Cena : Sacca Fikara demande à la Cour constitutionnelle d’invalider la procédure

(Il fustige la mise à l’écart des députés non-inscrits) Objet : Recours en inconstitutionnalité de la procédure de présélection des quatre candidats à la CENA opérée par la minorité et la majorité parlementaires et soumise à l’élection du parlement le 20 Mai 2014.

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Monsieur le président,

J’ai  l’honneur de soumettre à la Cour Constitutionnelle par la présente requête un recours contre la procédure de présélection des quatre candidats à la CENA et soumise à l’élection du parlement le 20 Mai 2014 en ce que la procédure concrètement suivie quant à la réalisation des propositions des candidats qui sont censés se faire élire par la majorité et la minorité de l’Assemblée Nationale est inconstitutionnelle.

Les deux premiers alinéas de l’article 19 de la loi N° 2013-06 portant code électorale disposent :

– Alinéa 1 : « la Commission Electorale Nationale Autonome (CENA) est composée de cinq (05) membres désignés par l’Assemblée Nationale.

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– Alinéa 2 : « Ils sont choisis parmi les personnalités reconnues pour leur compétence, leur probité, leur impartialité, leur moralité, leur sens patriotique et désignées à raison de :

• Deux (02) par la majorité parlementaire ;

• Deux (02) par la minorité parlementaire ;

• Un (01) magistrat du siège » par l’Assemblée Générale des magistrats ».

A la plénière de l’Assemblée Nationale du 08 Mai 2014, le rapport de la commission des lois, de l’administration et des droits de l’homme relatif aux modalités de mise en œuvre de cet article 19 du code électorale a été examiné par le parlement.

Suite à cet examen, le président de l’Assemblée Nationale a invité sans précision les composantes de la majorité et de la minorité parlementaires à formuler des propositions de quatre candidats appelés à siéger à la CENA, à raison de deux par la majorité parlementaire et de deux par la minorité parlementaire.

Toutefois, aucune indication n’a été exprimée en ce qui concerne les députés non inscrits.

Ainsi, le problème généré concrètement par l’application qui a été faite de l’article 19 du code électoral concerne la non association des députés non inscrits à la proposition desdits candidats. En effet, seuls les groupes parlementaires se sont concertés dans chacune des deux tendances politiques pour opérer les choix soumis au vote de la plénière du 20 Mai 2014.

Or, les députés non inscrits ne sont pas nécessairement des députés neutres, point de vue dont la lecture est fort limpide dans plusieurs décisions de la Cours Constitutionnelle telles que la décision DCC 01-011 du 12 Janvier 2001, la décision DCC-01-012 du 22 janvier 2001, la décision DCC  09-015 du 19 Février 2009, la décision DCC 09-057 du 21 Avril 2009.

Dans sa décision DCC 01-011 du 12 Janvier 2001, la Cour a défini la notion de configuration politique en précisant qu’elle doit s’entendre comme l’ensemble des forces politiques représentées à Assemblée Nationale et organisées en groupes parlementaires et /ou en non inscrit.

Dans les motifs qui ont sous-tendu une décision en date de 08 Janvier 2008 rendu par la Cour, il a été rappelé que : « Considérant que le peuple Béninois, par sa constitution du 11 Décembre 1990, a affirmé solennellement sa détermination de créer un Etat de droit et de démocratie pluraliste, dans lequel les droits fondamentaux de l’homme, les libertés publiques, la dignité de la personne humaine et la justice sont garantis, protégés et promus ; que cette démocratie pluraliste suppose, entre autres, la garantie des droits de la minorité et la participation de tous à la gestion des affaires publiques ».

Dans ses décisions  DCC 00-78 du 07 Décembre 2000 et DCC 01-011 du 12 Janvier 2001 relatives aux modalités de désignation par les députés, « … la Cour a dit et jugé qu’il faut tenir compte de la configuration politique pour assurer la participation de toutes les forces politiques représentées à l’Assemblée Nationale et pour garantir la transparence, principe à valeur  constitutionnelle… »

Par ailleurs, dans sa décision DCC 09-016 du 17 février 2009, la cour a affirmé que «la garantie des droits de la minorité doit se traduire au parlement par le respect de sa configuration politique…»

Sur le fondement de ces considérations, la Cour a approuvé dans sa décision DCC 09-002 du 08 Janvier 2009 relative à la procédure de désignation de six (06) députés devant siéger à la Haute Cour de justice, la commission des lois, de l’administration et des droits de l’homme, lorsqu’elle a défini  le principe à valeur constitutionnelle de la représentation majorité/minorité et a dégagé trois tendances en se fondant sur une « récapitulation par affinité des forces politiques en présence à l’hémicycle :

