Dieu se fâche-t-il ou ce sont les hommes qui deviennent fous ?

Dans le seul mois de juillet, il y eut trois « crash » d’avions, un par vieux continent : Europe, Asie et Afrique ; avec 461 victimes. L’intellectuel que je suis se croit définitivement guéri de la pensée magique ou théosophique. Mais quand même ! Dieu le Tout-Puissant ne pouvait-il pas épargner ces vies innocentes ? Empêcher que se produisent ces drames poignants, les disparitions de familles entières (pères, mères et enfants) ? 

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Le prophétisme de la religion hébraïque dans sa phase deutéronomiste, sacerdotale ou messianique, était basé sur cette problématique : comment faire pour ne plus offenser Dieu, le mettre en colère et en retour subir les conséquences de son courroux ? En effet, la question la plus difficile dans la théologie monothéiste ou dans les croyances polythéistes est l’origine des drames et des malheurs dans le monde. Beaucoup de personnes en ont perdu leur foi : si Dieu ne peut pas empêcher de tels drames et les morts d’innocents, alors il ne sert à rien et nous pouvons nous passer de lui. Erreur ! Aucune religion ne peut, malgré toutes ses casuistiques philosophiques ou théologiques, épuiser tout le mystère de Dieu. Certes, Il nous a révélé un petit bout de son Etre, mais ll demeure au-delà de la vérité du philosophe ou du savant (nougbo), un ineffable mystère (Noudjiou).

Alors, pourquoi le prie-t-on, si apparemment ces prières n’empêchent pas sa Seigneurie de faire jouer librement contre nous les lois de la nature (phusis selon Aristote) ? La religion hébraïque de la première période prophétique qui débuta avec la fin du royaume d’Israël ravagé par les Assyriens, opéra une profonde réforme tant liturgique que théologique de l’hébraïsme avec ce seul leitmotiv : Dieu s’est détourné de nous parce que nous nous sommes détournés de ses commandements. Or, ce profond sursaut connu sous le terme de la tradition deutéronomiste, n’a pas empêché la ruine de Jérusalem, la destruction du Temple et la déportation de toute l’élite hébreuse en Babylone par Nabuchodonosor. Ici aussi les grands prophètes comme Isaïe, Jérémie et Ezéchiel, non seulement imputent le courroux divin aux actes mécréants des Hébreux, mais il s’en développa une profonde espérance. C’est le judaïsme, reforme dite de la période sacerdotale où le peuple juif cette fois, ne se découragea guère de Dieu. Cette espérance dans son contenu messianique aboutira à la religion chrétienne. Conclusion : malgré tout, l’homme ne se détachera jamais de Dieu ou de ses dieux. C’est là un mystère né de son drame existentiel : il y a toujours eu et il y aura toujours partout et en tout lieu l’adoration divine. Les hommes se référeront toujours, malgré leurs malheurs et surtout à cause d’eux, à cet Etre transcendant que les Hébreux furent les premiers dans l’humanité à percevoir comme unique, d’abord pour eux-mêmes (leur dieu à eux, c’est IAHVE), puis pour tout l’univers (ELOHIM). Aussi, aucune religion n’épuise-t-elle jamais malgré sa richesse liturgique et doctrinale, la soif de spiritualité de l’homme. On voit donc la bêtise, je dirais même la sottise, de tout sectarisme fanatique. Que de soi-disant musulmans en arrivent à massacrer des Chrétiens pour la raison idiote qu’ils sont des païens polythéistes, voilà une véritable pathologie mentale.

Je crois certes à la Révélation plus ou moins à l’œuvre dans toute religion, mais aucune ne peut saisir comme dans une poignée de main toute l’étendue de la magnificence divine. Inutile de nous entre-tuer pour lui ou à cause de lui. A ce niveau, se pose la question de l’islamisme, un casse-tête pour tous ceux qui ont pour motivation d’œuvrer au dialogue interreligieux. Une erreur anthropologique et méthodologique consisterait à opérer un clivage schizophrénique entre l’islam soi-disant religion de paix et de tolérance, et l’islamisme. Non ! L’islamisme est le fourreau socioculturel de la religion islamique qui malheureusement s’est arrêtée à la période élohimiste des hébreux, expression d’une conception totalitaire, sectaire et nationaliste de la Transcendance divine. De même que chez les Hébreux de cette période, il n’y avait qu’un seul Seigneur Dieu, Créateur de l’univers qui s’est révélé à un peuple élu qui a exclu les autres pour paganisme et qui ne méritent sa tolérance qu’en se convertissant, de même pour l’islam, Allah est le seul Dieu et Mohamed son seul prophète ; toutes les autres religions sont des aberrations polythéistes et il est du devoir de tout musulman de sauver ces infidèles de la perdition en les convertissant de gré ou de force à l’islam ! Il est vrai que l’impérialisme occidental, en créant les bases d’une exploitation capitaliste de toutes les nations arabo-islamiques, est venu renforcer les rêves de renaissance et de revanche des descendants des empires arabe et ottoman poussés au déclin et à l’assujettissement par la loi d’airain du capital impérialiste. La condition sine qua non de tout « dialogue » avec l’islam est d’abord d’avoir à l’esprit que de par son histoire, il porte les germes du fanatisme islamiste dans toutes ses variantes, réformiste, djihadiste ou terroriste.

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Dénis AMOUSSOU-YEYE
Professeur associé à l’UAC

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