Le Fonac déballe un scandale de 14 milliards F Cfa à la Sobemap

Après le cas de la Soneb dénoncé en février dernier et qui s’est avéré,  le Front des organisations  nationales contre la corruption (Fonac) est encore revenu hier, lundi 5 mai  2014, devant le peuple béninois. Jean-Baptiste Elias et ses pairs ont exposé un autre scandale de corruption et de mauvaise gouvernance, relatif à la passation d’un marché de fourniture de matériels de manutention portuaire d’une valeur de 14 milliards de Francs Cfa.

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L’affaire a, cette fois-ci,  cours à la Société béninoise des manutentions portuaires (Sobemap). Le Bénin est une fois de plus secoué par un scandale  de mauvaise gestion et de corruption dans une société d’Etat sous le régime Yayi. C’est, cette fois-ci, la Société béninoise des manutentions portuaires (Sobemap) qui est concernée avec un scandaleux dossier de 14 milliards de F Cfa. Ce scandale a été dévoilé par  une délégation du Front des organisations  nationales contre la corruption, (Fonac) dirigée par M. Jean-Baptiste Elias, le président du Conseil d’administration. C’était  au cours  d’une conférence de presse tenue hier lundi 5 mai 2014 au Codiam à Cotonou. Le scandale à l’ordre du jour est la passation de marché pour la fourniture de matériels de manutention portuaire au profit de la Sobemap. Un marché sur financement conjoint de la Banque ouest africaine de développement (Boad) et de l’Etat béninois.

Au commencement

En décembre 2012, avec l’évolution des activités portuaires au Bénin, la Sobemap s’est rapprochée de la Boad à Lomé pour signer un accord de prêt  pour onze milliards cinq millions (11.500.000.000) de Francs Cfa  qu’elle devrait compléter à deux milliards cinq millions (2.500.000.000) de Franc Cfa -ses fonds propres-,  afin d’acquérir des matériels de manutention portuaire. L’accord conclu, sur autorisation du Conseil des ministres, une délégation composée entre autres, d’Experts, du Directeur général de la Sobemap, du Directeur national du contrôle des marchés publics, s’est rendue en France, en Allemagne et au Pays-Bas du 14 au 28 octobre 2013, pour une mission prospective en vue de l’acquisition d’engins et d’équipement de manutention au profit de la Sobemap. Suite à cette mission le conseil des ministres  a instruit l’ouverture d’un appel d’offre international restreint qui a permis à 11 entreprises de soumissionner. Après ceci, des travaux d’analyse, d’évaluation et de jugement ont eu lieu du 27 au 31 janvier 2014 à l’hôtel le Millenium Popo Beach à Agoué sous la présidence effective de la Personne responsable des marchés publics de la Sobemap. Conformément au code des marchés publics, cette personne  est le président du Conseil d’administration de la société, Lionel C. Ouendo. De ces travaux, devraient sortir les noms des entreprises adjudicataires. Et c’est ce que la Personne responsable des marchés publics de la Sobemap s’apprêtait à faire ; à travers une lettre référencée n°23/2014/RPRMP/S-PRPMP du 03 février 2014 pour transmettre les résultats des attributions provisoires au Directeur national du contrôle des marchés publics. Mais c’est là que tout commence à chambouler.

Le coup de fil du président Yayi Boni

Jamais cette lettre n’est arrivée à destination. Elle a été bloquée. Par qui ? C’est le Directeur général de la Sobemap, M. Séïbou Toleba Soumanou.  Dans une autre correspondance, le Dg  notifie au ministre de l’Economie maritime et des infrastructures portuaires  qu’il a reçu un coup de fil du Président de la république, Boni Yayi qui a ordonné « l’annulation de tous les marchés attribués sur les engins à Agoué.»  Sur ce, le président du Fonac s’interroge: «Le président de la République pouvait-il décider d’annuler un Appel d’offre régulièrement lancé, qui suit son cours normal ? Peut-il prendre la responsabilité d’annuler un tel Appel d’offres sans un écrit ? Et s’il en  avait l’idée, le Dg supposé technicien ne devrait-il pas l’en dissuader ? ». Autant d’interrogations qui montrent qu’il y a anguille sous roche.

Le Dg Soumanou Toléba indexé

Personne n’était capable de savoir jusqu’où irait le Dg Séïbou Soumanou Toléba après la confiscation de la lettre de son président du Conseil d’administration. Selon ses déclarations rapportées par le Fonac, ‘’le président de la république l’a instruit d’aller acquérir sur place lesdits engins en Europe en compagnie, entre autres, du Directeur national du contrôle des marchés publics et de l’inspecteur général des finances’’.  Et pourtant,  il n’aura pas agi conformément à cette « instruction illégale » de son chef, le président de la République, Thomas Boni Yayi. Selon les preuves avancées par  le Fonac, le Dg et les personnes sus-citées  se sont rendus à Paris, où ils sont restés pendant trois semaines et ont constitué clandestinement un autre Appel d’offre. Le Dg Soumanou a lui-même présidé le dépouillement dudit Appel d’offres et procéder à la réattribution des marchés  hors du territoire béninois. Chose qu’aucune loi en vigueur au Bénin ne prescrit. Il s’agit là, selon les termes de Jean-Baptiste Elias, d’une  « mascarade» organisée par le Dg Toléba et toutes les personnes l’ayant suivi dans ce déplacement sur Paris. Tout ceci, en violation du code des marchés publics en vigueur au Bénin et dont le champ d’application est limité au territoire national. Outre cette entorse à la règle en la matière, le Dg Toléba, selon une lettre officieuse tombée entre les mains du Fonac, a tenté de dessaisir le président du Conseil d’administration de la signature du décaissement des 14 milliards.  Cette lettre portant objet «transmission du spécimen »,  qui devrait être portée au président de la Boad pour lui notifier qu’il est –contrairement au code des marchés publics- désormais la personne apte à signer le décaissement des 14 milliards. Donc le seul individu à attribuer illégalement les marchés et à ordonner le décaissement des fonds. C’était sans compter avec la volonté du Président du Ca Lionel Ouendo. Ce dernier a refusé de signer cette lettre qui ne va finalement  plus être transmise à la Boad conformément au dessein du Dg Toléba.

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Bénin perdant

Depuis le 06 décembre 2013, date à laquelle le Conseil des ministres a instruit l’acquisition dans les brefs délais des matériels nécessaires auprès des fournisseurs identifiés au terme de la mission de prospection en Europe, jusqu’à présent, rien n’est fait et nul ne peut dire ce qu’il est des 14 milliards initialement alloués à ce projet d’acquisition de matériels.  Pendant ce temps le Dg Toléba et ses pairs dans la conduite de ce dossier sortent du pays aux frais du contribuable béninois pour des missions budgétivores. Le Fonac vient ainsi de mettre à nu une autre manœuvre de mauvaise gestion et de corruption orchestrée à la tête des entreprises d’Etat sous le gouvernement Yayi. Lui, le président tout-puissant qui vient d’être tapé dans le dos  par un de ses supers Dg, de surcroît ancien ministre, fera quoi dans cette affaire qui l’implique aussi ? Affaire à suivre.

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