Le FORUM des Présidents des Institutions constitutionnelles de la République Ou La Concertation du Crime

Encore une fois la presse a abreuvé ton peuple la semaine dernière de l’une  de ces graves dérives institutionnelles, à laquelle nous nous sommes  progressivement habitué, en dépit des  dénonciations de certains de nos concitoyens, et surtout de  ton journal.

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Tu l’imagines très bien ! Euh ! ‘’ la concertation des Présidents’’, une initiative radicalement anti constitutionnelle, antidémocratique, contre le principe sacrosaint de la séparation des pouvoirs dans un Etat de droit de démocratie plurielle, et enfin contre toutes les  normes élémentaires de gestion des affaires publiques d’un Etat moderne  consacré par ta Loi fondamentale du 11 décembre 1990. A ce qu’il paraît, c’est déjà l’amorce de la démocratie participative préconisée par la nouvelle constitution en gestation.

Pourtant, ton peuple a résolument  tourné le dos au régime totalitaire du parti unique, dirigé par le guide éclairé avec les ailes marchantes, sous la bannière du centralisme démocratique et la ligne de masse.  Aaah ! mon frère !As-tu bien regardé les images projetées par  la télévision nationale à la fin de leur conclave ? Mais, le Plus grand des Grands est toujours absent. Il est remplacé souvent par l’argentier national.  Ce n’est pas curieux ça ? La dernière fois, ça a été la directrice de son cabinet civil. C’est  quand  même la réunion des Présidents de hautes institutions républicaines ? Pas même l’ancien premier ministre ! Pas de ministre d’état pour la représentation du Plus grand des Grands. Non ! Les instructions du Plus des  Grands arrangeraient  mieux,  si l’argentier était le porteur du message n’est pas ? Bien! Le dialogue sur les questions d’intendance paraît  essentiel. Oui, on a toujours besoin de plus moyens… pour mieux fonctionner dans l’aisance. Cela s’appelle démocratie participative, forme affinée de la démocratie  diteapaisée. Mon frère ! Tu sais, la dernière sortie du collectif des  Présidents des Institutions de la République, hormis  son traditionnelle incongruité  démocratique, a l’avantage d’ouvrir définitivement les yeux au peuple béninois, pour ainsi dire. Tu ne vois pas ? Mais bien sûr, l’image est expressive, le décor est renversant.  Le Président de la Cour Constitutionnelle, porte parole de circonstance pose devant les caméras aux côtés de ses pairs studieux, tous debout, comme les écoliers devant leur chef de classe, en l’absence du maître et expose à titre de  compte rendu  au peuple béninois. A  l’écouter, cette concertation a eu inscrire à son ordre du jour les deux points ci-après :

            1) La révision de la Constitution,

            2) La santé budgétaire du pays.

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Hééh ! Deux questions vitales pour la continuation de la plaisance. Aaah, çà n’est donc pas pour le peuple ?  Vas-y-voir.  Poursuivant sa communication, le porteur de la parole du groupe commence par faire une mise au point apparemment  anodine, mais pleine de significations .Elle  porte la marque de la profondeur de la collusion ambiante au niveau des institutions constitutionnelles, dont les missions républicaines  n’autorisent guère  une telle collusive collaboration. « … Je porte la parole… Je ne fais qu’exprimer  les résultats des débats et positions du groupe… » En résumé, c’est sans trop trahir la substance de la mise au point.  Puis il embraye : « … le gouvernement fait beaucoup de choses, mais il y a un déficit de communication … »  pour ne pas reprendre ici le verbatim. Et il poursuit : sur la révision… dans le projet, il y a beaucoup d’avancées… » etc..

TchaOoooHoooooo !! !Aie !  Ma tête ! Leçon bien sue! Très bon élève doit redoubler de nouveau sa classe au nom de la modernisation de la république. Ils ont bien étudié, et lui il a bien récité! C’est pourquoi, la professionnalisation  de la CENA par sa constitutionnalisation est  impérative. Six ans, deux fois pour un affidé, ou un  obligé, ça c’est bon à  prendre  Non ? Vive la refondation ! Aooo! C’est  triste et quel machiavélisme ? La ruse est en marche, la confiscation du pouvoir est en route. Ce que  tu ne sais pas mon frère, c’est que, le Président, porte parole  sait très bien que, la Cour Constitutionnelle qu’il préside aujourd’hui,  a déjà tranché la question. C’était le 23 décembre 1994, (soit  depuis bientôt 23ans) à la suite d’un recours d’un ancien membre du gouvernement du Président Soglo Nicéphore,  auquel,  il a appartenu et qu’il a défendu bec et ongle,  a répondu par la constitutionnalisation de facto de la CENA .En termes terre à terre elle a dit que «  tout ce qui concourt à la transparence des élections est conforme à la constitution » Donc, tu vois,  mon Frère que l’argument  là est trop fallacieux  et cache l’intention réelle de ses auteurs  sur la nécessité de constitutionnaliser cet outil administratif d’organisation des élections. Sauf à vouloir réécrire ici et maintenant  la Constitution de 1990, le Président-porte parole  ne peut pas ignorer que la décision de la Cour Constitutionnelle s’impose à tous , en ce que le caractère constitutionnel de la CENA est définitivement acquis.

