Présidentielle : l’éclairage des mots

C’aurait été un exercice amusant de relever quelques   expressions, en français, sur la présidentielle de 2016. Des expressions qui s’entendent ici et là. Des expressions qui peuplent le quotidien des Béninois.

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Mais les enjeux de l’heure sont autrement plus sérieux pour s’autoriser de rire de tout et de rien. Il reste que les expressions dont nous parlons sont loin d’être innocentes. Elles surgissent du tréfonds des uns et des autres. Elles traduisent, plus qu’un coup de cœur ou qu’un coup de gueule, un état d’esprit. Elles projettent une conscience plutôt malheureuse du pays. Comme si ceux qui utilisent ces expressions se mettaient à désespérer de tout. Pour guérir d’un mal, il faut l’extraire des profondeurs où il est tapi. Pour exorciser les démons qui nous assaillent, penchons-nous sur quelques unes de nos expressions favorites par les temps qui courent. Ces expressions portent tout le poids des ressentiments et supportent toute la charge des aigreurs des uns et des autres.

– Quel foutoir ! L’expression signifie « grand désordre » et le désordre est synonyme de confusion, de pagaille, de bordel, voire de merdier. Avec la pléthore de candidats, voilà très exactement comment les Béninois, dans leur immense majorité, appréhendent la toute prochaine élection présidentielle. C’est ahurissant, en effet, de voir une multitude de candidats se lancer, à corps et à cœur perdu, vers le Palais de la Marina. On eut dit une meute affamée à la quête et à la conquête de l’os présidentiel. Qu’est-ce qui explique ce regain soudain d’intérêt pour la plus haute marche du pouvoir d’Etat ?

– C’est une vraie foire d’empoigne. L’expression signifie une mêlée générale dans laquelle chacun cherche à obtenir la meilleure part, ceci par tous les moyens. Car l’idée d’une mêlée renvoie à une bataille, à un combat au corps à corps. Tous les coups sont permis, dès lors que tous les dés sont pipés. On n’est plus, on s’en doute, en présence de quelque chose d’honorable et de propre. On entre dans le labyrinthe des coups bas, des coups tordus. Et si, chemin faisant, on ne vous glisse pas une peau de banane, préparez-vous à vous prendre une banane. C’est ce qui effraie le plus les Béninois, pacifistes dans l’âme, pacifiques comme pas possible. Ils craignent que ce qui doit être et doit rester une fête ne tourne, finalement, au vinaigre.

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 Cela veut dire qu’il y a une foule de personnes qui veulent accéder, toutes et en même temps, à un endroit. Le pays enregistre, chaque jour, des candidats à la candidature qui prennent d’assaut le Palais de la Marina. Tels des fans déchaînés une salle de spectacle. Tels des supporters passionnés un stade de football. Voila qui témoigne de la piètre idée que beaucoup se font de la fonction présidentielle. Ils n’en voient que le côté jardin. Ils n’en retiennent que les honneurs et les privilèges.

Ils s’entendent comme larrons en foire. Pour dire qu’ils s’entendent à merveille. Car il ne faut pas se laisser prendre au piège de croire que tous les candidats en course se haïssent cordialement ; qu’ils s’en veulent à mort. Aussi sûr que  » qui se ressemble s’assemble », beaucoup d’affinités lient les oiseaux du même plumage. Le savoir, c’est éviter d’être le dindon de la farce.

Vanité des vanités et tout n’est que vanité. L’expression est d’origine biblique. Elle vient opportunément rappeler à tous ceux qui voudraient l’ignorer, l’inconsistance de nos élaborations ici bas, l’extrême fragilité de nos entreprises humaines. Car il y en a qui, au seul motif d’avoir fait acte de candidature à la présidence de la République, ne se prennent plus pour de la merde. Pour dire qu’ils se prennent pour des personnages importants. Chacun joue son rôle sur l’immense scène de la comédie humaine. Mais une fois le rideau tombé, la sagesse voudrait que chacun rejoigne sa loge. Sans faire trop de bruit.

N’avoir plus que ses yeux pour pleurer. Cela veut dire, avoir tout perdu. Car, à l’heure du compte final, il y aura, inévitablement, des pleurs et des grincements de dents. Beaucoup se sont cru appelés. Mais c’est un seul qui sera élu. