Occident – Afrique : le franc-parler américain tranche avec le cynisme européen

On a adressé une lettre au Président des Etats-Unis pour lui soumettre des problèmes de politique interne du Bénin. Si c’était Dieu qu’on sollicitait ainsi à travers moult prières, on comprendrait mieux : pour les nombreux croyants de notre pays, ces prières pourraient avoir une certaine efficacité, mais Barack OBAMA ? Vous plaisantez ? 

Publicité

Malgré nos jeunes années de militantisme anti-impérialiste dont les Etats-Unis étaient la cible privilégiée parce que pour nous le symbole de l’impérialisme occidental, certains d’entre nous demeurent néo-colonisés comme devant. Que diantre avons-nous besoin d’écrire à Barack OBAMA ?  Grands dieux, pour lui dire quoi ? De venir à notre secours pour nous arracher des griffes du « tyran » ? Oyez !  «Au secours ! Au secours ! On complote contre nous  en vue d’un troisième mandat ! » Débile, pour parler comme l’autre ! Ne retombons pas dans une négritude naïve ; Barack OBAMA, un Américain avant tout, de surcroît le Président des Etats-Unis, ne peut appliquer que la politique américaine : défendre le capital impérialiste occidental dont le fer de lance est le bloc agressif de l’OTAN. Chers concitoyens ! Cessons de nous faire peur ou de nous défouler dans des sorties ubuesques. En un mot, cessons nos hoquets de roquets. Beaucoup de bruits pour rien ! Parce que Boni YAYI est un homme, et comme tout homme il est habité par le désir d’éternité. Voudrait-il bien d’un troisième mandat ? C’est son problème, comme c’est le mien de vouloir être le prochain Président de la République ! Mais ni lui, ni moi, n’avons aucune chance de réaliser nos rêves. Et pour cause ! Faute de culture institutionnelle, nous ne mesurons pas assez les conséquences draconiennes d’une décision de notre Cour Constitutionnelle. Excipant de prétendues options fondamentales de la Conférence Nationale, elle a fait mettre dans la loi organique sur le referendum ceci : «Désormais tout  projet de révision ne peut concerner l’article 42 relatif au nombre de mandats et l’article 44 sur la limitation d’âge ». Je m’étais en son temps élevé contre cette décision, comme auparavant celle relative au consensus national, principe à valeur constitutionnelle ; mais la cause est entendue. Personne ne peut dans le contexte actuel de chez nous, mettre en chantier un projet de referendum sur les articles suscités sans rencontrer la fin de non–recevoir et les farouches résistances de toutes nos institutions, à commence par la Cour Constitutionnelle elle-même, et de tous les Béninois ! Alors, il n’y a vraiment pas matière à glander, ni à branler, excusez la cruauté du langage. Economisons nos énergies pour autre chose. D’ailleurs Barack OBAMA sait que le Chef de l’Etat béninois ne fait pas partie de l’aréopage auquel il s’adresse. Les Mahis disent souvent : « si  tu t’adressais vraiment à moi, tu m’aurais touché ! » Boni YAYI n’était pas concerné ; ceux auxquels s’adressaient les diatribes du premier Président noir des Etats-Unis, ceux qu’il touchait, qui dès lors se sentaient morveux, ceux-là se sont mouchés ; et même bruyamment ! C’est être en dessous de la vérité que de dire que beaucoup de nos chefs d’Etat africains, surtout ceux qui sont les piliers de la Françafrique, ont été surpris et déstabilisés par les objurgations des missi dominici de l’Administration américaine. Mais non, des fois ? C’est à nous que ceux-là s’adressent ? On ne nous parle pas comme ça ! Il faut nous ménager, au besoin même par ces circonlocutions hypocrites et cyniques que nous apprécions tant !  Nous sommes des Présidents négro-africains, quand même ! N’avez-vous pas peur que  faisant ce que vous faites, nous pourrions vous taxer de racistes ? Rien n’y fit. Alors, Blaise COMPAORE sortant du jeu des ronds de jambes diplomatiques et du langage courtois, a du dire crûment ce qu’il avait sur le cœur et qu’il avait du mal à digérer, que dis-je à avaler.  Après 27 ans d’un pouvoir qu’il avait pris de force par un coup d’Etat sanglant, le Président du Faso a le toupet d’exciper de prétendues différences socio-anthropologiques du Burkina Faso pour justifier son désir de perpétuer son despotisme : « Il faut des hommes forts (dont lui) pour avoir des institutions fortes ! »  C’est aux Européens qu’il peut servir cette salade ; ces anciens colonialistes en effet, sont tiraillés par un racisme rémanent qui solidifie en eux une mauvaise conscience les empêchant de refuser avec force de telles sottises néo-culturalistes : le Négro–africain serait une sous-espèce à part de l’espèce homo sapiens sapiens ! Si la démocratie et les droits de l’homme sont valables pour les Caucasiens, crénom de nom, pourquoi ne le seraient-ils pas pour les « Jaunes » et les « Noirs » ? Au nom de tels sophismes et autres balivernes, on a permis à l’orée de l’indépendance, à des dictateurs aux petits pieds, d’imposer à leurs peuples le parti unique. Seul le despote éclairé du Sénégal, le poète-président Léopold SEDAR SENGHOR, a compris qu’il lui fallait céder le pouvoir après 20 ans, et ouvrir son pays au multipartisme. Ailleurs, cela a fini par des coups d’Etat sanglants ou des guerres civiles fratricides à la mort du despote ; comme en Côte d’Ivoire, en Libye et au Congo-Kinshasa.     

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Publicité