Spectacles des masques Kaléta : les hirondelles qui annoncent l’approche des fêtes de fin d’année

Par des chants et danses, les spectacles de masques Kaléta ont commencé à Cotonou et environs, pour annoncer l’approche des fêtes de fin d’année. Comme les hirondelles qui annoncent le printemps, au Bénin on reconnait l’approche des fêtes de fin d’année dès leurs premières apparitions crépusculaires dans le mois de novembre.

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Eux, ce sont les Kaléta, le «masque des enfants». Ils sillonnent ruelles, marchés, lieux publics, et maisons, offrant un spectacle bien rythmé de chants populaires et de danses du Kaléta, accoutré avec parfois beaucoup de créativité. Arrêt sur images, avec des groupes d’enfants rencontrés dans les rues du quartier Vêdoko, à Cotonou, ce lundi soir autour de 21 heures. Objet, en ce moment précis, de toute l’attention des clients venus prendre un pot autour d’une table dans un restaurant, non loin du carrefour «La vie», un kaleta au masque de tête d’animal, assimilable à un chimpanzé épouvantable, dans un accoutrement constitué de lambeaux de sacs de maïs, d’habits qui ne laissent rien transparaître sur la nature du corps qui s’y cache, et de parures qui ravivent les couleurs. Sous les cadences rythmées des tam-tams, des clapotements des paumes de mains et des chants de ses accompagnateurs, le Kaléta enchaine des pas de danses et augmente le plaisir du groupe de clients vidant des bouteilles de bière. Le folklore fini, les adultes expriment leur gratitude pour le spectacle, avec quelques pièces de monnaies, pendant que le groupe d’accompagnateurs du masque fredonne un chant de remerciement et de bénédiction aux généreux donateurs, avant de se retirer. Ainsi s’animent les soirs qui précèdent les fêtes de Noël et du Nouvel An. Il s’agit d’une tradition qui se perpétue, mais qui régresse aussi.

Une tradition menacée de disparition

La tradition du Kaléta n’a plus le même engouement de nos jours. On en voit de moins en moins dans les rues de Cotonou et Calavi. Et à ceux qui circulent, les adultes d’aujourd’hui, anciens membres de groupes de Kaléta, ont des reproches. Benoît, un ancien tambourineur de Kaléta, dit sa désolation : «C’est regrettable ! Nos enfants ont désacralisé le masque Kaléta. Le spectacle n’est plus de mise, et les accoutrements laissent indifférent». Selon Benoît, avant la période de novembre, les groupes de Kaléta s’organisaient par des cotisations individuelles, qui permettent d’acheter tous les accessoires nécessaires pour offrir de beaux spectacles. Car continue-t-il, «avant c’était la concurrence. Il fallait que celui qui porte le masque soit le meilleur danseur, parce que, parfois, des adultes de notre époque réunissaient deux à trois différents groupes et nous mettaient par surprise en compétition. Donc pour ne pas avoir publiquement honte, on se préparait pour l’emporter». Mais aujourd’hui, constate l’ancien tambourineur de Kaléta, «ce n’est plus ça. Les enfants ne savent pas danser aux rythmes de musiques traditionnelles.»
Autre, explication qui justifie la disparition programmée du spectacle de Kaléta, le désamour des enfants pour la tradition. Junior, la dizaine environ, dit niet : «moi, jamais ça ! Je ne sais pas jouer ni danser.» En plus, ajoute le gamin, «papa n’acceptera pas que j’entre dans un groupe de Kaléta». Benoît renchérit : «Beaucoup de parents ne laissent plus leurs enfants faire le Kaléta, à cause des problèmes de disparition d’enfants, fréquentes pendant cette période». A cela s’ajoute aussi le manque de générosité des adultes qui chassent les groupes de Kaléta. Désemparé, un groupe de trois jeunes conte sa mésaventure : «On n’a que 150 F Cfa depuis une heure environ qu’on est sorti. Tout à l’heure un monsieur nous a chassés en disant ‘’rentrez chez vous ! Vous ne mangez pas à la maison ? Je n’ai pas d’argent». Et comme pour leur redonner le sourire, notre groupe de reporters, leur tend à cœur joie une pièce de 100 F Cfa, après une petite démonstration qu’il n’aura peut-être plus la chance de voir, avec la mort programmée des spectacles de Kaléta, qui donnent souvent la nostalgie des bons vieux temps.

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