Yayi, le Kpayo et l’insécurité

Le vendredi 30 Août dernier, un braquage spectaculaire a ému toute la ville de Porto-Novo. A 12 h 30 mn, au carrefour Adjradocodji, deux malfrats, deux seulement, ont réussi à tenir en respect tout ce quartier, pendant des heures. Venus à moto, ils étaient venus pour braquer les cambistes et partir tranquillement avec leur butin.

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Mais, le scénario prévu au départ, n’a pas trop marché. Les cambistes alertés se sont mis à l’abri. Les malfrats irrités, ont tiré dans tous les sens et ont abattu deux personnes. Deux âmes innocentes, dont la femme accusée d’avoir alerté les cambistes de leur arrivée, et un homme. Pour qui connaît Porto-Novo, Adjradocodji, c’est le cœur de la ville. Ce n’est pas un quartier de banlieue, situé au centre-ville, à cinq minutes au plus de l’entrée de la ville, à deux minutes de Catchi. C’est une plaque tournante des affaires, où se côtoient tous les jours, cambistes, commerçants, opérateurs économiques, voyageurs… C’est aussi à quelques minutes de route des camps Bio Guéra, du Commissariat central et des Commissariats secondaires d’Attakè. Non loin de là, à un jet de pierre du lieu du drame, quelques militaires campent, en faction devant une recette-perception. Pourtant, ces malfrats sont venus «opérer», ont tué des innocents et sont rentrés tranquillement dans leur cache. Aucun militaire, aucun policier n’a osé se lancer à leurs trousses, ou n’a cherché à riposter pendant le temps de l’opération. Une folle rumeur distillée dans les rues de Porto-Novo, raconte que les militaires en faction devant la recette-perception, non loin de là, se sont éclipsés comme des citoyens ordinaires, affolés par les tirs nourris des malfrats en courroux. Des scénarios similaires se répètent un peu partout dans le pays. Quand on tire sur les paisibles populations, nos militaires baissent les armes, les rangent et détalent parfois. C’est pourtant les mêmes qui braquent les mêmes armes, qu’ils doivent utiliser pour défendre les populations, sur elles, lorsqu’il s’agit de leurs arracher les bidons de l’essence kpayo. Depuis que le Chef de l’Etat a donné l’ordre de lutter contre le commerce illicite de l’essence, les militaires terrorisent les populations, les menacent avec les armes, les molestent parfois, avant de partir avec le liquide prohibé. C’est ce qu’un homme politique appelle le «braquage d’Etat». Depuis des mois, les braquages sont quasi-quotidiens dans le pays. Parfois, dans les grandes villes comme Cotonou et Porto-Novo, on peut en avoir deux. Dans ces conditions, il ne serait pas trop hasardeux de dire que la lutte contre l’essence de la contrebande a aggravé la criminalité au Bénin. Les militaires et les policiers, qui doivent s’occuper de la sécurité et de la défense du territoire, sont commis à d’autres tâches qui leur paraissent plus faciles, et qu’ils accomplissent avec beaucoup de zèle. L’Armée court désormais derrière le kpayo, et laisse le champ plus libre aux braqueurs qui ne se gênent plus pour opérer un peu partout. Avant, la Police et l’Armée s’unissaient pour vite arrêter les braqueurs. Depuis, les présentations de braqueurs à la télévision sont de plus en plus rares. Et quand l’accentuation de la lutte contre le kpayo va engendrer plus de chômeurs et de désœuvrés, attendons-nous à ce que certains aillent grossir le rang des braqueurs. Pendant ce temps, les Forces de l’Ordre n’auront plus de trafiquants à poursuivre, mais beaucoup plus de malfrats. Et le pays s’en portera bien. C’est en tout cas ce que souhaite le Président Yayi.  

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