France : adieu Adélaïde petit ange euthanasié

L’émotion suscitée, en France, par la mort de la petite Adélaïde a fini par faire le tour du monde. Comment est-ce possible ! Comment une mère peut – elle regarder sa petite fille de 15 mois se laisser avaler sous ses yeux par la mer ? Les internautes y sont allés de leur colère sur la toile.

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Autour de moi, l’indignation était à son comble. Les femmes me demandèrent d’apporter mon grain de sel dans ce débat sur l’infanticide, « car aucune femme ne peut commettre pareil crime, si ses conditions d’existence ne l’y poussent pas », ont-elles argumenté.

Selon la pédiatre Anne TWISZ, directrice de recherche à l’Inserm et spécialiste de la maltraitance des enfants, après la mise en examen d’une mère pour assassinat à Berck- sur- mer ( Pas de Calais), les chiffres des statistiques officielles de mortalité sont de 17 homicides d’enfants, alors qu’elle aurait trouvé 255 après son travail de recherches sur 5 ans ( de 1996 à 2000) dans tous les départements de trois régions françaises, concernant tous les décès qui avaient fait l’objet d’une saisine du procureur de la République (source Internet).

Qu’en est-il chez nous au Bénin ? Y a-t-il des statistiques  sur le nombre de  bébés jetés sur les tas d’ordures, dans les WC et autres caniveaux à ciel ouvert de nos quartiers de villes et de villages ? On se rend compte que nulle part  au monde, l’infanticide n’est brandi comme un étendard. Comme si les adultes que nous sommes avions honte de cette image hideuse de notre société. Une société où on assassine tranquillement des petits enfants, parce qu’ils ne sont pas les bienvenus sur cette terre. Ou tout simplement comme l’a dit la mère d’Adélaïde, «  parce qu’elle gênait sa vie de couple », « parce qu’elle entrevoyait pour sa fille un avenir sombre »… On alignerait les parce que, mais jamais cela ne pourrait justifier la logique de cette mère de 36 ans, « une étudiante prolongée » de 36 ans, qui a chargé la mer d’engloutir son enfant, de la faire disparaître à jamais.

La responsabilité du père

Condamner la mère et absoudre le père Michel, qui n’a pas reconnu l’enfant qu’il déclare pourtant être le sien serait de l’injustice pure.Ce serait tuer la petite Adélaïde une deuxième fois. Quelle quantité d’amour a-t-il prodiguée à cette petite durant son bref passage sur cette terre ? En 15 mois, il l’aurait promenée deux fois au parc. Un artiste enfermé dans sa bulle ; un homme enfermé dans son monde et qui, dès qu’il en sort, réclame la présence, l’omniprésence et l’attention de sa compagne. Qui ne supportait sûrement pas les cris de la petite et n’arrêtait pas de râler après la mère, qui avait pris toute seule la responsabilité de s’encombrer d’un marmot ! Sinon, pourquoi n’a- t-il pas reconnu ce bébé à sa naissance ? Une étudiante en philosophie, qui a 36 ans, très intelligente, « remarquablement intelligente, très bien élevée, langage extrêmement châtié », souligne son avocate. Une fille noire qui s’est mise en couple avec un homme de 63 ans dont elle dépend entièrement sur le plan financier. Mais  qui n’a rien trouvé de mieux que de s’embarrasser d’un marmot, alors que notre artiste n’était très heureux qu’en en tutoyant la muse au ciel pour trouver son inspiration, et, encore plus, quand il retrouvait sa négresse lorsqu’il redescendait sur terre. Après douze années de vie commune,  il ne pouvait la gratifier d’un enfant pour apaiser sa soif d’être mère. Il ne pouvait non plus donner de son temps et de l’amour à ce petit être sans défense. Pas le temps pour ça, le grand artiste. Comme l’a dit quelqu’un : « Ces artistes-là sont trop bizarres ». Quand on est bizarre, quand on n’a rien d’humain, quand on n’a pas de cœur, alors, on s’abstient de vivre avec des êtres normaux. On ne s’accouple pas pour produire un enfant et pousser la génitrice à l’offrir à une marée en rut. C’est un crime ! Non assistance à personne  en danger !