– Tendance majoritaire

– Tendance minoritaire

– Non inscrits

Considérant que la Cour a affirmé dans sa décision DCC 09-015 du 19 Février 2009 que « la commission des lois de l’administration et des droits de l’homme, est le seul organe interne de l’Assemblée nationale compétent pour proposer et, en cas de nécessité, indiquer à l’Assemblée Nationale toutes explications et orientations en matière juridique, en présentant un rapport. Qu’en se conformant à la décision de la Cour, elle a mis en œuvre et fait une bonne application du principe de représentation proportionnelle majorité /minorité », c’est-à-dire avoir pris en compte trois tendances (majorité/minorité/non inscrits).

Ainsi, de façon constante, que ce soit en considérant la configuration politique de l’Assemblée Nationale ou en se référant à la notion majorité, minorité, les non inscrits ont été toujours pris en compte.

Sur la base de tout ce qui précède et en application de l’article 114 de la constitution qui précise que « la Cour Constitutionnelle est l’organe régulateur du fonctionnement des institutions et de l’activité des pouvoirs  publics »,

Et en application de l’autorité de la chose jugée, en l’occurrence celle issue  de la décision DCC 09-015 du 19 Février 2009 par laquelle la Cour a jugé conforme à la constitution la prise en compte des trois tendances majorité, minorité,  non inscrits nous sollicitons la Cour pour déclarer inconstitutionnels les choix des quatre candidats à la CENA opérés à l’Assemblée Nationale le 20 Mai 2014.

Pour rappel, le rapport de la commission des lois, qui a été examiné par l’Assemblée Nationale le 08 Mai 2014, a été élaboré le 27 Décembre 2013 ; ledit rapport indexait huit groupes parlementaires et trois non inscrits. Si les propositions de candidatures des membres de la CENA  étaient intervenues immédiatement, la minorité aurait été prise en compte avec trois groupes parlementaires ; or le groupe parlementaire « cohésion nationale et paix » a disparu entre temps. On sait qu’au moins huit des nouveaux non inscrits issus de cet ex –groupe parlementaire ont des prises de position de tendance minoritaire et, pour cette raison devraient être normalement associé à la concertation minoritaire. En réalité, la tendance minoritaire étant la plus dense des non inscrits, tous les non inscrits devraient participer ès-qualité à la consultation pour la proposition des deux candidats de la minorité, tendance parlementaire qui seraient composée des groupes parlementaires PRD, Union fait la Nation et des douze députés non inscrits.

Considérant que selon l’article 124 de la constitution, (…les décisions de la Cour constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours. Elles s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités civiles, militaires et juridictionnelles… »

Considérant que dans sa décision DCC 09-057 du 21 Avril 2009, la Cour à décidé :

– en son article 1er  que le schéma proposé par la commission des lois, de l’administration et des droits de l’homme pour la désignation des députés « … n’est pas contraire à la constitution ni aux décisions de la Cours Constitutionnelle… » ;

– que ce schéma qui a défini la notion de majorité, minorité en trois tendances : majorité, minorité  non inscrits est donc la seule qui doit être retenue, ayant déjà été déclaré conforme à la constitution par la Cour Constitutionnelle ;

De toute évidence, le code électoral qui a prévu les deux tendances à prendre en considération (majorité, minorité) ne peut exclure les non inscrits dont la prise en compte a été constamment affirmée par la Cour Constitutionnelle.

Ce qui est inconstitutionnel, c’est le fait que les non inscrits n’aient pas été impliqués, ni dans la majorité, ni dans la minorité. Alors que statistiquement, la jurisprudence de la Cour a toujours radicalement et proportionnellement pris en compte les députés non inscrits de façon globale. A titre illustratif, la Cour a toujours veillé dans de nombreuses décisions à ce que les députés non inscrits soient, en principe, pris en compte globalement concernant la représentation du parlement à la haute Cour de justice, dans les parlements régionaux, pour la désignation par l’Assemblée Nationale des membres de la CENA et de ses anciens démembrements etc. La proportion générale minoritaire des non inscrits détermine évidemment leur degré d’impact sur ce qui peut leur être attribué.

Il y a donc lieu de réaffirmer le principe qui a prévalu jusque là au niveau de la Cour en décidant de l’inconstitutionnalité de l’exclusion tacite des non inscrits de la procédure de présélection des candidats à la CENA et du non respect de la jurisprudence constante de la Cour Constitutionnelle en violation de l’article 124 de la constitution du 11 Décembre 1990.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de ma très haute et parfaite considération.

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