Acculé dans ses derniers retranchements par une fronde syndicale, Yayi sort et menace. Au cours de ce monologue truffé de diatribes, de contre-vérités mais aussi de révélations intéressantes, il avoue en filigrane son échec et son incapacité à gérer la situation et s’est contenté de diaboliser tous ceux qui lui tiennent tête dans le pays.
Les Béninois s’habituent de plus en plus au style violent et brouillon de leur Chef de l’Etat. A maintes reprises déjà, on l’a vu presque en transe, proférer des injures et des menaces sur telle corporation. Hier, le Chef a choisi l’occasion d’une séance de présentation de vœux avec la jeunesse pour monter au créneau. Lors de cette déclaration, il s’en prend vertement aux syndicalistes qui ont déclenché depuis quelques jours une grève qui paralyse tout le pays. Seule déclaration positive, même si elle est dite avec ironie et amertume, Yayi affirme laisser désormais les travailleurs marcher. Il s’agit d’une avancée – sauf si Yayi est entrain d’amuser la galerie – puisque depuis 2006, la plupart des marches organisées par l’opposition ou les syndicats sont systématiquement interdites. S’il a compris finalement qu’il faut laisser les gens marcher, c’est une avancée à saluer et à mettre à l’actif des syndicalistes.
Tout est corrompu
A en croire le Chef de l’Etat, les syndicalistes sont corrompus et reçoivent de l’argent depuis Paris. Idem pour les magistrats en grève et les journalistes dont certains sont des « plaies » et prennent de l’argent pour écrire du n’importe quoi.
Communication présidentielle : zéro pointé !
Ceux- là n’ont pas de grâce à ses yeux. Ce sont tous des gens corrompus sauf Garba Yaya, fraîchement promu Dc de ministère après avoir organisé le concours frauduleux au ministère du travail et Auguste Ali Yérima, limogé pour mauvaise gestion à la tête de la Caisse nationale de sécurité sociale(Cnss) et promu quelques jours après conseiller technique à la présidence. Eux autres, ne sont pas corrompus selon le Chef de l’Etat. Avec une telle déclaration, Yayi ne devrait pas être surpris si le Mcc ne nous accorde pas le second compact du Mcc puisque c’est lui-même qui parle de corruption grandeur nature devant même un Américain.
La talonphobie
Il accuse à nouveau Talon pour sa cupidité et sa volonté de contrôler à lui seul toute la filière coton. C’est lui l’ennemi public « numéro un » qui finance les syndicats pour déstabiliser le pays et écourter son mandat à lui. Le président Yayi dira que si Talon (il ne l’a pas nommé) pouvait revenir avec au moins 1% de sa fortune au pays. Yayi souffrait de ce syndrome il y a longtemps. Depuis que ce magnat du coton a fui du Bénin, il est devenu un paria. Tous ceux qui osent penser rencontrer ce monsieur sont considérés comme des préposés au complot qu’on veut organiser pour le déposer.
Un pays sans boussole
« Où va le Bénin ? », s’est interrogé le Chef de l’Etat. Or, normalement, Yayi ne devrait pas poser cette question. C’est lui qui devrait répondre à cette question. En tant que premier magistrat du pays, il est censé utiliser les moyens de l’Etat pour donner une orientation claire à la crise. Dans un pays sérieux une telle déclaration pourrait être assimilée à un parjure car c’est à lui que le peuple a confié la responsabilité de conduire le navire Bénin jusqu’en 2016. Cette déclaration n’est qu’un aveu d’impuissance et d’échec.
Menace et pourrissement
Le Chef de l’Etat demande aux travailleurs de marcher désormais jusqu’à aplanir la route Akassato-Bohicon. Curieusement, il ne dit pas un seul mot de compassion ou de regret sur la répression barbare du 27 décembre source des paralysies actuelles. Plus grave, il semble minimiser les conséquences en disant que les syndicalistes ont imbibé leurs habits d’encre rouge pour montrer à la face du monde qu’ils ont été violemment molestés. Une telle déclaration, dans un contexte de grève générale ne fait qu’envenimer la situation. Tout se passe comme si le Chef de l’Etat a un intérêt particulier à voir la grève prendre plus de l’ampleur. Et on se demande s’il n’y pas un plan caché derrière cette attitude à conduire les choses vers le pourrissement. Enfin, le Chef de l’Etat se montre vindicatif et affirme qu’il va bondir bientôt sur les travailleurs comme s’il n’était pas satisfait de la situation actuelle.
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