L’équation de la Route des Pêches

« Small is beautiful ». C’est le titre de l’un des ouvrages de l’Allemand  Ernst Friedich Schumacher. A traduire par « Ce qui est petit est beau ». Nous voulons bien. Mais alors, que dire de ce qui est grand ? 

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Que penser de celui qui épouse le rêve de voir grand ? Il se trouve que c’est ce que fait le Bénin, en ce moment, avec un projet de dimensions pharaoniques : « Le Programme de développement touristique de la Route des Pêches ».

Qu’on en juge : 1 200 milliards de francs CFA à mobiliser ; 43 Km de côtes à mettre en valeur, de Fidjrossè jusqu’à Djègbadji, de Ouidah jusqu’à Grand-Popo. 22 719 emplois à offrir ; 6 747 appartements et logements pavillonnaires à construire. 103 271 visiteurs à accueillir tous les jours.

De mémoire de Béninois, jamais projet de développement n’a   concentré autant de fonds, n’a offert autant d’opportunités, n’a fait entrevoir autant de perspectives heureuses. L’emploi va être boosté. Le secteur privé, national notamment, va s’inviter à jouer une carte majeure. Le partenariat public/privé va sauter le pas du discours pour s’inscrire dans la réalité. Ne parlons pas des retombées en espèces sonnantes et trébuchantes. L’Etat sera bien servi. Les populations y trouveront leur compte. Les divers corps de métiers ne seront pas oubliés.

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La sagesse burundaise enseigne : « Ce que désire ardemment le cœur met les jambes en route tôt le matin ». (Fin de citation). Les Béninois ne peuvent que désirer ardemment le succès de cette entreprise. Aussi doivent-ils être présents, aux aurores, sur les espaces de réflexion et d’action où se joue l’avenir de ce Programme. Il y a donc des pré-requis. Ils s’imposent comme autant de conditions à remplir. Nous les déclinons en cinq principaux défis.

Premièrement: le défi environnemental et humain.Le projet de la Route des Pêches, par sa taille, portera inévitablement quelques coups de poings et quelques coups de griffes à la nature. Des études d’impact environnemental aideront à prendre d’utiles mesures conservatoires. Vivement que les résultats de ces études soient transparents et surtout qu’ils soient disponibles. Par ailleurs, les populations riveraines mériteraient d’être informées, à défaut d’être associées, voire intéressées aux retombées et aux dividendes de l’opération. Nelson Mandela nous l’a appris :  » Ce qu’on fait pour vous, mais sans vous, est fait contre vous ».(Fin de citation).

Deuxièmement: le défi législatif. Il faut s’imposer la discipline de placer le Programme sous le signe de la loi. Il convient, en effet, de mettre en place un cadre juridique et réglementaire adéquat et approprié pour son bon fonctionnement. Autant, comme le disent les Latins, « la lumière est ma loi », « Lux mea lex », autant la loi doit être la lumière qui, de par sa souveraine clarté, éclaire tout le programme.

Troisièmement: le défi d’un environnement des affaires assaini. On ne peut appeler, autour d’un programme, des investissements aussi lourds sans l’assainissement préalable de l’espace appelé à les accueillir. L’argent n’aime pas le bruit, encore moins le désordre et la pagaille. L’argent est à l’image d’une plante frileuse. Il ne prospère vraiment qu’en fonction de la couleur du ciel de l’endroit qui l’accueille.

Quatrièmement: le défi de la sécurité. Un Programme qui a une attractivité aussi forte que celui de la Route des Pêches pose tout naturellement d’énormes problèmes de sécurité. Il faut protéger et rassurer les personnes. Il faut sauvegarder et   sécuriser les biens. A l’intelligence diabolique des malfrats, il faut opposer l’intelligence vertueuse des gens de bien.  Des stratégies sécuritaires victorieuses sont à inventer. Ce nouveau pôle touristique mérite d’être un havre de sérénité et de paix.

Cinquièmement: le défi culturel. Il ne peut s’agir, avec ce Programme, d’ériger des kilomètres de murs de béton et de verre, de reproduire un art de vivre en porte à faux avec les réalités du milieu, de transférer un modèle architectural standard. Qu’auraient-ils encore à découvrir nos hôtes touristes s’ils ne devaient retrouver chez nous que ce qu’ils ont laissé chez eux ? Il n’y a que notre génie culturel pour faire la différence. Aussi devons-nous convoquer nos cultures à la fête du bon, du beau et du bien. Cela nous conférera le statut de gens porteurs d’un message spécifique au monde. Cela nous projettera comme des gens qui savent vendre un peu d’eux-mêmes aux autres. Alors, si nous sommes prêts, que s’ouvre, aujourd’hui même, la Routes des Pêches

 

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