Gabon : Ali Bongo sur la sellette

A un an de la présidentielle de 2016, au Gabon, opposants et partenaires sociaux travaillent à faire tomber le régime patriarcal des Bongo. Dans ce dessein à peine voilé, ceux qui veulent stopper la machine des Bongo utilisent des armes diverses.

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Après les soubresauts provoqués par la publication du livre « Les nouvelles affaires africaines » de Pierre Péan qui jette le doute sur l’origine gabonaise du président Ali Bongo Ondimba (celui-ci serait d’origine biafraise), le Gabon est actuellement agité par des grèves perlées pour essouffler le pouvoir en place. Enseignement et santé en tête, plusieurs secteurs sont paralysés avec la grève lancée en février dernier par une vingtaine de syndicats. Réclamant une amélioration substantielle de leurs salaires, les fonctionnaires gabonais sont intraitables avec le pouvoir.

Les enseignants qui sont plus menaçants avec l’épée d’une année blanche dans le public, réclament une augmentation du salaire minimum qui doit passer selon eux de 80.000 à 300.000 F Cfa. Soit du simple au triple. En plus de cela, ils veulent un relèvement du point d’indice salarial. Difficile pour un pouvoir d’accéder à une telle surenchère. Ce qui est évidemment la position du gouvernement gabonais qui a expliqué qu’accéder à ces réclamations ferait passer les charges salariales annuelles de 680 milliards à 2500 milliards F Cfa et porterait un grand coup non négligeable à  l’Etat.

Qui veut noyer son chien…

Plus qu’une lutte sociale, le combat des syndicats gabonais s’apparente à un combat politique visant à faire partir le clan Bongo. Dans le rang des chefs de file des mouvements syndicaux, certains n’hésitent pas à déclarer qu’ils luttent pour le pays. Il faut dire que cela fait plus de 50 ans que la famille Bongo est au pouvoir. Ali Bongo, le fils actuellement au pouvoir a pris la tête du pays en 2009 à la mort de son père après 41 ans au pouvoir; ce qui revient à dire que des pères de familles et leurs petits fils n’ont connu de des Bongo comme président. C’est donc un combat pour un changement de nom à la tête de l’un des pays les plus riches d’Afrique qui est dissimulé sous les réclamations d’ordre salarial. En témoigne, le fait que les enseignants ont choisi de faire la sourde oreille à l’appel du président Ali Bongo Ondimba malgré le versement d’une prime d’incitation à la performance et l’annonce de la mise en œuvre d’un système nouveau pour la rémunération. Aussi, faut-il ajouter que les enseignants gabonais font partie des mieux traités en Afrique bien que leurs revendications soient légitimes. Dans leur intransigeance, ils ne sont pas sans savoir que l’économie de leur pays est au ralenti avec la chute drastique des prix de l’or noir, principal pourvoyeur de devise au Gabon. Le secteur pétrolier du Gabon, pour rappel, a été fortement éprouvé par les mouvements de débrayage observés par les ouvriers du secteur en décembre dernier.

Le danger des révolutions

Bien que mal gouverné actuellement, le Gabon peut se réjouir de sa stabilité. Poussés par la fièvre des révolutions spontanées, les Gabonais pourraient vite se retrouver dans le chaos s’ils ne prennent pas le soin de mieux peaufiner la stratégie pour faire partir un régime vieux de 50 ans.  La situation en Libye est très instructive à cet effet. Muselée et fragilisée durant tout ce temps, l’opposition gabonaise manque d’un leader capable de gouverner le pays. Jean Ping, l’ancien baron du régime de Bongo père, avec son expérience  dans la machine Bongo et son passage à l’Union africaine, pourrait peut-être faire l’affaire, mais reste à savoir s’il fait l’unanimité au sein de l’opposition. Cette opposition réunie en un front dénommé, « Front uni de l’opposition pour l’alternance » avait  invité à la désobéissance civique après la publication des « Nouvelles affaires africaines » de Pierre Péan. Dans cet appel, le Front a clairement ordonné aux Gabonais de ne plus reconnaître Ali Bongo Ondinba comme leur président en raison de son « acte de naissance dont l’authenticité n’a jamais été rapportée ». C’est dire que l’opposition gabonaise, en absence de projet convaincant, s’accroche à des « supputations » pour manifester son existence. On l’avait vu, cela s’est soldé par la mort de civils. Avant donc de pousser, une nouvelle fois,  le peuple à une révolution populaire, les opposants au clan Bongo au pouvoir, doivent faire le nécessaire exercice de ramollissement de leurs divergences  afin de proposer un nouveau pacte de gouvernance saine. Il y a donc lieu pour les Gabonais de ne pas se fier à des manipulateurs tapis dans l’ombre, qui attendent de voir le pays s’engouffrer dans un chao pour venir jouer aux pompiers tout en suçant comme des vautours un pays agonisant. A bon entendeur, salut !

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