.

3 – Fidjrossè doit veiller comme à la prunelle de ses yeux au front de mer. Nous parlons de ce qui constitue indubitablement la vitrine du quartier. Il s’agit de la partie, actuellement utile, de la Route des Pêches, bordée de maquis et de restaurants, de centres de loisirs et de jeux. On ne peut comprendre que cette portion de route ne fasse l’objet du moindre entretien. Dans les pays normaux, l’utilité de cette voie justifierait pleinement qu’elle fasse l’objet de toutes les attentions : nettoyage, pavage, balisage, arrosage… Ici, nous entretenons les nids de poules et les ornières comme des trophées qui clament notre laxisme individuel, célèbrent notre démission collective. Et si cet état des choses n’était que le reflet de nos rapports à notre propre développement, à ce qui nous est pourtant sacré, à nos valeurs ? Fidjrossè, mon amour, ne mérite pas qu’il soit ainsi piétiné, qu’il soit ainsi trahi.

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