Vote du budget 2015 : les vraies raisons du vote massif des députés

(Comment le contexte politique a facilité les choses à Koutché) Contrairement à l’an dernier, ce mardi, les députés ont adopté par une large majorité le budget général de l’Etat, gestion 2015. Ce quasi plébiscite qui intervient après le rejet du budget précédent par les mêmes personnes pourraient s’expliquer par trois raisons fondamentales : le contexte politique, la qualité du document présenté et l’aura de l’actuel ministre des Finances. 

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Vote du budget général de l’Etat 2015 par 75 députés sur 83 que compte l’Assemblée nationale. Aucune voix contre et une seule abstention. Au plan national, c’est la grosse surprise de cette fin d’année 2014. Très peu d’observateurs de la vie publique béninoise s’y attendaient. Et pourtant, ce mardi 16 décembre 2014, le budget général de l’Etat, gestion 2015, est passé comme une lettre à la poste à l’Assemblée Nationale. La loi des finances a même reçu l’approbation des députés de l’opposition et de la mouvance critique qui n’ont émis que quelques réserves. Permettant ainsi au jeune ministre Komi Koutché de réussir sans anicroches son premier véritable baptême du feu parlementaire. Pourtant, dans l’opinion, on redoutait le scénario de l’an dernier. En décembre 2013, à l’issue d’une procédure parlementaire assez mouvementée et controversée, l’Assemblée avait réussi à rejeter de justesse le budget général de l’Etat 2014. En prélude à ce rejet, qui sonnait comme un échec cuisant de fin d’année pour le régime Yayi, l’Assemblée nationale avait connu la naissance d’un nouveau groupe parlementaire. C’est le groupe « Cohésion nationale et paix (Cnp) » dirigée par Candide Azannaï, réputé pour sa hargne contre Boni Yayi. Ce groupe, constitué d’autres députés très remontés contre le régime comme Issa Salifou, Sacca Fikara, Bani Samari, Epiphane Quenum avait activement contribué au rejet de la loi des finances 2014 par le Parlement. Cette année, à quelques jour de la plénière sur le budget, on a aussi assisté à une redistribution des cartes politiques à l’Assemblée nationale. Dissoute en février 2014 après la démission du député Issa Salifou, dit «Saley», (Cnp) a été reconstituée avec l’adhésion de l’honorable Atao Hinnouho, transfuge du Parti du renouveau démocratique (Prd). Dans le même temps, Issa Salifou a rejoint le groupe parlementaire Union fait la Nation et Venance Gningla, légendaire non inscrit a intégré celui du Prd-Un. Avec ces bouleversements, on redoutait une mauvaise surprise des députés au ministre Komi Koutché. Echec et mat ! L’enjeu de cette redistribution des cartes réside donc beaucoup plus dans les tractations pour les prochaines joutes électorales.

Ils refusent d’être les boucs émissaires

Dans l’opinion publique, l’on se demande sans doute comment et pourquoi les mêmes députés qui ont rejeté le budget général de l’Etat l’an dernier, l’ont quasiment plébiscité cette année. Le vote massif des députés s’expliquent par plusieurs facteurs. Ces facteurs ont été avancés par certains députés dans leurs explications de vote. D’abord, il y a le contexte politique. Le budget 2015 est un budget électoral. Il contient les prévisions pour le financement des élections municipales et législatives qui doivent se tenir impérativement en mars et avril prochains au plus tard. Depuis février 2013, le Bénin est dans une impasse électorale avec le report sine die des Municipales et la pénible correction de la liste électorale. Les acteurs de premier rang de cette impasse que sont le gouvernement, l’Assemblée Nationale, le Cos-Lépi (organe chargé de superviser la correction du fichier électoral) et même la Cour constitutionnelle se rejettent mutuellement les responsabilités. La pression monte dans l’opinion étant donné que la population a soif d’élections. Dans ce contexte, chaque camp se cherche un bouc émissaire. Le gouvernement dont la mission consiste entre autres à financer le processus électoral se retrouvera donc dans le beau rôle si l’Assemblée rejetait cette loi des finances qui lui permettrait de mobiliser les ressources pour le processus électoral. Les députés, toutes tendances confondues ont sans doute compris l’enjeu. Ils sont allés au-delà des manœuvres politiciennes pour voter massivement le projet de budget. Le gouvernement ne peut donc se prévaloir de l’absence de ressources pour repousser les prochaines échéances électorales. Et ce, à moins que Boni Yayi et ces sbires aient autre chose derrière la tête comme ils en sont souvent soupçonnés.

Au bon endroit et au bon moment

Ensuite, il y a la qualité du document soumis au vote. Le budget 2015 a été élaboré dans le cadre de la nouvelle loi organique relative aux finances publiques. « C’est la première fois que le Bénin élabore un budget conformément à cette loi. La démarche méthodologique qui a conduit à son élaboration témoigne déjà des innovations que cette loi nous impose », a indiqué le ministre des Finances, Komi Koutché après le vote. Le non-respect de cette loi organique fait partie d’ailleurs des raisons du rejet du budget passé.

Enfin, l’aura de l’actuel patron des Finances béninoises ; Komi Koutché a le vent en poupe. Avant d’être promu à l’Economie et aux Finances en août 2014, Komi Koutché a pris par la direction du Fonds national de la Microfinance et le ministère de la Communication. De ces passages à ces deux fonctions, il a laissé une bonne impression de lui-même dans l’opinion et dans certains cercles restreints du régime. Cette aura le suit visiblement aux Finances où la mission est encore plus délicate. Ce «Karma», ajouté à un contexte politique de gros enjeux ont notamment favorisé ce vote à un score historique du budget général de l’Etat 2015. L’un mis dans l’autre, Komi Koutché a sans doute eu la chance de se retrouver au bon endroit et au bon moment.

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