Quand les muses inspirent l’artiste, le produit qui en sort est universel. Et «Le Pays va mal» de l’artiste ivoirien Tiken Jah Fakoly se prête bien pour attirer l’attention de ceux qui tiennent le gouvernail «Bénin» sur le décor dans lequel ils mènent le pays.
Dire comme le grand reggaeman Tiken Jah Fakoly que «Le Pays va mal» n’est pas du pessimisme mais du pur réalisme. Le Bénin va mal, de mal en mal. Tiken, besoin n’est plus de le présenter, a un accent satirique. Mais tout bon appréciateur reconnaîtra qu’ici, l’artiste n’a fait que présenter et alerter sur une situation qui allant de mal en mal comme le dit le refrain, mettait en péril le vivre en commun pacifique dans son pays. Et la suite lui donna raison.
Ça n’arrive pas qu’aux autres. On le sait, le répète dans les discours. Mais prend-t-on réellement conscience de l’imminence du danger. Les mêmes causes, on le sait, produisent les mêmes effets. Tout comme en Côte- d’Ivoire, le Bénin commence par réunir les éléments pour l’implosion sociale.
Zik et sagesse : « Ne tuez pas la liberté », dit Gnonnas Pédro aux gouvernants
Régionalisme, tribalisme et népotisme au sommet
«Avant on ne parlait pas de nordistes ni de sudistes. Mais aujourd’hui tout est gâté.» Fait remarquer l’artiste dès son premier couplet. Il n’y a pire aveugle que celui qui ne veut voir le régionalisme latent qui règne en maître au Bénin. La conséquence de ceci comme le dit Tiken est «La division» des fils et filles d’un même pays. «L’armée est divisée. Les étudiants sont divisés. La société est divisée. Même nos mères au marché sont divisées». Ce qu’observe l’artiste, n’est pas si différent de la situation au Bénin. Un tour à l’Université d’Abomey-Calavi, et l’on constate les nombreuses affiches d’association d’étudiants ressortissants de telle ou telle autre région, qui montrent une division consommée des étudiants. Ces associations, ce n’est qu’un secret de polichinelle-sont à la solde de politiciens en mal de popularité. Les concours de recrutements non seulement sont frauduleux mais obéissent à une règle régionaliste, tribaliste dite des quotas et non à l’excellence. En témoigne, le dernier concours de recrutement frauduleux, organisé au profit du Ministère de l’économie et des finances (Mef) et les nominations abusives dans le secteur judiciaire qui ont déferlé la chronique. Et face à tous ces maux, les gouvernants, des précédents aux actuels semblent être en panne de solutions. «Nous manquons de remèdes contre l’injustice, le tribalisme…» dira Tiken. Le corollaire du manque de solutions idoines en est l’exacerbation de la corruption qui a fait perdre au Bénin le second compact du millénium challenge account.
«Le pays est dans la confusion»
En référence à la situation économique et sociale actuelle du Bénin, il est bien vrai que le Bénin est dans la confusion. «Le pays est dans la confusion. Ils veulent foutre le bordel chez nous (…) La confusion règne. C’est le sauve-qui-peut général.» C’est ce que chante en langue locale, l’artiste dans le dernier couplet de son morceau traduit par Marie-Louise Parizet. Les opérateurs économiques nationaux qui, au lieu d’être chouchoutés, sont traqués, des magistrats et juges également traqués comme du gibier, la misère ambiante des populations sont des éléments d’appréciation de la confusion qui s’installe au Bénin. Mieux, les guéguerres astucieusement provoquées par l’exécutif entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir législatif donnent raison à l’artiste. Aussi, les grèves perlées sur fond de menaces de part et d’autres, qui paralysent actuellement l’administration et mettent en berne le système éducatif national montrent-elles bien que les forces du mal s’activent à plonger le Bénin dans une implosion. A ceux-ci, Tiken Jah Fakoly dit «Magô mi ba’fé kagnan djamana gnagamou Allah ma’ho kili tchi’la», «Que tous ceux qui veulent la perte de notre patrie soient châtiés par Dieu». Mais Allah, Dieu ne voulant pas la mort du pécheur, «Zik et Sagesse» vous demande le repentir car il n’est jamais tard pour bien faire.
Laisser un commentaire