Coup de gueule : quand l’artisan béninois creuse sa propre tombe !

L’artisan Béninois se jette dans la gueule du loup. C’est le moins à dire quand on s’en tient au témoignage ci-après : « Le menuisier est passé prendre les mesures des tables et blancs à réaliser. Il m’avait promis de faire la livraison soixante-douze heures au plus tard.

Publicité

Il m’a demandé l’acompte faisant environ deux tiers du montant total…Et depuis plus d’une semaine, il devient introuvable. Il ne décroche plus mes appels…J’ai dû passer par personne interposée pour aller le surprendre à son domicile. Il n’a eu comme toute réponse que de demander ma clémence…Mon unique question était de savoir quand j’aurai ma commande. En une minute, il a produit trois causes du retard : le bois bloqué à la scierie, enfants malades, les premiers meubles rachetés par un autre client et tutti quanti ». C’est l’extrait du témoignage d’un jeune entrepreneur déçu et désillusionné déjà par les manigances des artisans. Si ce n’est pas le menuisier, c’est le soudeur, le plombier, le frigoriste, le peintre, le vitrier, le maçon ou autres…Mais pour ce jeune entrepreneur, tous l’ont déçu et n’ont tenu aucunement parole. Malheureusement, ce témoignage loin d’être un cas marginal, est légion chez les artisans béninois. Seulement, l’Artisan béninois a-t-il conscience des multiples conséquences de ses faux bonds et mesquineries sur sa profession et sur celles des autres corps de métiers ?

Crédibilité de l’Artisan béninois : solde déficitaire

Ce n’est plus qu’un secret de polichinelle. L’Artisan béninois a suffisamment rogné sa crédibilité au point de la vider de son essence. Quelles misères l’Artisan béninois n’a-t-il pas fait subir à ses clients (nationaux ou étrangers) ? Difficile de trouver des circonstances atténuantes pour défendre l’Artisan béninois de plus en plus indéfendable. Du non-respect des délais de livraison aux disparitions suspectes après réception des acomptes en passant par la légèreté dans la réalisation des services ou produits, il a fini par laisser tellement de mauvais souvenirs. Le solliciter relève plus d’une nécessité vitale que d’une partie de plaisir. Il a l’art de vous mettre au pied du mur alors que son service est prépondérant dans vos activités à un moment crucial. Il vous promet promptitude et diligence pour vous afficher uniquement nonchalance. Il vous promet qualité et sérieux pour enfin vous démontrer irresponsabilité et tâtonnement. Quel crédit peut-on accorder à la parole et aux professions de fois de l’Artisan béninois ?

Chez l’artisan, le client est souvent esclave…

« Le client est roi ». Voilà bien un principe sacro-saint qui a perdu tout sens chez la plupart des artisans béninois. Le client, malgré lui, est tourné en rond et malmené au gré des vices et forfaitures de son prestataire, l’artisan. Comme si ce dernier pouvait se passer de sa clientèle et trouver sa subsistance, il se comporte très souvent comme le dernier recours par sa lenteur et l’imprécision de ses résultats. Au lieu que ce soit la volonté du client qui prime sur la sienne, c’est au contraire lui qui impose le fruit de ses errements et de son ‘‘inconscience professionnelle’’. Point n’est besoin de souligner que très souvent, il ne revient pas au client de décider du moment d’acquisition de son bien, mais l’artisan prend tout le temps qui lui plaira pour enfin livrer un produit qui peut n’être pas à la hauteur de ses attentes. Il n’en faut pas plus pour conclure que chez l’artisan béninois, le client est serf.

Publicité

Un cancer pour l’initiative privée

Faudrait-il rappeler ce mauvais souvenir au sujet d’un frigoriste qui a fait dépenser cinq fois plus son client pour une réparation qui n’en valait pas la peine. Après un diagnostic approximatif, il s’est ravisé plus tard pour demander l’achat d’autres pièces de rechanges. Puis encore, d’autres pièces à changer et encore. Finalement toutes dépenses imprévues au premier diagnostic n’ont aboutit qu’a un bien irrécupérable.

