Polémique autour de la connaissance ou non de la Ccja/Ohada du dossier Pvi : les explications de Me Elie Vlavonou- Kponou

Lors d’une séance à laquelle il avait convié mercredi 28 mai dernier, les jeunes, le chef de l’Etat, confirmant les propos de ses ministres de la Justice et du développement, avait soutenu mordicus que l’Ohada n’a nullement connu du dossier Pvi (Programme de vérification des importations) et que le Bénin ne paiera aucun kopeck à la société Bénin Control de l’homme d’affaires Patrice Talon qui gérait le programme. 

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Cette version du Gouvernement, confirmée par l’un de nos confrères, bien en contradiction avec ce qui se disait depuis l’annonce de la sentence le 13 mai dernier, fait polémique et sème la confusion. Notamment en ce qui concerne la connaissance ou non par la Cour commune de justice et d’arbitrage de l’Ohada du dossier Pvi. Que s’est-il réellement passé dans ce dossier ? Qui a prononcé la sentence ? Cette sentence est-elle sans recours ? Me Elie Vlavonou -Kponou, avocat au barreau de Cotonou, membre du collège des avocats de Bénin Control, explique ici, dans l’entretien exclusif qu’il a bien voulu accorder à votre journal La Nouvelle Tribune, ce qui s’est passé. Il donne des ouvertures sur le recours formulé aujourd’hui même par l’Etat béninois par l’intermédiaire de son conseil Me Sadikou Alao. Lisez plutôt.

 Me Vlavonou, que dites vous des informations véhiculées sur le net selon lesquelles la Cour Commune de justice et d’arbitrage(CCJA) n’a pris aucune décision sur l’afffaire Pvi ?

Me Elie Vlavoinou-Kponou Les informations dont vous faites état font partie de la stratégie de communication de la partie adverse.De quoi s’agit-il en réalité ?  La Ccja, Cour commune de Justice et d’arbitrage de l’Ohada qui a son siège à Abidjan est une institution qui a double nature. Elle est à la fois un centre d’arbitrage et une juridiction. Et en tant que centre d’arbitrage, elle organise ce qu’on appelle l’arbitrage institutionnel plus précisément l’arbitrage Ccja. L’arbitrage est une procédure de règlement des litiges par des juges qu’on appelle des juges privés. Ils ne sont pas des juges étatiques. Ce sont des personnes privées qu’on érige au rang d’arbitre et qui ont pour vocation de trancher les litiges. Les parties conviennent dans le cadre d’une convention d’arbitrage de confier en cas de litige, le règlement du litige à ces personnes. Donc revenant à la Ccja, elle organise un arbitrage institutionnel. Et c’est ça qui a conduit à la sentence qui a été rendue le 13 mai. Mais il faut distinguer la Ccja en tant que centre d’arbitrage de la Ccja en tant que juridiction. Lorsque le tribunal arbitral qui est composé par des arbitres désignés par les différentes parties rend une décision, il y a possibilité de recours par la partie qui estime qu’elle a été lésée.  Dès que la sentence est rendue, la partie qui a intérêt peut exercer le recours ou dès qu’elle reçoit notification, elle a deux mois pour faire ce recours. Ce recours est appelé, recours en contestation de validité. Ce recours est connu par la Ccja toujours mais cette fois-ci en tant que juridiction. C’est donc normal ce qui se passe. Que l’Etat exerce un recours c’est son droit. Parce que le droit communautaire a organisé ce recours. C’est donc ce recours qui vient d’être formulé.

Qu’adviendra-t-il après ?

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Dans ce cadre, la cour va constater le recours qui est limité à quatre cas d’ouverture. Le premier cas, c’est de voir si l’arbitrage a été rendu sur la base d’une convention d’arbitrage. Elle apprécie  aussi, si  la convention qui est rédigée par les parties.. Et si elle est valable est-ce qu’elle n’a pas expiré. Si une partie estime que la convention d’arbitrage n’est pas valable ou bien a expiré ou n’existe pas, elle a le droit de faire un recours. Deuxième cas : on peut également faire recours en contestation de validité pour justement dire que les arbitres ont outrepassé leur mission. Troisième cas : c’est lorsque les arbitres n’ont pas respecté le principe sacro-saint de la contradiction. Le quatrième cas : c’est lorsqu’il y a eu violation de ce qu’on appelle un ordre public international.

Que fera la cour ainsi perçue de la sentence rendue par l’instance d’arbitrage?

Si l’Etat béninois estime qu’il a des raisons de faire des recours, c’est normal. Et cette fois-ci il va saisir la Ccja en tant que juridiction et non centre d’arbitrage. Et c’est ce qui vient de se passer. Et c’est normal. Maintenant en ce qui concerne la sentence qui a été rendue, c’est une sentence définitive. C’est vrai qu’il y a possibilité de contestation non pas sur le fond de ce qui a été jugé mais sur les éléments que je viens de citer. Par conséquent, la Cour n’a pas à connaître de nouveau des affaires déférées devant les arbitres. Les arbitres ont jugé et définitivement jugé. C’est ça la vérité. Si la Ccja est saisie, ce qu’elle fera, c’est de voir simplement si l’un de ces 4 éléments a été violé. C’est tout. Donc la Ccja qui est saisie es qualité en tant que cour n’a pas à rejuger. Maintenant si la cour estime que l’un  des 4 éléments est violé, elle peut annuler et retourner le dossier au centre d’arbitrage. Si la CCJA annule la sentence, elle peut statuer au fond si les parties en ont fait la demande. C’est ce qu’on appelle l’évocation. Si les parties n’ont pas demandé l’évocation, la procédure est reprise à la requête de la partie la plus diligente à partir, le cas échéant, du dernier acte de l’instance arbitrale reconnu valable par la cour.

Y a-t-il eu débat contradictoire avant la sentence de la Ccja en tant que centre d’arbitrage ?

«Bien sûr. L’Ajt (Agent judiciaire du Trésor), représentant de l’Etat, a produit ses observations non seulement sur la forme mais aussi sur le fond. Le contradictoire a bien été assuré. Puisque l’Etat, par le biais de l’Ajt a bien produit ses observations. Et d’ailleurs, chaque moyen soulevé a fait l’objet d’une réponse par les arbitres.

Dites nous un mot sur l’existence même d’une convention en bonne et due forme. Car nous avons entendu le chef de l’Etat en personne  dire que Talon a «  apporté son contrat ». La convention  entre l’Etat et l’homme d’affaire Talon existe-t-elle vraiment ?

Il faut savoir honorer sa signature. Lorsque vous signez un marché de ce genre dans lequel il est dit que lorsqu’il y a problème entre les parties, on va soumettre le contentieux à arbitrage, ce qu’on appelle en droit une convention d’arbitrage, on ne peut pas venir dire que c’est l’autre qui a apporté son contrat. Est-ce que ceux qui avaient signature pour pouvoir engager l’Etat ont signé ? La réponse ’est oui !

Qu’en est-il du cas de la violation de l’ordre public international ?

Si les autres veulent contester, c’est à eux de démontrer que l’ordre public international a été violé.

Réalisation : Yao Hervé Kingbèwé et Vincent Foly

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