Bureaucratie et développement en Afrique : où en est le Bénin?

Sur les chaines de radio et de télévision nationales, sous-régionales  voire internationales, sont défrayées des chroniques relatives aux abus de pouvoir, aux détournements de deniers publics, aux escroqueries à grande échelle (affaires ICC-Service et consorts), etc. Pourtant l’opinion publique ne se soucie pas assez  de l’origine et du mécanisme d’expansion de ces actes ignominieux généralement commis par des bureaucrates.

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C’est pourquoi dans cette publication sont  abordés les concepts  de développement et de bureaucratieainsi que leur genèse, tout en mettant l’accent sur les relations qui existent entre eux. Le but visé est  d’éveiller les populations victimes afin qu’elles rejettent les pratiques  bureaucratiquespour leur épanouissement.

Qu’est-ce-que le développement?

Dans les Dicos Encarta (Encarta, 2009), le développement signifie l’évolution vers un stade plus avancé de quelque chose. Les 36Dictionnaires et Recueils de correspondances stipulent que le développement veut dire aussi l’action de développer, de déployer, de dérouler ; l’action de se développer  a en vue également,la croissance et l’étendue d’une situation donnée. Ces deux définitions sont conformes à celle du Petit Larousse 2010.Mais à cette étape, le terme développement demeure très englobant et ne permet pas de cerner le vif du sujet. Ainsi, ramené à la dimension d’une nation, d’une communauté, le développement s’observe à travers la vie socioéconomique des populations, elle-même déterminée par la qualité de l’action politique.

Selon l’ONU, dans son article I de la déclaration sur le droit au développement, de l’Assemblée Générale du 4 décembre 1986,« Le droit au développement est un droit inaliénable de l’Homme en vertu duquel toute personne humaine et tous les peuples ont le droit de participer et de contribuer à un développement économique, social, culturel et politique dans lequel tous les droits de l’Homme et toutes les libertés fondamentales puissent être pleinement réalisés et bénéficier de ce développement ». Plus tard, en1994, l’UNESCO précise que le développement est une « série de transformations plus ou moins linéaires progressant grâce aux évolutions technologiques, des modes de production primitifs vers d’autres formes plus sophistiquées, des diverses épreuves de la vie quotidienne vers une vie plus confortable ». Il s’ensuit, dès lors, que le développement est un processus continu. Le changement politique, qui constitue  le maillon principal déclencheur initial, est à son tour influencé par l’évolution des autres chaînons. C’est une question dynamique. Aussi, n’est-il pas  un abus de langage de dire qu’un pays est développé ? Car la prise en compte simultanée  de tous les aspects du développement  demeure un défi réel. Qui plus est, un défi levé fait apparaitre d’autres et ainsi de suite.

Suivant les domaines et la nature des éléments en jeu, on parle de développement humain, économique, industriel, institutionnel, socioculturel, etc. Aveuglée par le boom industriel et économique  et sous la pression des  bureaucrates des pays riches, la presse internationale  classe, aujourd’hui,  les pays du globe terrestre en pays développés (pays riches), pays émergents et  pays sous- développés. Pendant les 50 dernières années du 20ième siècle, les deux dernières catégories étaient fondues dans le groupe  des pays du Tiers-Monde à côté des puissances intermédiaires occidentales parrainées par les Etats -Unis d’Amérique face à l’URSS.

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Cependant l’évolution rapide des choses dès le début du 21ième siècle aamené les économistes et les politologues  à admettrele nouveau rapport des forces qui se confirme de jour en jour. Par exemple, sur le plan économique depuis environ deux ans déjà, la Chine a détrôné le Japon et devient  la 2ième puissance mondiale, le Brésil- la Grande-Bretagne, etc. La France, la Grande-Bretagne, et autres puissances d’Europe font fréquemment valoir les recettes coloniales pour continuer de garder leur positiond’antandans les instances internationales. Jusqu’à quand cette manœuvre est-elle possible. L’avenir nous  le dira.

Qu’est-ce-que la bureaucratie?

Au site de Wikipédia de la toile  Google, au sens premier du terme, la bureaucratie exprime l’état d’une administration dont l’activité est organisée selon les procédures et une hiérarchie strictes et dont le pouvoir est important.La bureaucratie est aussi, l’ensemble des fonctionnaires ou plus largement des employés affectés à des tâches administratives.Le fonctionnement de la bureaucratie est caractérisé par une hiérarchie claire, des postes detravail bien définis, une division des responsabilités, des procédures strictes, une gestion précise des dossiers.Cette méthode a été vulgarisée par Max Weber (1860-1920).Ce sens de la bureaucratie est relatif à l’organisation de l’administration et ne sera pas pris en compte  dans le présent article.

Le terme bureaucratie désigne de manière péjorative une influence ou un pouvoir excessif de l’administration dans les affaires publiques ou dans la politique. La bureaucratie est alors caractérisée par sa lenteur, sa lourdeur, son manque de flexibilité, son incapacité à traiter les cas particuliers. Les décisions bureaucratiques sont difficilement compréhensibles, peu conformes au bon sens ou à la démocratie.Pour le grand public, « bureaucratie » est souvent synonyme d’inefficacité, de paresse, de dépenses inutiles, d’effectifs pléthoriques, de privilèges. Le seul but de la bureaucratie pris dans le sens péjoratif est d’assurer sa pérennité et de s’accroître toujours plus, au détriment des « vrais travailleurs».

La bureaucratie désigne par ailleurs, une forme de régime politique dans lequel le pouvoir réel est détenu et transmis par l’administration. La progression au sein de l’organisation n’est pas liée à l’efficacité, mais à la docilité, à l’appartenance à un réseau ou à un parti politique, souvent unique. L’exemple de régime bureaucratique, le plus souvent cité par la presse occidentale, est celui de l’URSS dirigée de Kroutchev à Gorbatchev, pratiquement pendant la périodede 1960 à 1990.

Bref aperçu de la question bureaucratique dans les pays développés 

De la définition ci-dessus, il ressort qu’il est impossible d’envisager  la bureaucratie sans des relations qui mettent en contact au moins  deux individus ou deux  groupes d’hommes. L’un est demandeur de prestation de service et l’autre en est fournisseur. L’un se trouve à  l’échelon inférieur ou extérieur au service, donc faible et  l’autre à l’échelon immédiatement supérieur  ou suprême,  donc puissant. Ce dernier, rémunéré par les pouvoirs publics pour son travail, se refuse à satisfaire le client. Il réclame une  rançon qui n’est inscrite nulle part dans les textes et du coup pénalise le demandeur  sans s’attendre à une quelconque sanction. De ce  fait et dans l’appareil d’Etat, les bureaucrates utilisent leurs positions pour réduire la portée des dispositions politiques aussi progressistes qu’elles soient. Le développement se trouve ainsi compromis du fait du verrouillage de la société par les bureaucrates qui poussent leurs tentacules dans tous les confins de la cité. Qui délivrera une pareille société ? Les citoyens ligotés eux-mêmes!

La bureaucratie existe dans les pays dits développés ou encore pays riches (USA, Canada, Japon, Union Européenne,  Russie, etc.). S’il n’est pas consacré une grande attention à ce fléau dans ces pays hautement  industrialisés, c’est parce que la bureaucratie a été et continue d’être combattue pied à pied par des composantes de la société et les textes en vigueur ; quand bien même, elle constitue une dimension inaliénable  des classes dominantes. En effet, dans les pays du Nord et assimilés, les mécanismes bureaucratiques sont très fins et subtiles. Ils se révèlent au grand jour  pour des  affaires de gros sous telles : l’affaire Betancourt dans laquelle l’ancien président de France Nicolas  SARKOZY est soupçonné d’abus de faiblesse ; le transfert de fonds à l’étranger par le ministre fraudeur  CAHUZAC de l’actuel Gouvernement de François HOLLANDE aux fins d’échapper aux dispositions fiscales édictées par eux-mêmes ; le contrat de construction de sous-marin au Pakistan par la France ; les gigantesques escroqueries opérées par les banques aux USA (affaire MADOFF), en Espagne, en Grèce, àChipre ; l’affaire YOUKOS en Russie, etc. En effet, aux USA, M. Bernard MADOFF a mis au point un système d’escroquerie au moyen de la chaîne de Ponzi. Il a pu soutirer 65 milliards de dollars à ceux qui ont mordu à l’appât au nez et à la barbe de toute l’administration de la grande Amérique(!). En 2008, il est symboliquement condamné à 150 ans de prison. Des affaires d’escroquerie de ce genre sont très répandues dans ces pays et poussent leurs tentacules malheureusement dans nos pays pauvres (ICC-Service et Consorts au Bénin).  

