L’intégralité des observations du Be/Unamab sur les récentes nominations prononcées par le conseil des ministres

Le Bureau Exécutif de l’Union Nationale des Magistrats du Bénin (BE/UNAMAB) a été informé par voie de presse que le Gouvernement a publié, par l’organe du Conseil des Ministres en sa séance du 20 janvier 2014, des nominations de magistrats en réponse aux revendications contenues dans la motion de grève mise à exécution depuis le 03 décembre 2013.

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A travers le présent document, le BE/UNAMAB tient à relever les irrégularités contenues dans ces nominations correctives.

I-                 Observations générales

Le BE/UNAMAB note globalement que:

-certains collègues, depuis plus de quatre (04) ans voire huit (08) ans, sont au même poste et exercent les mêmes fonctions, alors que d’autres, moins anciens, sont à leur quatrième nomination suivie à chaque fois de changement de fonctions. Une telle discrimination engendre des frustrations, source de démotivation;

– le défaut d’articulation de l’expérience, la compétence, la probité intellectuelle et morale de certains collègues promus avec les exigences des fonctions à eux confiées. Cette inadéquation entre le profil et l’emploi est souvent source de poursuites disciplinaires et/ou pénales. Ce qui jette du discrédit sur toute la corporation et la plonge dans l’émoi;

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-le redéploiement a été fait sans qu’il soit tenu compte des besoins de chaque juridiction;

-le principe de la hiérarchisation des juridictions, corollaire du caractère fortement hiérarchisé du corps de la magistrature, a été observé de manière peu objective;

-il y a eu plus de postes vacants et une extension des irrégularités à d’autres juridictions. Cette situation de vacance de postes, savamment orchestrée, vise à consolider à la situation d’intérim. L’intérimaire ne pouvant pas agir comme le titulaire du poste, on assiste souvent à la fragilisation de l’institution judiciaire par la généralisation de la vacance et l’instauration de la situation d’intérim. Mieux, l’intérim étant une autre manière de contourner le respect des règles de préséance par la consécration de fait des collègues moins gradés, il importe de le dénoncer et de le combattre.

-les nominations ont été faites sur propositions du Président de la Cour Suprême, alors que les postes pourvus relèvent du pouvoir de proposition du Garde des Sceaux. Une telle innovation annihile quasiment l’effort fourni par le CSM.

II-              Observations par juridiction

Le BE/UNAMAB relève spécifiquement et par juridiction que:

Au TPI Kandi

La préséance n’a pas été prise en compte entre, d’une part, le Procureur de la République et le juge au Tribunal le plus ancien dudit tribunal, et d’autre part, entre ce dernier et le doyen des juges d’instruction. Ce qui viole les dispositions de l’article 13 de la loi n°2001-37 du 27 aout 2002 portant organisation judiciaire en République du Bénin.

A l’égard du Président de cette juridiction, le principe de la hiérarchisation des juridictions et des fonctions à y occuper n’a pas été observé.

Au TPI Natitingou

La vacance du poste de juge d’instruction du 2ème cabinet.

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La violation des règles de préséance entre le juge au tribunal le plus ancien et le doyen des juges d’instruction. Ce qui viole les dispositions de l’article 13 de la loi n°2001-37 du 27 aout 2002 portant organisation judiciaire en République du Bénin. Le juge au tribunal le plus ancien étant de grade A1-6, le nommer au poste de juge au tribunal à Natitingou, alors que ladite fonction est occupée par des collègues moins gradés que lui dans des juridictions plus importantes, s’apparente à une sanction déguisée.

Au TPI Parakou

La préséance n’a pas été prise en compte entre les présidences du Tribunal de Parakou et d’Abomey.

La nomination du 1er substitut du Procureur de la République près le tribunal de Parakou, juridiction de 1ère classe, au poste de juge d’instruction du 1er cabinet du tribunal de Natitingou, juridiction de 2ème classe, s’analyse comme une rétrogradation.

Il en est de même de la nomination du 4ème substitut du Procureur de la République de Cotonou au poste de juge au tribunal à Parakou, juridiction de 1ère classe de moindre importance que celle de Cotonou.

Au TPI Abomey

Le poste de Procureur de la République n’y a pas été pourvu.

Au TPI de Lokossa

Le 2ème cabinet d’instruction de cette juridiction, depuis 2011, est vacant.

Au TPI Aplahoué

La vacance du poste de juge d’instruction du 1er cabinet.

Au TPI Ouidah

La vacance du 1er cabinet d’instruction.

Au TPI Porto-Novo

Il est à constater la nomination d’un nouveau juge au 1er cabinet d’instruction alors l’occupant actuel du poste n’a pas été muté. Ce dernier avait été précédemment, malgré son refus et en violation du principe de l’inamovibilité du juge consacré par la constitution du 11 décembre 1990, nommé conseiller à la Cour d’appel de Parakou, poste dont il n’avait pas le grade au moment où il a été consulté en 2012.

La vacance du poste de Procureur de la République près ladite juridiction.