     Et il vient à célébrer avec ses pairs, la constitutionnalisation du principe de l’imprescriptibilité des crimes économiques.  Kaiii! HéééLOU ! Mon Frère ! Pourtant,  en dehors du Porte Parole, ancien Président de la Haute Justice, il y avait à cette concertation  l’actuelle Présidente, est –ce que cette institution est vraiment budgétivore ? A-t-elle été créée sans aucun lien avec les dispositions de l’article 37 de la Constitution  de 1990? En quoi, elle s’établit en une haute juridiction pénale ?  Le Président de la Cour Suprême, lui aussi présent à cette réunion  s’est-il refusé à rappeler à ses pairs  que l’article 37 sus- cité a prescrit que les biens publics sont inviolables, et  qu’entre  autres tout acte de corruption  de dilapidation etc… est réprimé dans les conditions fixées par loi ? Un  tel rappel aurait permis  au Président de l’Assemblée Nationale de rafraichir la mémoire  de ses collègues, en leur rappelant seulement que  son institution a voté en un laps de temps deux lois rendant imprescriptibles  les crimes économiques, à savoir, le code de procédure pénale et la loi no2011-20 du 12 octobre 2011 portant lutte contre la corruption et autres infractions connexes en République du Bénin promulguée en mars 2013. Le  collectif est cependant composé de personnes  averties. Ceux-ci ne sauraient  se laisser facilement berner par  l’euphorie d’une supposée modernisation institutionnelle. Mon Frère, je te ferai part de ma réponse  tout à l’heure. Garde patience !

Evoluant  dans son exposé, le porte parole évoque le non respect des engagements  internationaux, qui résulte de l’inexistence de la Cour des Comptes . Je te dis mon Frère, que c’est vrai. Mais, est-ce la raison suffisante pour engager une relecture, révision de la Constitution ? Non ! Je suis désolé. Un amendement  au niveau  de l’article 131 aura permis de conformer notre pays. D’ailleurs,  la directive n’a jamais prescrit la constitutionnalisation d’une telle Cour.

Enfin, abordant le point 2 de l’ordre du jour, le porte parole dit avoir été informé  par le gouvernement  sur les performances économiques de l’exécutif, assorties des bonnes notes distribuées par les bailleurs. OOOOh ! Mon Frère, ils ont dit  bailleurs de fonds. Exit ! le tableau des partenaires sociaux, cheville ouvrière de la production  nationale. Quand même ! Ici aucune démarche  de démocratie participative, aucune approche comparative des données, aucun discernement des statistiques, c’est vrai entre le discours et le concret, l’option est vite faite. Autrement dit, le quantifiable reste après tout le palpable. Oui ! le  budget s’alimente plus  rapidement avec la contribution des bailleurs. Moralité ! La redistribution de la richesse nationale, nous ne pouvons pas en parler. L’obligation de réserve renaît. Pourtant, le peuple  a besoin de savoir. C’est une telle question, qui aurait pu  justifier  la rupture de la réserve institutionnelle provoquée avec l’initiative de cette consultation. Mais hélas ! L e sage est ferme, «  la bouche qui mange ne parle pas ». Juste rétribution des choses dirait l’autre.

Ah… mon Frère, avec le recul, il se révèle que ce soutien sans réserve du porte-parole des Présidents des Institutions constituées à ce projet pour les trois raisons avancées  s’inscrit  bien,  dans une des  combines du pouvoir et de ses suppôts. Celle –ci vise  à sciemment  bloquer la mise en application des nouvelles lois en vigueur sur l’imprescriptibilité des crimes. Le temps jouant, il sera fait application du bénéfice du principe de non rétroactivité des lois. Le manège suggère bien cette éventualité. En cela, la subtile remise en cause du principe de l’imprescriptibilité par sa revitalisation  dans la nouvelle constitution conduirait  inévitablement à une concurrence de normes, facteur de  blocage de l’application de l’existant. Le cas échéant, il va falloir attendre  le vote  de nouvelles  lois d’application et les signatures des autres actes réglementaires consécutifs aux fins de la mise en exécution des nouvelles  prescriptions constitutionnelles. Pendant ce temps, le dispositif législatif et /ou légal existant  devient du coup caduc, faisant courir ainsi les  prescriptions des crimes courants.

Par ailleurs, la fameuse constitutionnalisation de la Cena et de la Lépi procède d’une inflation de constitutionnalisation d’organes  de vassalisation et d’instrumentalisation des élections par une fraction du peuple.  

Enfin, mon Frère, tu constateras que les questions soulevées et qui préoccupent  ces institutions coalisées contre les intérêts du peuple travailleur sont relatives aux questions de gouvernance financières et matérielles. Or, il se fait que,  ce sont des matières dans lesquelles, le régime de la refondation excelle négativement. Par conséquent, il ya lieu de parer au plus pressé en vue de la consommation de l’impunité.  Les paroles  d’évangélisation dispensées par le porte parole sont prémonitoires du démantèlement de l’Etat de droit démocratique au Bénin. Ni plus ni moins ; tout le reste n’est que leurre.

Tu comprends alors, pourquoi, mon Frère, le forum est bien une concertation du crime.

Mobilisons-nous ! Soyons très vigilants ! La forfaiture se précise.                 

Ton frère Bio Awo Nama.

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