De même, profitant de la crise  qui perdure en Europe et compte tenu des réformes, les magnats et fraudeurs préfèrent sécuriser  leurs richesses dans les paradis fiscaux.  La traque au niveau de ces paradis fiscaux se fait généralement contre les délinquants de ces pays riches. Les avoirs des bureaucrates des pays sous-développés notamment ceux d’Afrique,sont gardés au secret. Deux poids deux mesures pour l’assainissement des finances qui laissent pour compte les pays dépendants. Cet aspect de la gestion des finances  dans la vision de la mondialisation peut-il favoriser le développement des pays dits en développement tel le Bénin, le Togo, le Botswana, la Guinée Papouasie,  etc.?

Quelques caractéristiques des bureaucrates africains

En Afrique, les bureaucrates sont tous pareils du Sénégal au Mozambique et de la Tunisieen Afrique du Sud. Gossiers et obscurantistes, ils blâment des efforts de la communauté scientifique pour approfondir les connaissances  de la nature. De ce fait, ils applaudissent les expériences échouées, clamées par eux, comme une punition divine. Face aux faiblesses de la science par rapport aux réalités locales, ils crient fort que l’Afrique a ses réalités (?!) qui ne sont pas connaissables. Une telle attitude signifie qu’il faut laisser ces prétendues réalités péricliter.  Dans le même temps, les exploits technologiques de pointe leur font déblatérer dessornettes du genre : le Blanc est trop fort et il a déjà tout trouvé ; l’Afrique ne fait rien et les africains dorment, et ainsi de suite.

Comme on le voit les bureaucrates  forment une gangue visqueuse  insaisissable. Cette nature versatile fait qu’il est difficile de les prendre aux mots et faits.En effet,le monde pour eux, est inconnaissable et chercher à reculer les frontières de l’ignorance se révèle de la pure provocation envers l’Etre suprême (?!).Par contre,  ils sont  les   1iers  à s’approprier les technologies d’usage de pointe, afin d’étendre leur rivalité et se rendre maîtres  sur le terrain du ventre et du bas-ventre. Dans ce sens, on les voit, vautrés dans des véhicules 4×4 superbes et les bureaux hyper climatisés, ivres de boissons raffinées importées de l’étranger, s’adaptant voluptueusementet passivement, de la sorte à l’économie de traite. Les produits locaux sont couverts de leur dédain.

