Gouvernance au Bénin : à quand la fin de la politique de « deux poids deux mesures »

Lentement mais surement, le Benin sous la présidence de Boni Yayi avance vers l’institutionnalisation de la politique de deux poids deux mesures, voire vers deux pays. Ce n’est pas exagéré de le dire.

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En tant que citoyens très préoccupé par l’avenir de notre pays, nous avons le devoir patriotique de mettre le doigt sur les nombreuses plaies béantes ouvertes par Boni Yayi et son régime et qui plombent tous les efforts de construire un pays solidaire a travers la promotion des valeurs d’égalité devant les lois de la République, voire des valeurs d’unité nationale,

Le cas du dernier “limogeage” en conseil des ministres le Jeudi 02 Janvier 2014 de Monsieur Denis Ali Yerima, ancien Directeur General de la Caisse  Nationale de sécurité sociale  (Cnss) est une illustration parfaite de la mise en oeuvre de la politique de deux poids deux mesures qui caractérise la gouvernance de Boni Yayi depuis le 6 Avril 2006.

Sous la pression de l’ancien Conseil d’Administration et des syndicats

Inutile de refaire l’histoire récente de la Cnss  caractérisée par des dénonciations tous azimuts de mauvaise gestion par les représentants du Patronat et des syndicats au sein du Conseil d’Administration de cette institution. Il est également inutile de revenir sur les nombreuses récriminations du syndicat maison sur la  gestion de cette structure névralgique pour la sécurité des travailleurs du secteur privé et semi-privé. Au cours des nombreuses déclarations qui ont marque les sorties du Conseil d’Administration, le rapport des investigations conduits par l’Inspection Générale d’Etat a été largement évoqué, avec en prime, un manque à gagner de centaines de millions de francs pour l’institution, entre autres griefs. Une autre commission celle-là internationale commise par le gouvernement aurait blanchi le Directeur Général.  N’est-ce pas curieux?  Toujours est-il que les responsables du Conseil dAdministration , notamment les responsables syndicaux ont exigé le départ du DG pour cause de mauvaise gestion.

Apres quelques mois de silence, le Conseil des Ministres vient de demander au DG de se retirer.

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Un limogeage avec des lauriers

Le Conseil des Ministres a assorti sa décision d’une sortie médiatique du Ministre du Développement et de l’Inspecteur Général d’Etat pour expliquer les raisons qui ont fonde la décision du gouvernement. Dans une incohérence à nulle autre pareille, le Ministre du Développement du Benin s’est essayé à cet exercice honteux, humiliant et ridicule, a convaincre les Béninois que le DG/CNSS a bien géré l’institution en portant l’excédent de trésorerie à un niveau largement supérieur au niveau de base a sa prise de fonction,. Un indicateur qui illustre une performance indiscutable et qui du coup, apporte un démenti formel aux accusations de mauvaise gestion qui aurait occasionné un manque à gagner pour la maison. Le Ministre a surtout expliqué que les questions de grande disparité entre les salaires du personnel (rapport ¼) et du salaire du DG lui-même qui aurait touché deux fois le salaire de son prédécesseur lui-même déjà en son temps soupçonné de s’être attribué un salaire similaire à celle de sa banque d’origine  sont d’ordre institutionnel. Qu’appelle t-il problème institutionnel? Ces problèmes ont-ils été créés par l’institution ou par l’homme qui en a la gestion en charge? Le seul couac dans la gestion et qui aurait retenu l’attention du gouvernement était la personnalité du DG. Selon le porte-voix du gouvernement, la forte personnalité du DG René Ali-Yérima se serait heurté au Conseil d’Administration, elle-même accusée par le rapport de l’audit international de se mêler de la gestion quotidienne de la maison par le DG.

Le Ministre a enfin dressé les lauriers au DG sortant en précisant qu’il a tellement bien géré la Cnss qu’il sera  appelé à d’autres fonctions. En somme c’est d’un carriériste du système Yayi qu’il s’agit. On attend donc son prochain point chute.

La préférence régionale et la discrimination à ciel ouvert

Tous ceux qui accusent la gouvernance du Président Boni Yayi de réserver un traitement particulier et sélectif aux citoyens originaires de certaines régions de notre pays ont trouvé une raison supplémentaire dans le dossier “d’affectation” du DG de la Cnss. Il y a quelques mois, Expédit Houessou, alors Directeur Général de la Sonacop  a été limogé,pour ainsi dire,  en direct à la télévision par le Chef de l’Etat lui-même, flanqué du Directeur général de la Police Nationale et au mépris de la procédure judiciaire appropriée. Expédit Houessou qui a pourtant bénéficié de l’appui d’un comité de Trésorerie dirige par la Directrice de Cabinet du Chef de l’Etat et de l’audit conduit  par un haut grade de l’armée pendant plusieurs mois, a été jeté en prison et comme dans de nombreuses nébuleuses ; bien main qui pourra dire si son dossier est en cours d’instruction et si un procès en bonne et due forme aura lieu. Vis-à-vis du monde des artistes, c’est le même comportement qu’on observe de la part du sommet de l’Etat. A la mort d’une artiste de renommée nationale originaire du septentrion, le Chef de l’Etat avait reçu ses parents au Palais de la République pour leur présenter, disait-il, les condoléances de la nation. Par contre, les nombreux autres artistes fauchés par la mort  dans la fleur de l’âge, n’ont pas eu droit à ce privilège. Il vous est loisible de deviner leur origine. Qu’est-ce qui peut expliquer cette politique de deux poids deux mesures? Monsieur Yayi Boni comprend-il les implications des actes qu’il pose?

Est-ce une culture ou une politique personnelle?

On se souvient qu’à son avènement au pouvoir, le régime a été marqué par une série de limogeages notamment dans les rangs des cadres de la SBEE pour interruption d’énerge électrique ou encore de Ministre chassés du gouvernement de façon spectaculaire. Qu’il s’agisse de Madame Colette Houéto à l’Enseignement Primaire et Secondaire, de Dossou Kpèdétin aux Transports, de Gaston Dossouhoui  à l’Agriculture, d’Armand Zinzindohoue à l’Intérieur, tous ces limogeages concernent des fils de la région méridionale de notre pays. Ce qui accrédite la thèse selon laquelle les mauvais gestionnaires proviennent de cette partie du pays. Aucun d’entre eux n’a été sorti du gouvernement à l’occasion d’un remaniement normal. Chacun d’eux a été “viré” seul du gouvernement. Qu’on me donne le nom d’un Ministre du Nord qui a été limoge par le même procédé. Il n’y en a pas.Le seul cas qui aurait pu faire exception à la règle est celle de l’ex ministre de la Fonction publique. Malgré les dénonciations de sa gestion calamiteuse du concours de recrutement  au profit du ministère des Finances, le président refondateur est resté sourd et n’a procédé à son remplacement qu’à l’occasion de la vraie fausse dissolution du gouvernement intervenue courant  avril 2013.  Et le comble, c’est que les cadres du Sud sont instrumentalisés pour jouer aux marionnettes, à l’instar du Ministre du Développement qui nous a récité sa litanie de louanges sur le DG sortant de la Cnss pour passer une couche de vernis sur les vraies raisons de sa mise à l’écart.

En tant que citoyen, je continue de croire que cette politique de “deux poids deux mesures” est intrinsèque a la personne du Chef de l’Etat, a sa vision sectaire et régionaliste et qu’elle ne survivra pas a ce régime de médiocrité de contre-performance.

Coffi Adandozan
Economiste-Planificateur
Lille, France

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