Le sexe, opium des femmes artistes au Bénin

Avec leurs clips qui se ressemblent point pour point et foisonnent d’imitations de vedettes nigérianes, ivoiriennes, de stars afro-américaines, les femmes artistes béninoises ne trouvent visiblement de source d’inspiration que le sexe ou globalement la sexualité. Ella Martins, Dossi, Pélagie la Vibreuse, Oluwa Kèmi, Nelly et autres de cet acabit, elles rivalisent de créativités pour paraître la championne en la  matière. 

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Angélique Kidjo, Edia Sophie, Ayikpémi Kpoguè et autres femmes artistes béninoises de renom ne sont pas des modèles pour leurs jeunes sœurs, leurs « filles » qui ont choisi de se faire un nom dans la musique. Aux antipodes de ces aînées qui continuent de marquer les esprits par la qualité et  la profondeur  des messages qu’elles véhiculent dans leurs compositions, les jeunes femmes artistes béninoises  ont pour la plupart fait l’option de ne chanter que sexe, sexualité, romance. A priori, elles semblent s’inscrire dans la  logique de briser le tabou autour du sexe au Bénin où de nombreux parents se refusent, d’en discuter avec leurs rejetons.  Mais à posteriori, on se rend à l’évidence que ces artistes sont engagées dans une guerre à distance avec pour missile balistique des tableaux érotiques qui constituent le fond de leurs clips. Ella Martins, Dossi, Pélagie la Vibreuse, Oluwa Kèmi, Nelly et autres de cet acabit rivalisent de créativités pour avoir la couronne de l’érotisme.

Panne d’inspiration, brusque virage

D’un clip à un autre, on note une panne d’inspiration dans la composition de textes  chez ces femmes artistes béninoises. Il leur suffit de sortir un mot vulgaire de l’argot sexiste, et c’est parti pour tourner un clip. Pélagie la Vibreuse peut donc vous chanter un truc comme « Jaguar » qui dans un langage à peine voiler désigne  « le vagin ». « Un ka déji do Jagua cé wu » – je compte bien sur mon Jaguar pour apprivoiser mon homme, est le refrain du clip éponyme qui passe en boucle sur les chaînes de télévision et de radio de la place.  Avec elle, on a aussi «  Vivi kpodo lancé mè », – J’ai encore de la  douceur dans ma chair » ou encore « Solevi » dans lequel elle chante « Kè asa man do giya » – écarte tes jambes que je passe des vitesses-.  Abondamment joué ces temps-ci, « Wèrè-wèrè », le nouveau clip de Dossi la princesse,  qui amuse la galerie avec « Agbèunguè », expression qu’elle a trouvée pour parler du « gros pénis » d’un mari qui fatiguerait sa femme avec. Pourtant ces artistes, à leurs débuts, ont remarquablement impressionné le public avec des textes de bonnes factures. Dossi avec « E  na wa Jo », un titre fort  réconfortant pour toute personne soucieuse ou éplorée, s’était faite adoptée avant de s’arrimer piteusement dans le registre ivoirien de musique bruyante sans texte. L’ancienne  danseuse, Pélagie devenue  patronne de l’érotisme chez les femmes artistes béninoises, s’est fait signaler  avec un tube  impeccable sur le roi Gbéhanzin avant de changer  de registre. Idem pour Ella Martins avec « Akaragninbo » le morceau tant aimé des enfants.

Des chorégraphies provocantes et vulgaires

Dans les clips réalisés, plus frappantes sont les chorégraphies dans lesquelles les filles allumeuses exposent des corps hyper-sexualisés. Des déhanchements sauvages avec des popotins et des poitrines biens garnies comprimées dans des soutien-gorges défilent tout le temps que dure le clip. Pas besoin de se casser la tête  pour comprendre que cette nouvelle génération d’artistes femmes béninoises constitue un fan-club pour les stars américaines du Hip-pop. Jenifer  Lopez, Nicki Minaj, Rihana, Beyoncé ou encore Kim Kardashian, sont celles que visiblement les jeunes femmes artistes béninoises imitent. Pour certaines d’entre elles qui n’ont pas l’écho de ces stars, les clips de leurs sœurs nigérianes comme Yèmi Aladé, Chidima et autres font l’affaire.

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Une musique juste  pour Cotonou

Cette musique dominée par le thème de la sexualité pour laquelle les jeunes femmes artistes béninoises se défoncent n’est pourtant  pas consommable au-delà de Cotonou. L’imitation béninoise n’a pas de quoi rivaliser avec les productions nigérianes, ivoiriennes, togolaises ou ghanéennes qui elles-mêmes sont des copies des méta-érotismes américains. Résultats, ce sont des morceaux condamnés à être joués par des DJ locaux dans les bars, les restaus, les gargotes, ou les manifestations de jeunes de quartiers. Mais aussi sur des chaînes de télévisions béninoises, moyennant quelque chose. Conséquence de cette situation, les organisateurs de grands évènements de réjouissances, de concerts, d’évènementiels sont obligés de faire appels aux artistes étrangers d’origines ivoirienne, nigériane, togolaise, congolaise et autres imités au Bénin. Et dans un sursaut d’orgueil, on en retrouve parmi ces artistes spécialisées en plagiat musical qui battent des pieds et des mains pour s’offrir un brusque voyage dans un pays européen afin de jouer dans des bars de faubourgs en guise  de ridicules tournées.

Abrutissement musical

Le drame de cette fâcheuse réalité est que ces vedettes d’érotisme vulgaire ont des impacts négatifs sur les plus jeunes qu’elles. Elles sont nombreuses, ces filles artistes qui emboîtent les pas aux premières avec des singles de mauvais goût. A  y voir de près, ceci est le fruit des concours d’interprétations qui s’organisent dans les collèges lors des journées culturelles. A ces occasions, les collégiennes choisissent de ces morceaux qu’elles reprennent devant  leurs camarades comme des artistes en herbe. S’en suit un abrutissement musical qui multiplie l’espèce. Mais, faudrait-il  le dire, ce phénomène gagne du terrain avec la bénédiction des stations de radios et des chaînes de télévisions qui n’ont point d’exigence en matière de qualité de clips qu’elles passent.

Complices des hommes

Le virus qui malmène les femmes artistes béninoises les rend complices des hommes qui ont souvent utilisé les corps de femmes comme des enjolivures dans leurs clips. Il est regrettablement fréquent  de voir la quasi-nudité des filles en chaleur dans les vidéos de tubes d’artistes hommes qui ont une carence terrible en qualité textuelle et en  qualité du son. Des images choquantes sur lesquelles le corps de la femme sert d’appât, d’objet de marketing  musical. Et également nombreuses à s’offrir une occasion de m’as-tu vu ?, les filles pour augmenter leur chance de paraître dans ces clips,  s’offrent des bains de laits corporels éclaircissants. C’est la promotion de la dépigmentation qui se fait.

Retour aux sources

Des compositions traitant de sexualité ou de romance, ce n’est pas ce qui gêne fondamentalement. Les Béninois en raffolent quand c’est bien fait avec beaucoup d’élégance. Les artistes Adizé, Gbèzé et d’autres groupes comme le Poly-rythmo, Black Santiago pour ne citer que ceux-là en font d’intéressants dans des rythmes aussi-variés que divers, traditionnels ou tradi-modernes.  Des compositions qui résistent à l’usure du temps. Ceci à l’opposée de ce que proposent les artistes nouvelles générations qui gagneraient à faire un retour aux sources, aux valeurs du pays

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