Politiquement, les bureaucrates ne voient pas et sont contre tout esprit d’émancipation autonome des pays sous-développés. Ils affirment que, le système néocolonial en cours est la meilleure des trouvailles pour « développer » nos pays arriérés.  Selon eux, penser autrement passe pour de l’utopie. Est-ce un fatalisme délirant ou une incurie sans limite ? En libéraux et effrayés par la colère des souffrants, ils filent se réfugier  sous le parapluie du clergé(églises, temples, mosquéeset couvents) en entrainant les esprits faibles qui les écoutent. Là-bas, ils se distinguent par la sortie des grosses coupes (billets neufs  de cinq,  dix mille,…), afin de d’impressionner les fidèles et en même temps recevoir uniquement, pensent-ils, toute la  bénédiction et la protection de Dieu. Peu satisfaits des homélies et/ou des  incantations, la peur les pousse à intégrer des sociétés secrètes nationales et transcontinentales, et ce,en vue de sauvegarder la  fortune amassée. Syncrétisme ou bouffonnerie ! Allah seul le sait. Et  tout ceci  se passe dans une certaine ambiance de complaisance et de passivité des populations. Economiquement, le secteur public est et demeure leur seul refuge où ils s’installent sans crier gare comme dans la palmeraie de leur père. Accrochés aux strapontins, ils développent toutes pratiques contre développement par les intrigues et les gris-gris dans le but de sucer les ressources publiques en vue de constituer un butin de guerre.  Ces derniers temps, les rumeurs persistantes font savoir qu’un jeune élu bureaucrate, fils de son père bureaucrate,vient de fêter son 7ième milliard à Cotonou. Une telle information n’a provoqué aucune émotion chez  la kyrielle des IGF, IGE, OLC, des nombreuses structures de la justice et  autres sociétés civiles. Dans les pays riches, une ou quelques-unes de ces structures auraient ouvert une enquête contre X, ne serait-ce que pour dissiper la rumeur et rassurer le contribuable.  En Afrique en général  et au Bénin en particulier, c’est un totem de parler de cette manière dont les riches dépouillent les richesses publiques et narguent la peuple. Aussi, le peuple sénégalais perçoit-il déjà la supercherie que cache le montage grossier concernant la comparution de WADE Fils qui a amassé plus de 650 milliards de FCFA. D’aucun sénégalais se demande si ce triste théâtre n’est-il pas  destiné à disculper et à blanchir de tout soupçon la dynastie WADE. En conséquence, la compétence déserte le forum et la tendance baissière de la production s’aggrave. Poursuivons!

Historique des théories bureaucratiques en Afrique et au Bénin

Rappelons que le continent africain dans son ensemble se trouvait à une étape retardataire à la veille de la colonisation par les puissances européennes, colonisation décidée et planifiée  à  la conférence de Berlin en 1885. Même s’il existait quelques écarts entre les formations socio-économiques,  dans l’ensemble,  l’Afrique était peuplée de formations esclavagistes patriarcales surtout au Sud du Sahara. Elles étaient  ruinées, car ayant subi la traite des esclaves  pendant près de trois siècles. Donc, grosso modo, l’Etat était déjà né par endroits  et les responsables (princes, rois ou empereurs) bref les dignitaires au pouvoir traitaient avec les étrangers notamment les Etats capitalistes européens en mutation pour le stade impérialiste.Ces Etats africains sont comptables d’une manière ou d’une autre de ce commerce odieux de vente des bras valides vers les Amériques. Au demeurant, suivant la morale esclavagiste, ces dirigeants africains ne se reprochaient rien puisque le monarque a droit de vie et de mort sur ses sujets. Dès lors, vendre son prochain était une  affaire très banale.Ainsi, on peut comprendre les propos d’un bureaucrate qui menaçait son adversaire politique, lors des campagnes présidentielles de 1996, de l’acheter  et en faire ce qu’il voulait, si la loi autorisait aujourd’hui l’esclavage. Ces propos sont tenus après plus de 200 ans de son abolition. Ce remords macabre pour les calamités de l’humanité abolies à coups de sacrifices inouïs est totalement inacceptable.

Les nombreuses anecdotes, ainsi que  des dictons prouvent sans hésitation que la bureaucratie existait déjà et sévissait avant la colonisation. Quelques exemples confirment cette idée.Dans le roman Doguicimi de Paul HAZOUME (Paris, Larose, 1938), l’agent de liaison qui était en contact avec le prince Toffa en captivité, promit à sa fiancée Doguicimi de faire libérer son futur mari si elle acceptait ses avances galantes. Indignée,Doguicimi repoussa violemment cette stratégie de ruse  et beaucoup d’autres intrigues du genre afin de préserver sa dignité et rester fidèle. Elle a payé cher pour sa résistance aux assauts répétés des bureaucrates tapis dans la cour royale d’Abomeypendant l’ère Ghézo. Pire,le dicton selon lequel celui qui arrive le 1ier chez le Chef au sujet d’un contentieux, a toujours raison, relève de la bureaucratie. Car,ceci signifie tout simplement que celui qui s’empresse de se présenter le 1ier dans une affaire délictueuse prend le temps d’arranger les choses à son profit, corrompt le conseil du Chef et s’en sort au détriment de l’autre partie pourtant non accusable. Cette pratique marche bien aux bureaucrates qui s’enorgueillissent des affaires  qu’ils réussissent à étouffer même les cas d’assassinat de flagrant délit. Les populations résignées concluent pour ces cas de figure  que les bureaucrates  ont « les bras longs » ou « les pieds à terre». L’impunité, ainsi, à eux accordée, est conforme à leur axiome «je tue, je paie»