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La petite serait à Dakar

Son argument est tout trouvé. Sa compagne avait déclaré vouloir confier la petite à sa mère pour quelques jours à Dakar! « J’aurais dû vérifier », dira-t –il aux enquêteurs, effondré. Et puis quoi encore ! Paris- Dakar s’effectue en bus, ou en métro ? A-t-il acheté des billets d’avion pour ces deux personnes qui dépendent entièrement de lui ? Et puis ne sait-il pas qu’à cause de lui, la pauvre femme a coupé tout lien avec les siens ? Comment pourrait-elle débarquer ainsi en Afrique les bras ballants, déposer sa fille à sa mère comme un ballot sans rien laisser pour ses soins ? Pour quelques jours ? On ne vient pas en Afrique voir les siens pour quelques jours… Après combien d’années de silence?

Selon l’avocate, la mère « serait dans une logique parallèle à la nôtre ». Elle continue en ces termes : « Je crois qu’elle a euthanasié cette enfant et qu’en l’euthanasiant, elle s’est euthanasié aussi. Elle entrevoyait pour cette enfant un avenir sombre ». Personnellement, je ne comprends rien à tout ce jargon juridico-scientifique. Pourquoi cette mère serait dans une logique parallèle à la nôtre ? De quoi s’agit-il ? La logique veut que toute société, qu’elle soit noire ou blanche ne permette pas que des parents aient le droit de vie et de mort sur leur progéniture. Cet enfant n’avait même pas la place d’un animal dans ce foyer. On sait comment les Blancs s’occupent de leurs chiens, chats, varans, tortues et j’en passe. Consciente de son crime, elle accepte d’être condamnée à la perpétuité. Nous les femmes africaines refusons qu’elle paie seule la note. Il faut fouiller, bêcher, creuser pour situer les responsabilités. Aux dernières nouvelles, la mère serait dans un déni de grossesse ; elle aurait accouché à la maison et n’a pas déclaré la petite à l’administration. Donc Adélaïde n’existait pas au regard de la loi. Eh oui ! Jusqu’en France ça se passe ainsi aussi ? Incroyable !

L’Autonomisation des femmes

Pourquoi ne pas donner des cours pour gagner sa vie et mieux s’occuper de sa fille, au lieu de dépendre entièrement d’un homme aussi égoïste ? On me répondra qu’en France, si vous n’avez pas vos papiers en règle, vous ne pouvez pas travailler. Le débat est là ; et il faut que chaque famille africaine dont l’enfant prend le chemin de l’exil s’interroge sur la nécessité de ce séjour sur les bords de la Seine. On met dans le crâne des enfants que le bonheur est seulement là-bas, qu’en Afrique c’est la géhenne. Et nos enfants grandissent, se tuent à la tâche pour mériter des résultats scolaires qui leur ouvrira le chemin de l’Occident ; parfois, au détriment de  leur santé. Combien sont-ils qui rencontrent l’Eldorado là-bas ? On les compte sur le bout des doigts. La plupart survivent en faisant des petits boulots, et en dépensant tout ce qu’ils gagnent pour leurs charges quotidiennes et les impôts. Incapables d’économiser pour retourner au pays visiter leurs vieux parents, ceux-ci s’étiolent en comptant les jours, les mois et les années, jusqu’à ce que la mort les emporte un jour.

Et voilà comment la mère d’Adélaïde s’est retrouvée enfermée dans ce cercle, victime de conditions de vie difficile, de solitude et d’isolement qui l’ont déposée entre les mains d’un sexagénaire depuis douze ans.

Mais chacun a la liberté de conscience, donc la responsabilité des actes qu’il pose. Et l’Etat avec ses pouvoirs régaliens est le réceptacle des valeurs qui régissent nos sociétés, dont le respect de la vie humaine est la plus importante et non négociable sous tous les cieux. On ne veut pas la mort du pécheur. En tant que femme qui donne la vie, je compatis à la douleur de cette mère qui, tout le reste de son existence, n’aura pas assez de larmes pour avoir laissé la mer engloutir sa petite fille, sous ses yeux. La mauvaise conscience est l’enfer de vivre. Désormais, cette mauvaise conscience ne la quitterait plus jamais. Et puis, au-delà du châtiment humain, qu’en est-il de la justice divine qui est celle qui attend chacun de nous hors de ce monde?

Ce crime est celui de notre société moderne où l’être humain est tout seul face à ses problèmes, matin, midi et soir. Personne à qui parler, aucune épaule où déposer ses douleurs. Aucune bouche pour murmurer à vos oreilles des mots simples, des mots denses et chargés d’amour qui réconfortent et vous aident à supporter le poids de vos problèmes. Peut-être que si  cette mère avait reçu ce signe d’amour auprès d’une voisine, sa fille Adélaïde serait encore de ce monde.

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