Droit de grève des magistrats : comment Débourou et Cie se trompent de pays et d’époque

A l’étape ou nous sommes dans la remise en cause des libertés démocratiques chèrement acquises par les Béninois depuis la promulgation de la Constitution du 11 Décembre 1990, il appartient à chaque citoyen de notre pays de choisir de participer à l’entreprise de liquidation de la démocratie ou de choisir ses moyens de lutte. 

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En ce qui me concerne, j’ai fait le choix de m’exprimer ouvertement contre l’imposture et le recul des valeurs que progressivement nous avons décidé de promouvoir pour hisser notre pays au rang des grandes nations.

Il ne sera donc pas question pour moi d’assister passif, aux agissements d’un groupe de personnes soit disant Députes qui œuvrent depuis quelques années au démantèlement, des pans entiers des acquis de notre démocratie. Se cachant derrière un rideau régionaliste, les mêmes depuis quelques années, trouvent à leur côté certains de la partie méridionale dont le Président a déjà dit qu’il va s’occuper du ventre. Ceux-là ont choisi de mettre le peuple à genoux pour satisfaire à leur appétit glouton et surtout d’aller palper ,comme l’Honorable Candide Azannai l’a dit , les  deniers  en espèces trébuchantes que dilapident les tenants du pouvoir pour acheter des lois, y compris le vote d’un budget, c’est encore un députe qui l’a déclaré.

Débourou et ses compagnons vivent-ils au Benin?

La question mérite d’être posée. S’ils vivent aux Benin, ils sont donc loin des réalités que vivent les justiciables dont ils se réclament les défenseurs ou ils se sont bandés les yeux et bouchés les oreilles. Non, ces députés sont au service d’une cause: l’asservissement d’une région au profit d’une autre par des prétendues réformes dans le seul dessein de restreindre les libertés et de permettre a leur mentor de poursuivre son œuvre de prédation des libertés et de destruction de l’édifice démocratique. S’ils étaient bien imprégnés de ce qui se passe dans notre pays, Débourou et ses compagnons auraient bien saisi les vraies causes des mouvements répétés de grève dans l’administration moribonde du Bénin, et dont les  magistrats ne constituent que la partie la plus visible. Est-il normal que dans notre pays, la gouvernance se résume à la prise de loi contre telle ou telle structure ou tel ou tel corps d’Etat? Il faut sortir de cette logique et chercher les vraies causes des mouvements d’humeur des hauts fonctionnaires d’Etat.

Le vers est dans le fruit

Qui dans notre pays, citoyen honnête, patriote et objectif ne comprend pas la position des magistrats? Le vrai débat est que le Président Boni Yayi a des problèmes personnels avec la justice. Mieux, le Président Boni Yayi n’a jamais compris comment fonctionne un Etat démocratique. Il n’en comprend ni les fondements, ni les principes, notamment la séparation des pouvoirs. Dans ses discours transparaît souvent cette ignorance inquiétante des ressorts du fonctionnement d’un Etat de droit. Tenez, lors de la récente interview qu’il a accordée au journaliste de RFI Christophe Boibouviers, le Président a déclaré répondant à la question sur la lutte contre la corruption dans son pays, qu’il a demandé la levée de l’immunité parlementaire de cinq de ses anciens Ministres. De telles déclarations qui jalonnent le discours présidentiel illustrent à souhait la méconnaissance inquiétante du fonctionnement des institutions et des mécanismes de l’Etat de droit. Le Président Boni Yayi aux dires de certains anciens Gardes des Sceaux, n’a jamais voulu respecter les procédures judiciaires dans notre pays, d’ou sa volonté permanente d’instrumentaliser le pouvoir judiciaire et de porter atteinte a l’indépendance de la justice. L’arrestation de l’homme d’affaires Séfou Fagbohoun qui a été incarcéré deux ans durant sans procès et à qui le Chef de l’Etat a présenté des excuses par la suite en est la preuve patente. Les cas sont nombreux de personnalités maintenues en prison par la seule volonté du Prince, alors que la justice a déjà ordonné leur élargissement et on ne s’étendra pas sur chaque cas ici. Georges Constant Amoussou, ancien Procureur de la République croupit toujours dans les geôles sans procès depuis 2010, qu’en disent Débourou et ses amis? Et quid du Député Désiré Vodonou élargi depuis des mois par la justice et maintenu en prison? Qu’en pensent Débourou et ses complices? Y a t-il jamais sur cette liste non exhaustive un seul fils de la partie septentrionale de notre pays? Qu’on cesse de nous distraire avec des actes de violence gratuite contre la conscience de paisibles cadres de ce pays qui ne veulent que servir en toute dignité. De quelles réformes parle-t-on? Ceux qui en parlent savent-ils comment se préparent et se conduisent les réformes? Combien ont-ils déjà conduit à terme sans violer la conscience des corps d’Etat et des citoyens?

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Qu’on sache raison garder

Que ceux qui pensent devoir servir un homme en foulant aux pieds les valeurs de démocratie se ravisent car la roue de l’histoire tourne et tournera toujours comme le répète un célèbre responsable syndical de notre pays. Comme l’a indiqué l’avocat Charles Badou sur le plateau d’une chaîne de télévision privée de notre pays, au nom de quelle logique prend-on la défense aveugle de prétendus justiciables qui seraient lésés par des mouvements de grève des magistrats alors qu’on passe par perte et profit le délestage que vivent quotidiennement les populations et qui parfois leur ôte la vie sur les tables d’interventions chirurgicales? Débourou et ses complices devraient s’intéresser à ces problèmes et laisser les paisibles et honnêtes cadres de ce pays respirer. En l’occurrence, ceux qui ont choisi la voie de l’intégrité, de la dignité et de l’honneur doivent respirer et se sentir à l’aise pour faire le travail pour lequel ils ont été formés. Où étaient Débourou et ses complices quand le Juge Angelo Houssou qui a rendu des ordonnances en son âme et conscience a été pris en otage et persécuté jusqu’à l’exil? Quel sens et contenu donnent-ils à la justice? Quelle est leur vision du pouvoir judiciaire? Ils doivent savoir raison garder.

La question de fond est celle de savoir bien gouverner un pays

Nous avons connu des Chefs d’Etat dans ce pays et aucun d’eux n’a porté atteinte à la vie et au fonctionnement de la justice, pilier sacré de la démocratie. Ce qui est actuellement en cause est un style de gouvernance, fait d’attaque systématique des institutions, de volonté d’instrumentalisation et d’assujettissement ou de sabordage les institutions de la République. Les Magistrats ont dit non à cette façon de gouverner, ils ont raison et tous les citoyens épris de justice, de paix et de progrès doivent les soutenir en se dressant contre les abus et autres tentatives de contrôler des institutions qui dans l’essence de la Constitution ont été conçues pour servir de contre-pouvoir.

Les revendications des Magistrats n’ont pas une grande incidence financière et ne constituent en aucune manière une exagération. Ils veulent que les choses soient faites dans les règles de l’art, dans le respect des textes et que l’Etat dont les responsables se sont révélés de pures menaces pour la sécurité de certains d’entre eux prenne des dispositions pour les protéger. Ceux d’entre eux qui ont joué avec le feu n’en ont-ils pas eu pour leur compte?

Le Député-adepte de pugilat en plein hémicycle est certainement loin d’être le modèle face au citoyen lambda, à plus forte raison face aux Magistrats contre lesquels  il veut légiférer pour restreindre les libertés sous le prétexte fallacieux de défense des citoyens incarcérés. Qui veut tromper qui?  

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