Par ailleurs, en milieu fon ou mahi, il est admis généralement que celui qui a un proche sur le pommier ne saurait jamais manger de pommes immatures. Une assertion du genre est le concentré d’ethnocentrisme, de régionalisme, de favoritisme, de népotisme, etc. qui ne fait pas  la promotion dela gouvernance, à tout point de vue. Autrement dit, si Koffi (gestionnaire de la chose publique)se trouve sur le pommier, au lieu de cueillir et distribuer les fruits mûrs de manière équitable, agit par discrimination vis-à-vis des nécessiteux qui se trouvent au sol. De cet acte, il ressort l’accumulation des pommes mûres à un pôle (parents et proches) et les autres immatures (acides)  aux victimes. Tant pis pour ces  dernières, si par mégarde, malnutries, elles avaient besoin plus de fruits mûrs pour mieux vivre.

Rapporté au plan institutionnel, cet adage signifie, que celui qui accède à une parcelle du pouvoir public ne peut faire jouir les avantages qu’à ses parents, ses proches,  son village, son ethnie, sa région, etc., et faire porter les conséquences de la mauvaise gestion  des biens à ceux qui en  sont pourtant privés. C’est horrible! D’ailleurs, cette idée n’est que la formulation en d’autres termes du concept de « la proximité de la marmite ». Ce concept postule que la communauté, la région ou l’ethnie qui n’ont aucun fils dans l’appareil d’Etat  (Exécutif, Législatif,  Judiciaire, etc.) n’ont pas de chance de bénéficier du regardmérité des pouvoirs publics pour leur développement.

Des citoyens honnêtes soutiennent cette thèse, parce qu’ils ont vécuà coups sûrs des situations difficiles à comprendre, à la limite révoltantes.Quelques exemples amers ont tendance à justifier cette pensée : a- Pendant la  période coloniale (1949), le projet de construction du pont sur le fleuve Ouémé à la hauteur du village d’Ahlan (Commune de Zagnanado, Agonlin) fut abandonné ; les matériaux marqués du nom de ce village  furent transférés pour la construction d’un autre  pont sur le fleuve  Mono dans l’actuelle Commune de Grand-Popo. Ce transfert serait dûaux rivalités entre deux Chefs de Canton d’alors : M. François TOKA à Houégbo et M. Hubert Koty  à Sagon.L’administration coloniale a dû abandonner ce projet parce que chacun des deux rivaux voulait à tout prix que ce pont soit construit à la hauteur de son territoire par lui administré.b- Ensuite  et  tout proche de nous, il a fallu la croix et la bannière pour créer tardivement le CEG de Zagnanado ; les difficultés rencontrées  pour sa création étaient fondées sur des  mesquineries entretenues et véhiculées par des mauvaises langues de tous poils  dont certaines de la région d’Agonlin. Pourquoi un tel acharnement cynique contre la réalisation d’une infrastructure destinée à soulager les peines des scolaires d’Agonlin en général et ceux de la Commune de Zagnanado en particulier ?C-Par ailleurs, au Bénin, l’ulcère de Burili est diagnostiqué pour la première fois dans la Commune de Zagnanado. A l’appui de l’OMS pour prendre en charge les malades, les trois hôpitaux,prévus  à cet effet sont distribués à Lalo, Pobè et Allada soit  dans un rayon de plus de 100 km de la zone endémique. Qu’est-ce qui s’est passé pour que Zagnanado soit définitivement rayé de la liste des sites favoris? Seuls, les bureaucrates en possèdent le secret.La présence d’une structure confessionnelle informelle  de soins médicaux communément appelée Centre de Santé des Sœurs Catholiques ne saurait expliquer l’abandon facile de la Commune de Zagnanado pour un projet de pareille envergure.d- Enfin, le village Lègbado de l’Arrondissement de Dovi est bénéficiaire du projet Village Millénaire au même titre que 11 autres choisis chacun dans un nouveau département. Le jeudi 18 août 2010, ce projet a été présenté aux populations par l’Equipe de Coordination du ministère MPDEPP-GA et ce, au siège de l’Arrondissement. Etaient présents le Chef d’Arrondissement et son Conseil, le  Coordinateur départemental dudit projet et du représentant des Associations de Développement, etc. Environ deux ans plus tard et par hasard, les populations ont été informées, par voie de presse,du lancement  du projet Village Millénaire à Kandérou dans la Commune de Banikoara. Déjà l’équipe mise sur place là-bas est fonctionnelle tout au moins à travers les accessoires visibles. Que deviennent les autres villages retenus ? Rien n’est clair à ce sujet et l’embarras s’est emparé de la cité. 

