Trois cailloux dans le jardin communal

Enfin, elles ont eu lieu. Les élections communales, municipales et locales, longtemps différées, ont trouvé à se   recaler dans l’agenda républicain. Feront-elles émerger une nouvelle race de gestionnaires ? Nous maintiendraient-elles dans une triste ambiance de « déjà vu » et de « déjà entendu » ?

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De bonnes questions à l’orée d’une nouvelle mandature. Dans tous les cas, le pouvoir local devra compter avec trois gros cailloux. Ils trônent, depuis, dans son jardin, entourés et entretenus par notre laxisme joyeux.

Le premier caillou, c’est le fait d’avoir eu à reconduire, de manière passive, une expérience vielle de douze ans. Le chemin parcouru n’a pas été évalué. L’existant n’a été interrogé et critiqué. Des leçons n’ont pas été tirées pour le présent et pour l’avenir. Car douze ans de gestion du pouvoir local, c’est une somme d’enseignements.  Des hommes et des femmes ont été lancés sur le terrain de l’action. Ils n’avaient pour toute boussole que des textes écrits par nos cadres techniques. Après douze ans d’apprentissage à l’école du pouvoir local, avec des fortunes diverses, ces hommes et ces femmes n’ont-t-ils pas besoin d’une pause réflexive ? Pour parler moderne, un débriefing est nécessaire. Il s’impose à tous égards.

Le dispositif administratif d’encadrement de notre expérience de décentralisation doit être questionné. Qu’est-ce qui a bien marché ? Qu’est-ce qui l’a été moins et pourquoi ? 

Les objectifs projetés et les résultats obtenus doivent être évalués. Quel décalage a-t-on observé ? Pourquoi en a-t-il été ainsi ? Que faire pour mettre la réalité au diapason des idées et des idéaux projetés ?

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La participation citoyenne, en termes d’implication et de contrôle, doit être passé au crible de la critique. L’a-t-on suscitée et entretenue ? Que peut-on faire encore pour mieux l’organiser ?

Pleins feux sur le profil des gestionnaires du pouvoir local, en termes de « l’homme qu’il faut à la place qu’il faut ». Qui avons-nous privilégié ? Le plus méritant, sous l’angle de la compétence, de l’expérience et du patriotisme ? Le plus méprisant qui ne sait que faire étalage de sa fortune, marquant tout du sceau corrupteur de l’argent roi ?

Le deuxième caillou est la mise sous la coupe des partis politiques des élections municipales, communales et locales. Ce qui disqualifie désormais toute candidature indépendante. En l’état actuelle des choses et à voir ce que pèsent nos diverses formations politiques, c’est un coup dur porté au pouvoir local. Un tel est riche de plusieurs décennies d’expérience.  Appelé à faire valoir ses droits à la retraite, il souhaite bénéficier de l’onction populaire que confère une élection, pour mettre ses compétences au service de sa localité. Mais une loi récente lui barre la route et fait voler en éclats ses souhaits.

On aura toujours des arguments pour soutenir le bien fondé d’une réforme qui a désormais force de loi. Mais une enquête chiffrée et informée sur la contribution des candidatures indépendantes, dans divers conseils municipaux, aurait été plus éloquente. Elle aurait induit une démarche de sagesse, autrement plus sérieuse et plus pertinente.

Le troisième caillou tient au fait que la plupart des conseillers qui vont animer nos différentes localités ne sont que l’ombre   de leurs leaders charismatiques. Les affiches de campagnes en ont témoigné à suffisance avec des satellites de candidats-conseillers qui gravitent autour d’un astre majeur que serait le leader du parti. De deux choses, l’une. Soit ces conseillers sont des éléments parachutés, encore incapables de s’affranchir de la tutelle d’un mentor, faute de représentativité et de consistance politique et matérielle. Soit c’est moins l’intelligence des hommes qui est convoquée dans la gestion d’une localité que les stratégies manœuvrières d’un parti qui   sont privilégiées. Dans tous les cas, ce sont les populations qui sont flouées ; ce sont les espérances d’une multitude de citoyens qui vont être déçues. Une fois de plus.  

C’est notre devoir de détecter, d’identifier ces cailloux, avec l’ambition, sans souci de la rime, de faire de nos localités de véritables bijoux. Que dire de plus ? Si un homme prévenu en vaut deux, convenons qu’un problème identifié et pris en compte, par anticipation, est à moitié résolu

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