Soudan : rendez-nous Meriam et son bébé!

(Meriam, une Soudanaise accouche en prison) Rendez-nous Meriam et son bébé ! Libérez Meriam et son BB ! Parce que la place d’une parturiente n’est pas en prison. Encore moins, celle d’un nouveau-né. Au Soudan, une femme médecin, je dis bien médecin, a été condamnée à mort, pour avoir soi-disant renié l’islam, alors que depuis l’âge de cinq ans, son père était parti.

Publicité

 Parti où, comment, on n’en dit rien. Meriam Ibrahim a grandi dans la foi chrétienne, élevée par sa mère qui est chrétienne. Sur la toile, on apprend qu’elle aurait passé les quatre derniers mois, enchaînée au sous sol d’une prison. Quelle barbarie ! Le mardi 27 mai, son bébé est né, et serait en bonne santé. Une jolie petite fille née dans une aile de l’hôpital d’Ondurman. Selon son avocat, « cette naissance est une bonne nouvelle par rapport à l’épreuve terrible que Meriam a pu vivre. J’ai l’intention de lui rendre visite aujourd’hui avec son mari Daniel. Je pense qu’ils vont appeler le bébé Maya».

Soudan : condamnée à mort pour apostasie, Meriam Yahia Ibrahim Ishag accouche en prison

Le crime de Meriam, c’est d’épouser Daniel un chrétien, alors qu’elle s’appelle Meriam et serait à l’origine de religion musulmane. Or, depuis sa plus tendre enfance, elle n’a connu que la foi chrétienne. Aujourd’hui, ceux-là qui au nom de leur foi, de leur dieu suprême détiennent le droit de vie et de mort sur tous leurs compatriotes, ont décidé de lui appliquer la charia. Elle recevra 100 coups de fouet, avant d’être exécutée. Après le jugement, un juge de la charia islamique a maintenu qu’elle pouvait être épargnée de pendaison, seulement si elle renonçait publiquement à sa foi chrétienne, pour redevenir musulmane. Ce que Meriam a refusé catégoriquement, assurant qu’elle préférait mourir, avant son accouchement.

Les violences faites aux femmes

Pourquoi faut-il que ce soit toujours les femmes, de par le monde qui soient victimes de tant de maux ? Tant d’injustices ? Tant de violences en tous genres ? De souffrances ? De douleurs ? Il fallait écouter l’émission « Priorité Santé » du mercredi 28mai,  où des femmes africaines, provenant pour la plupart de pays sahéliens d’Afrique de l’Ouest, Sénégal, Burkina Faso, Mali, victimes d’excision apportaient leur témoignage, en direct sur RFI. C’était poignant : certaines ont été excisées bébé à trois mois.. Quelle cruauté ! Et comme l’a confessé une femme, Mimi, elle s’appelle : «  Moi –même personnellement, je ne me rappelle pas de ça ; mais mon corps s’en souvient toujours ». Sans avoir été victime de ce crime, je me sens complètement submergée par leurs tourments physiques et psychologiques, car ces femmes ne sont que des victimes expiatoires de l’obscurantisme dans laquelle baignent les mâles dans nos sociétés africaines. Ils refusent que nous femmes évoluions au même rythme qu’eux. Tant qu’on peut nous garder au fond des cases enfumées de maris polygames, comme l’a dénoncé un personnage de Sous l’Orage, Birama ! On me dira mais ce sont les femmes, les vieilles femmes qui pratiquent l’excision. Eh oui ! je n’en disconviens pas. Mais, c’est parce que les hommes qui vivent dans les pays où l’excision se pratique à haute intensité, refusent d’épouser des femmes non excisées – parce qu’elles ne seraient pas pures – que les vieilles femmes, gardiennes du temple, se font le devoir de les « rendre pures », en ôtant de leur corps, cet organe qui les souille, le clitoris. Celles qui ont la chance de le remettre en place n’hésitent pas une minute à le faire. Pour redevenir femme à part entière. Et vivre une vie de couple épanouie. Aujourd’hui, ce ne sont plus les Occidentaux qui se battent contre ce phénomène qui dévalorise la femme africaine, ce sont les Africaines elles-mêmes. Elles en ont marre de subir dans leur vie de femmes, les aléas de cette pratique, à savoir : polygamie, frustrations et douleurs durant les rapports sexuels, jusqu’au décès en couches.

Publicité

Qu’avons-nous fait pour mériter tout ça?