Tout fils de la région d’Agonlin,en apprenant ces quelques faits, est obligé de prendre de la hauteur, faute de quoi,  il verserait tout droit dans un micro régionalisme  à rebours et se constituerait d’emblée en pilier solide pour la politique de  «proximité de la marmite ». Quoique fondé sur des prémisses vraies, il aboutira dans cette lancée  à des conclusions fausses. Parce qu’il n’aura pas compris que les manœuvres bureaucratiques émanent autant de son frère que d’autrui. Mieux, comprendre et agir autrement  ne sont pas faire preuve de faiblesse vis-à-vis des bureaucrates indécrottables qu’il faut combattre à visage découvert et sans ménagement.Toutefois, c’est un travail de longue haleine.

Quelques manifestations saillantes de la bureaucratie au Bénin

Au Bénin, les méfaits incalculables des bureaucrates se rencontrent dans tous les secteurs de la vie: l’administration, les rituelles électorales, la gestion des marchés publics, la SBEE, les services de soins  médicaux, les actions académiques, la gestion de notre patrimoine culturel,etc. Il y a réellement un embarras de choix. Parce que, quel que soit le bout par lequel on l’aborde, le mal est infini.

Dans son  opuscule, « L’Afrique est mon combat », Bruno AMOUSSOU (L’Archipel, 2009) a  largement décrit  des pratiques  bureaucratiques pendant et après la colonisation. A titre d’illustration,la répression s’abattait tous azimuts sur les populations   pour des motifs les uns aussi ridicules que  les autres. Par exemple, un paysan se faisait arrêter banalement parce que le patin de son vélo est usé, ou bien le porte-bagage trop large, etc. les représentants locaux du pouvoir colonial (Chefs canton) épargnaient leurs enfants et proches de la conscription pour les travaux forcés.La brutalité, liée, entre autres, à la perception dela taxe civique a atteint son paroxysme pendant le bref séjour (1968-1969) (période post coloniale) du Président Emile D. ZINSOU d’où le sobriquet de Zinsoutakwê(taxe de capitation de Zinsou). Pour tout citoyen épris de paix et de justice, l’indignation et la colère faisaient monter le sang au cerveau devant  des scènes dignes du moyen âge : en ce moment et pour le cas de la Sous-Préfecture de Zagnanado vécu, à défaut de capturer leur mari ou leurs proches, enfuis pour échapper au payement de la taxe civique, des  femmes, sans épargner celles enceintes ou allaitantes,  étaient arrêtées au même titre que des hommes flemmards et peu vigilants ; ils étaient  attachés par les bras avec de robustes cordes de fabrication industrielle et ainsi conduits au lieu de détentionjusqu’auversement de ladite taxe. Rien de plus sot  que  la joie des bureaucrates qui admirent  et se réjouissent de  cette page noire de l’histoire de notre pays.