Ce jeune entrepreneur, abandonné à ce triste sort, s’est retrouvé à une forte somme jetée par la fenêtre ; somme qui aurait pu lui permettre d’avoir un autre frigo ou réfrigérateur et faire fleurir ses activités. Ainsi, ce défaut de professionnalisme (involontaire ou provoqué à dessein) rend vulnérable l’initiative privée. Combien, ne sont-ils pas à freiner leur ardeur et l’étendue de leurs affaires en raison de la défaillance de tel ou tel artisan ? Assez de malencontreuses expériences qui finissent par devenir des véritables obstacles à l’entreprenariat.

Vers le réflexe des produits importés…

Quand les mauvaises expériences se multiplient avec les artisans, les populations qui ont pourtant besoin des biens, cherchent des alternatives et solutions parallèles. C’est ainsi, de plus en plus, des biens importés monopolisent graduellement mais surement la clientèle. Ces produits importés ont le mérite d’être disponible à temps pour le client sans avoir à subir des vaines pérégrinations. De plus en plus, les Béninois font recours à plusieurs biens meubles importés que les artisans peuvent pourtant fabriquer sur place. Mais comme chaque commande de bien vire au cauchemar et devient un feuilleton dont le nombre d’épisodes à rebondissement ne soient prévisibles, le client va acheter un bien importé la mort dans l’âme.

La qualité peut être moindre ou meilleure. En tout cas, celui qui a besoin d’un produit voudrait l’avoir au bon moment. Ce pari n’est pas encore tenu par les artisans locaux dans leur grande majorité.

En conséquence, inconsciemment (sans doute) les artisans béninois forcent leurs concitoyens à préférer l’achat des biens importés. Malheureusement, c’est un handicap pour l’économie locale. Chaque bien importé occasionne une sortie de devises, et donc un affaiblissement du tissu économique national. Alors, l’artisan s’attire les difficultés. Et bientôt, autant on condamne les béninois d’avoir une habitude alimentaire basée sur l’importation, on les jegera d’abandonner les artisans béninois au profit des produits manufacturés importés. A qui la faute donc ?

L’urgence d’un meilleur savoir-être

Les Artisans béninois se doivent de se reprendre au plan comportemental et moral. Un changement de comportements s’impose à eux au risque de leur anéantissement progressif et total. Déjà, ils sont nombreux à se plaindre du manque de clients malgré les besoins évidents. Si les artisans béninois peinent à comprendre qu’ils sont les premières sources de leurs problèmes, ils iront au gouffre. S’ils doivent continuer à narguer, duper et humilier ceux qui viennent leur demander services, ils courent à leur propre ruine.   De toute évidence, il ne s’agit pas encore d’un procès lié au savoir et savoir-faire, il est question  de remettre en cause le savoir-être de l’artisan béninois. Car quelque soit son savoir-faire, il ne saurait être qualifié de compétent sans réajuster les fondements de son savoir-être.

Les coopératives : une alternative pour sauver la face

Les artisans béninois travaillent seuls, et trop seuls. Cet individualisme nocif a fini d’étaler ses lacunes face à l’agressivité des marchés extérieurs menés par ge grands groupes qui envoient des produits conformes aux attentes et à prix réduits. Si les artisans béninois continuent de s’enfermer dans leur schéma traditionnel de fonctionnement. Justement, la constitution de coopératives pourrait contribuer à inverser la tendance. La coopérative, en tant que groupement économique associatif caractérisé par l’égalité des droits de chacun de ses membres quant à sa gestion et par une répartition égalitaire de ses bénéfices, s’avère un gage de discipline, de rigueur, d’anticipation et de professionnalisme. Toutes qualités, aujourd’hui nécessaires, pour relancer les artisans béninois et redorer leurs images. C’est donc par ce vigoureux réveil professionnel et une remise en cause morale que l’artisan béninois pourra semer les grains de sa renaissance.

Romaric Tankpinou BANON
Consultant en Management & Communication
Journaliste indépendant, Concepteur-Rédacteur & Ecrivain

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Publicité



Publicité