Au Pakistan, à Lahore, une femme enceinte de trois mois a été lapidée ce mardi 27 mai, à coups de briques devant le tribunal où elle devait comparaître, pour avoir contracté une union avec un jeune agriculteur, contre l’avis de sa famille. A son arrivée, père, frères, cousins, « une trentaine de mâles ont lavé l’honneur de la famille en assassinant froidement la jeune femme de vingt-cinq ans, lapidée à coups de briques ! ». Seigneur Jésus ! Ceci devant les forces de l’ordre qui n’ont pas levé le petit doigt. Où va notre monde ? Ce monde dirigé par les hommes, pour les hommes, qui décident de nos vies. En Inde, ce même mardi, deux adolescentes de 14 et 15 ans ont été retrouvées pendues, parce qu’elles avaient subi un viol collectif. Cinq hommes, cinq adultes se sont acharnées sur ces petites filles pour assouvir leurs instincts de bêtes, d’animaux sauvages. Comme quelqu’un l’a écrit sur la toile : » Les Indiens ont quand même  des problèmes avec le sexe ». Et celui qui ajoute que « c’est une société de bêtes sauvages », n’a-t-il pas raison, lorsqu’un conseil des Anciens décide comme sanction, de livrer leur fille pour un viol collectif, parce qu’elle a épousé un musulman? Malgré les efforts de ce pays pour changer les comportements, malgré le durcissement de la loi après le viol en réunion de l’étudiante à Delhi en 2012 – un événement qui avait choqué le monde entier – les femmes ne sont toujours pas épargnées par ce phénomène, le viol collectif. C’est en début de cette année 2014, que ce Conseil des Anciens a décidé comme punition dans un village reculé du Bengale d’offrir la pauvre femme à un viol en réunion, pour la punir d’avoir épousé ce musulman. Tant que dans notre monde moderne, l’impunité règnera, le sort des femmes demeurera inchangé partout. Peu importe les saupoudrages qui se feront par-ci, par là. Ceci ne règlera aucun problème sociétal. On constate généralement que toutes les lois sont créées d’abord pour renforcer la suprématie masculine ; pour leurs intérêts, quitte à ce qu’ils se retrouvent pris à leur propre piège. Ce qui se passe depuis quelques semaines au parlement est édifiant. Les magistrats sont-ils si immatures pour qu’ils ne puissent choisir une femme pour les représenter partout où ils doivent jouer leur partition ? A force de tout accaparer et de ne pas tenir compte du genre féminin que Dieu a mis à leurs côtés, pour atténuer quelque peu leur boulimie du pouvoir, de l’argent, des privilèges, des honneurs, eh bien ! les hommes se retrouvent dans toutes les institutions nationales et internationales entre eux, en train de se détruire mutuellement, de détruire les valeurs séculaires qui ont toujours guidé nos sociétés, et retarder l’évolution de nos pays qui ont tant d’urgences à régler. Au lieu de donner aux femmes la place réelle qui leur revient de droit, on argüe du fait que chaque femme n’a qu’à se battre pour arracher sa place dans la société, ou dans une sphère de décision. Avec quelles armes ? De quels moyens disposons-nous, quand ils ont fait de l’argent et des magouilles les rois de la cité ? Aminata Sall, une dame qui n’a plus rien à prouver au niveau de son parti a dû retirer sa candidature de SG du Parti socialiste parce que… j’imagine, une femme, simplement une femme ne peut représenter un parti tel le Parti Socialiste aux yeux des Sénégalais. Tous des machos, nos hommes !   Des élus du peuple, osent déclarer du haut de leur mandat, qu’ils n’ont pas assez de filles scolarisées dans leurs villages, pour voter une loi sur la parité au Bénin. Pourquoi tout ramener à soi ? Est-ce à dire que le mot Nation ne prendra jamais son importance dans l’esprit de nos compatriotes ?

Pourvu qu’on n’en arrive pas au sort fait par ces juges de la charia islamique à Meriam. Puisque chez nous aussi, ce sont les hommes qui sont partout, et décident de tout. Sinon comprendre qu’on vote la loi électorale et qu’à chaque CENA, on ne s’émeut guère qu’une femme, même pas une seule ne figure parmi les membres de cette institution. Devenue pérenne (l’actuelle sera permanente durant 7 ans), nos hommes pourraient nous laisser sur le quai de la gare, sans état d’âme. L’histoire jugera, qu’au pays des amazones, les luttes de nos vaillantes grands-mères n’ont pas servi à nous libérer et gagner encore plus de droits, plus de places. Avez-vous suivi l’émission d’Alain Fokart sur RFI sur la place des femmes béninoises dans les instances de décision au Bénin. Malgré sa volonté de défendre nos autorités sur ce plan, Mme la ministre de l’agriculture, Fatoumatou A. DJIBRIL a dû reconnaître comme ses sœurs Léontine IDOHOU et Geneviève NADJO que nous sommes en net recul. J’avoue que l’Amazone ne pouvait lever la tête face aux quolibets de mes amis étrangers. Et pourtant le chef de l’Etat nous avait promis des lendemains qui chantent. L’échéance de 2016 est bientôt là. Ce qu’on oublie, c’est que nous évoluons dans un monde qui aujourd’hui est devenu un village planétaire. Et, ça bouge partout au niveau institutionnel, pour améliorer le sort  des femmes, afin qu’elles jouent leur partition  au niveau du développement de leur pays. Nous, femmes béninoises sommes les dernières dans la sous- région ;  ainsi soit-il de la part de nos mâles. Ca n’émeut personne ; il n’y a de toute façon aucune volonté politique pour améliorer les choses. On ne pense qu’à tout contrôler, tout diriger pour asseoir la puissance masculine. Un monde de machos, voilà la république où Dieu m’a fait naître, hélas ! Chaque jour que Dieu fait, je me réveille en me demandant à quand la fin.