Cet exemple montre très bien  que les bureaucrates constituent la base sociale des pouvoirs despotiques et qu’ils n’ont aucun souci pour le bonheur du peuple malgré les discours dithyrambiques dont ils remplissent les colonnes des journaux. Puisqu’un pouvoir autocratique favorise le développement des mécanismes en vue de sucer les masses sans crainte. Aussi, font-ils véhiculer  des concepts hors norme. Selon eux « un collaborateur doit se taire quand le Chef parle ». Donc, quand bien même, une fripouille raconte des laïus et des contre-vérités,le collaborateur doit toujours répondre par « merci seigneur » (?!) de peur de subir les représailles qui peuvent varier d’un simple regard méchant  jusqu’à la comparution devant un conseil de discipline. Du servilisme  à gogo, théorisé comme norme  de gouvernance par les caciques de l’administration. Cette administration ainsi  verrouillée, devient inefficace à la grande satisfaction des bureaucrates qui profitent du cafouillage entretenu pour ramasser à la pelle les biens publicstout en provoquant du coup des pénuries récurrentes d’équipements, de matériels et de consommables dans les services publics. Ce n’est pas étonnant qu’en même temps où les moyens de déplacement  font défaut, nos ministères sont bondés de véhicules garés pour simple  panne réparable avec très peu  d’argent. Ceci est fait exprès par les bureaucrates qui projettent en tirer profit : « rachat » à vil prix, dépiéçage de jour comme de nuit  pour l’entretien de leurs  véhicules personnels, etc. Ne parlons pas des ramettes de papier et des bics et crayons  qui se retrouvent sans détour  dans leurs boutiques. Mille tours se trouvent dans leurs poches et  toujours pour détruire le bien public au détriment du peuple.

Chaque année, les travailleurs communément appelés APE doivent «courir» pour s’assurer une certaine quiétude au niveau de leur poste. Les bureaucrates font des périodes d’affectation un fonds de commerce très alléchant. Par exemple dans le secteur des services de contrôle et de répression, l’agent doit renvoyer très fort l’ascenseur pour conserver ou conquérir les postes dits juteux (Malanville, Kraké, Hillacondji, etc.). De sorte que, sur nos campus universitaires, des étudiants, pour la majorité,  interrogés, vous  répondent sans gêne, qu’ils  préfèrentdevenir douaniers, députés, ministres, etc. Ces étudiants disent dédaigner les carrières où l’on ne compte que sur le salaire. Est-ce parce que dans ces secteurs en vue, les agents sont-ils  traités de manière spécifique ou parce que la bureaucratie y est immensément développée ? Il faut du doigté pour démêler l’écheveau.Pendant les années 1980-90, une pareille ambiance a régné également  au niveau du secteur agricole à cause des projets. En effet, ne se faisait pas affecter au CARDER Borgou dénommé « CARDER bon goût » qui le veut mais qui le peut. Le projet fini, la marmite asséchée, les bureaucrates ont décampé vers d’autres pôles mielleux.

Le présent texte est loin d’être exhaustif sur les manœuvres très variées  des bureaucrates.Il est de bon ton que des bonnes volontés aident à recenser et approfondir les pratiques bureaucratiques très diversifiées qu’un seul texte ne saurait cerner. C’est dire que  la sensibilisation doit se poursuivre en vue de créer un courant fort pour le développement contre ce fléau quigangrène notre société. 

En conclusion, les manœuvres bureaucratiques sont une réalité tangible et conduisent au déchirement de la société,au chaoset dans le pire des cas, à la guerre civile comme au Libéria,au Rwanda, en Côte d’Ivoire,etc. Nous devons rejeter toute idée fataliste en vue de la compromission ou de l’accommodation passive fondée sur le fait que la bureaucratie est  un mal planétaire,… qu’elle est aussi vielle que sa sœur, la prostitution que l’on dit aussi vieille que le monde. Comment Dieu qui est aux cieux, peux-tu admettre que ton peuple se trouve dans les griffes des gangsters cravatés, la plume à la main, pour imaginer et transcrire à chaque instant les moyens de nuire à l’humanité ?Mais déjà, il est permis decroire fermement que l’éthique conquerra le monde.

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