Humeur du temps : Paris, destination à risque !

Qui veut aller à Paris ? A cette question, maints Béninois ici à Cotonou hésiteront aujourd’hui avant de lever leurs petits doigts. Naguère destination très prisée des Béninois, la capitale française recevait tout ce que le Bénin avait d’important.

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Hommes politiques, opérateurs économiques, universitaires, artistes, membres du gouvernement et d’autres institutions, Béninois anonymes et nantis, tous y allaient par prestige, obligation professionnelle ou pour nouer des relations en affaire ou en politique. Ceux qui y revenaient étaient souvent bien côtés. On les prenait pour des « mèdjômè », des gens de la high society qui ont réussi dans la vie et qui ont eu la chance, rare, de mettre bien chez ces blancs qui nous ont tout donné. Ils étaient bien écoutés, pouvaient décrocher n’importe quel projet ou séduire la femme la plus dure de leurs alentours. Bref, Paris passait pour une destination obligatoire. Depuis 1960, la donne a peu changé. Mais en 2012, on réfléchit par trois fois avant d’y mettre. Depuis que le Chef de l’Etat a déclaré sa « fatwa » contre un certain Patrice Talon et son compère Olivier Boko, accusés ici d’avoir voulu attenter à sa vie, il n’est plus trop recommandé d’aller là bas, outre-méditerranée. Aller à Paris signifie « aller voir Talon ». A maintes reprises et dans ses discours enflammés contre ce magnat du coton, le nom de la capitale française est ressorti comme lieu où se manigancent actuellement les complots les plus abjects contre son régime et sa personne. On accuse tel d’aller à Paris, l’autre de recevoir de Paris un butin de guerre pour déstabiliser la république. Sans trop s’en rendre compte lui -même, le président Yayi se lance dans une campagne de diabolisation de la capitale française et de la France tout court et se hasarde sur les sentiers imprudents de la provocation diplomatique. Depuis, tout le monde se méfie de Paris. Seuls quelques courageux prennent le risque de faire un tel voyage. Certains, pour embrouiller les pistes sont obligés d’aller à Paris en passant par des vols indirects. D’autres sont obligés de surseoir à leurs voyages, de peur que l’accusation et le mensonge faciles du gouvernement ne puissent les assimiler aux hôtes de Talon à Paris. C’est le cas d’un ambassadeur du Bénin dans un pays du Golf qui raconte, lors de son dernier séjour au pays pour les fêtes de fin d’année que depuis près d’un an, il a peur d’aller à Paris où il doit pourtant rencontrer un parent pour une affaire urgente. Il est obligé d’envoyer des commissions par des tiers. Les soupçons sont quasi permanents et aggravent la phobie de se rendre à Paris des membres des institutions et membres de la majorité présidentielle. A l’aéroport de Cotonou, les agents de renseignements sont déployés pour voir et épier le départ et l’arrivée des passagers sur des vols allant et revenant de la France. Paris la recherchée est devenue l’indésirable. Les relations séculières entre ces deux pays sont désormais basées sur la méfiance car là bas à Paris, il y a le diable.

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