Au TPI Cotonou

Y sont laissés vacants, les postes de Procureur de la République et de Président du tribunal. Il en est de même du poste du 4ème cabinet d’instruction alors que les 5ème et 6ème cabinets ont été curieusement pourvus. Mieux, en ce qui concerne le 6ème cabinet, en raison du caractère fortement hiérarchisé du corps de la magistrature, un magistrat plus gradé ne remplace son collègue sur qui il a préséance. Ce principe n’a pas été observé s’agissant de ce poste.

La nomination sans consultation des collègues Christian ADJAKAS et Gilbert TOGBONON en qualité de juges au tribunal à Cotonou alors que les intéressés occupent déjà lesdites fonctions depuis plusieurs années.

Il importe par ailleurs de remarquer que la plupart des collègues, dont la promotion a été contestée, ont été pris en compte dans les corrections. Mieux, d’autres, plus nombreux, qui n’avaient aucun problème de promotion ont été redéployés. Pour plus de justice, il importe que ces deux collègues bénéficient de la même attention, sauf si les consultations ne rencontrent pas leur consentement.

En outre, le Gouvernement et le Conseil Supérieur de la Magistrature sont restés silencieux sur les cas de:

-Madame Claire HOUNGAN-AYEMONA,

-Monsieur Thierry Damase OGOUBY.

Le Procureur Général près la Cour d’appel de Cotonou, précédemment Substitut Général du Procureur Général de Parakou, est moins gradé que certains conseillers de ladite Cour d’appel; promotion qui viole les dispositions de l’article 13 de la loi n°2001-37 du 27 aout 2002 portant organisation judiciaire en République du Bénin et le principe de la hiérarchisation des juridictions.

La prolongation inquiétante de la vacance du poste de Procureur Général près la Cour Suprême.

III-          Au titre de la mauvaise gestion du personnel

Le parquet de Cotonou a été réduit de six (06) à quatre (04) magistrats, ceux de Porto-Novo et d’Abomey de quatre (04) à deux (02) magistrats, les parquets de Natitingou et de Kandi ont enregistré un accroissement en effectif de un (01) à trois (03) magistrats, celui de Ouidah a été réduit de trois (03) à deux (02) magistrats, alors que les parquets de Parakou et de Lokossa ont été respectivement renforcés de deux (02) à cinq (05) et de deux (02) à trois (03) magistrats.

Le constat est le même au niveau du siège, notamment au TPI Ouidah où il y a cinq (05) départs contre une arrivée.

Cette répartition du personnel, qui ne tient pas compte de l’importance du contentieux pendant devant les juridictions, est une source sérieuse de lenteur judiciaire.

Au-delà des questions de nominations, le Gouvernement n’a pas répondu à la première revendication de l’UNAMAB à savoir, la mise en place d’un dispositif pour assurer la sécurité de tous les magistrats. Sur la question, le Garde des Sceaux a, suivant correspondance en date du 26 décembre 2013, reçue le 03 janvier 2014 par le BE/UNAMAB, saisi le BE/UNAMAB, aux fins de propositions de mesures concrètes destinées à sécuriser les magistrats. Suivant correspondance en date du 09 janvier 2014, le BE/UNAMAB a soumis au Garde des Sceaux les mesures qu’il estime propres à garantir la sécurité des magistrats tant au service qu’à domicile.

Le vendredi 24 janvier 2014, une séance travail entre la chancellerie et une délégation du BE/UNAMAB consacrée à l’examen des propositions faites n’a pas pu déboucher sur de solutions concrètes.

IV- Sur la question de la défalcation sur salaire

Alors que le Gouvernement a reconnu la pertinence des observations du BE/UNAMAB et s’est attelé, sans succès, à corriger les irrégularités dénoncées, force est de constater que le même Gouvernement a procédé à une ponction d’au moins des trois quarts (¾) du salaire du mois de janvier et ce, en violation de l’article 25, alinéa 1er de la loi n°2001-09 du 21 juin 2002 portant exercice du droit de grève en République du Bénin qui dispose que «les grèves ayant pour motif la violation des libertés fondamentales et des droits syndicaux universellement reconnus ou le non-paiement des droits acquis par les travailleurs, ne donnent lieu à aucune réduction de salaire ou de traitement.». La défalcation pour fait de grève se fait en tenant compte de l’objet de la revendication qui justifie le mouvement de grève. La motion en cours d’exécution vise la mise en place d’un dispositif approprié pour assurer la sécurité des magistrats dont certains, parce qu’ils font l’objet de persistantes menaces de mort, sont contraints de limiter leur déplacement au delà de certaines heures et à des endroits; ce qui est une restriction du droit d’aller et venir, une liberté fondamentale (Articles 15 de la Constitution du 11 décembre 1990, 6 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, 3 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et 9 du Pacte International relatif aux droits civils et politiques)

L’UNAMAB ne dénie pas au Gouvernement le droit d’opérer des défalcations sur salaire, mais s’érige contre toute ponction sur salaire effectuée en marge de la légalité.

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