Le bureau de l’Assemblée Nationale s’est fendu d’un communiqué, hier pour rassurer les forces politiques et les organisations engagées contre la révision, de sa volonté de les associer au processus. Comme le Président de la Cour Constitutionnelle, le bureau de l’Assemblée s’immisce maladroitement dans le débat et s’auto-attribue des responsabilités qu’elle ne devrait pas avoir.
’est un véritable anesthésiant, ce communiqué du bureau de l’Assemblée Nationale. Alors que la fronde antirévisionniste enfle dans l’opinion, et que de plus en plus de voix s’élèvent contre le projet, l’Assemblée Nationale, trouve l’occasion de jouer à l’apaisement des forces politiques et des acteurs impliquées. Mais, elle va plus loin. «A l’étape actuelle de la procédure, rien n’est encore tard. Aucune disposition constitutionnelle ou légale n’interdit à l’Assemblée Nationale d’adopter la méthode qui lui semble la mieux adaptée, non seulement pour rassurer la population béninoise que rien ne sera fait contre ses intérêts, mais également pour recueillir et exploiter au mieux toutes les préoccupations qui font aujourd’hui le lit des débats et déclarations dans l’opinion publique», précise le communiqué. Et c’est à ce niveau que le bât blesse. Comment l’Assemblée Nationale peut-elle se substituer au gouvernement, en faisant à sa place le travail nécessaire de vulgarisation qui doit être le sien en tant qu’initiateur de ce projet. Il est étonnant d’entendre le bureau de l’Assemblée Nationale dire de telles choses car depuis 1990, la pratique parlementaire ne prend pas en compte la sensibilisation des populations. Il lui arrive parfois de recevoir des groupes constitués qui ont des griefs contre des projets de loi envoyés à l’Assemblée Nationale par le gouvernement, mais jamais il ne s’est agi d’une campagne ou d’une large consultation nationale.
Autre inquiétude dans la démarche annoncée par le Parlement, comment pourra-t-elle conduire ce débat sur la révision de la Constitution, alors que le projet ne vient pas d’elle, et qu’elle n’est pas censée en maîtriser tous les contours. L’Assemblée nationale a-t-elle pris la mesure de cette responsabilité ? Normalement, les consultations devraient être faites par le gouvernement, avant que le projet de loi ne soit envoyé à l’Assemblée Nationale. Le bureau de l’Assemblée Nationale a simplement choisi de prendre une grande responsabilité. Comment pourra-t-elle associer les partis politiques, les organisations de la Société Civile et les mouvements citoyens ? Comment et quand recueillera-t-il leurs amendements et comment les intègrera-t-il ? Qui va financer ces consultations, lorsqu’on sait que l’Assemblée Nationale ne dispose pas de lignes budgétaires pour le faire. Depuis 1990, elle a simplement étudié, amendé et voté les lois qui lui sont envoyées. Jamais elle n’a organisé une campagne nationale de grande envergure. Cette déclaration, qui intervient quelques jours après celle des présidents d’institutions, ressemble aux nombreux subterfuges du gouvernement pour endormir l’opinion, afin de faire un passage en force dans le cadre de cette révision qu’on sait désormais tenir à cœur à Yayi.