L’espoir est pourtant permis

Simone de Beauvoir a écrit dans son ouvrage, Le Deuxième Sexe que, » C’est par le travail que les femmes arriveront à franchir la distance qui les sépare des hommes ». Grâce à la gratuité de l’école au Bénin, la scolarisation des filles a connu un boom – je remercie les autorités passées et actuelles qui ont toutes œuvré pour ce progrès. Et je viens partager avec mes compatriotes la surprise agréable que j’ai eu de constater lors des inspections initiées par l’Ecole normale supérieure pour les cohortes d’enseignants reversés au secondaire, du Nord au Sud, les filles dépassent parfois les effectifs masculins dans les classes. Plus agréable est ma joie de compter 32 filles et 36 garçons en première année de Lettres modernes des élèves professeurs de l’ENS. D’ici quelques temps, les hommes ne pourront plus argüer du faible taux de scolarité des filles pour continuer de nous priver de cette parité déjà mise en œuvre sous beaucoup de cieux.

Ainsi, si nous avons assez de femmes aux postes de décision, jamais aucune de nos filles ne subira le sort de Meriam. Comme l’a si bien dit Sheryl SANDBEG dans son ouvrage, « En Avant Toutes », « Plus il y aura de femmes à s’entraider, plus nous aiderons notre cause ». Et Christine Lagarde de proposer la solution à nos décideurs en déclarant dans la préface du même ouvrage : « Il est important d’avoir des femmes aux postes de décisions, car elles aident à faire progresser le débat, et à créer la dynamique qui garantira une dynamique, un traitement plus juste à l’ensemble des femmes ». Les religions également doivent y contribuer. Sans vouloir faire le procès des religions, il faut reconnaître leur rôle dans le processus de socialisation de l’être et dans la pacification de la société. Toute religion qui ne contribue pas à l’épanouissement de l’être, qui ne contribue pas à la paix dans la société, dans le monde, reconnaissons-le est nuisible. Aucun Dieu ne demande de retenir une femme enceinte enchaînée dans une prison. Et mieux, le Coran ne force pas les non musulmans à renier leur religion. Meriam n’a jamais été musulmane. Même si elle est le produit du germe d’un musulman. Et c’est pourquoi, le vaste mouvement né contre la folie dévastatrice de Boko Haram et qui a mobilisé le monde entier, doit également se mettre en place, pour exiger sa libération. Comme le fait déjà Amnesty International “ Libérez Meriam!”.

Que font les Associations des droits de l’homme?

Où sont passées les Associations des droits de l’homme? Que disent les Imams éclairés qui prônent un islam pacifique, modéré et progressiste qui va dans le sens du dialogue des religions et des cultures ? Que disent-ils de toutes ces barbaries qui s’opèrent contre les femmes à travers le monde ?  C’est important qu’ils éduquent leurs fidèles à travers leurs prêches, – beaucoup le font j’en suis sûre – parce que les bombes des extrémistes ne choisissent pas leurs cibles. Pourquoi garder une mère et son BB en prison ? Sommes-nous retournés au Moyen-âge ? A l’ère des fours crématoires ? Et nous autres, peuples libres du monde entier, avons-nous le droit de faire comme si de rien n’était ? Rendez-nous Meriam et son BB! Pour l’amour de Dieu! La place d’un bébé n’est pas en prison ! Bring back Meriam and his Baby! Tant que nos sociétés africaines et sous-développées n’accorderont aucune valeur à l’autre genre (féminin), jamais nous n’atteindrons les OMD. On ne peut laisser sur le quai de la barbarie, des viols collectifs, et du saupoudrage institutionnel, plus de la moitié de sa population et gagner le défi du développement. Il est urgent de se battre pour « Libérer Meriam ».

Adélaïde FASSINOU ALLAGBADA, Ecrivain

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Publicité