Politique nationale : Gbadamassi, sortez les dossiers !

Il y a un peu de temps déjà que ses interventions ont commencé à susciter un grand intérêt dans l’opinion. Pas parce que le bouillant député de Parakou est devenu aussi éloquent, pertinent et convaincant que Démosthène – homme d’Etat et grand orateur attique athénien du IXè siècle avant Jésus Christ – mais simplement parce que ses discours devenaient préoccupants pour la morale politique. 

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Beaucoup de gens bien, de grande culture et qui n’ont pas perdu le sens de la morale s’étonnent régulièrement de voir ce personnage assez lunatique transformer le débat politique, connu jadis comme un discours sérieux, pertinent, fait dans un style assez policé, en un discours de « ghetto » où seule la force physique de l’orateur et la violence de ses mots amènent à l’écouter. A chaque fois, qu’il prend la parole au sein de l’hémicycle, cette catégorie de Béninois passe de bons moments de tourments et d’hystérie. La violence des mots, la bassesse et l’ignominie qui caractérisent ses interventions ont fait de lui, un sujet atypique de la classe politique. Son discours écœure. Il heurte la morale politique lorsque Gbadamassi affirme sans vergogne, devant micros et caméras que la prison était un passage obligé pour tout homme politique et que celui qui n’a pas fait l’expérience de bagne n’était pas digne d’être appelé ainsi. Il devenait aussi un problème pour la postérité. Voir sa progéniture s’asseoir devant le petit écran et regarder un tel personnage tenir ce discours de caniveau devenait un grand souci pour des parents. Certains parmi eux, zappaient habillement pour éviter que leurs enfants consomment ces envolées médiatiques très toxiques. Le bon exemple devrait être à la télé et le député, qu’on le veuille ou non, est un titre social prestigieux. Que les enfants ne prennent donc pas  ce cas comme le bon exemple. Telle était leur préoccupation.  La dernière frasque du député rebelle remonte à deux jours. Voulant répondre à sa collègue Hélène Aholou Kèkè qui accusait les députés Fcbe de bloquer le vote de la loi sur les magistrats de la Cour suprême et le barreau, il finit par sortir une grosse bêtise : « Si on doit attaquer notre leader charismatique, désormais nous allons aussi sortir les dossiers ». Ainsi donc, à bien comprendre Gbadamassi, tant qu’on n’attaque pas son leader charismatique, le corrompu est bien protégé. Personne ne dira rien sur ses relents gloutons qui font saigner les caisses de l’Etat. Il restera au poste et continuera sa bouffe. Il s’agit donc d’un régime dont l’une des caractéristiques est la complicité du silence. Une sorte d’omerta qui règne dans les mafias d’Amérique latine. Je rappelle que le leader charismatique de Gbadamassi est le président Boni Yayi, le même qui a initié une marche verte contre la corruption et a chanté dans presque tous ces discours que la lutte contre la corruption est non négociable. Le même qui a fait voter une loi contre la corruption. Il s’agit là d’une trahison du fondement originel même de son pouvoir. En 2006, je me rappelle comme si c’était hier de la volonté maintes fois exprimée du Chef de l’Etat de faire de la lutte contre la corruption une priorité de son quinquennat. Mais hélas, elle s’est muée en une vaste opération de chantage pour  amener les rares têtus de la classe politique à faire allégeance au souverain suprême. Plusieurs opposants, de peur de représailles se sont ainsi rendus. Persécutés de la même manière et présentés fréquemment comme des prévaricateurs attitrés, Bruno Amoussou et Lazare Sèhouéto ont fait une déclaration publique pour inviter le Chef de l’Etat à faire sortir tous les dossiers qu’il a sur eux et engager, avec leurs soutiens, toutes les poursuites judiciaires contre eux. Depuis cette déclaration, la persécution s’est estompée et ils roulent tranquilles à Cotonou. Aucun dossier n’a été sorti contre eux. Au contraire, c’est contre les hommes clés du système Yayi que des dossiers sortent.  Avant de dire cela, Gbadamassi avait aussi dit : « En matière de morale, nous n’avons pas d’ordre à recevoir de personne ». Sortant des bouches d’un ancien bagnard toujours poursuivi pour un crime de sang et refugié sous l’immunité parlementaire, cela est bien dommage. Seulement, on doit comprendre avec désolation que ses agissements, son discours frisaient bien celui d’un « cabri mort » pour qui l’éthique, la dignité et l’honneur n’ont pas forcement le sens habituel qu’on leur connaît.

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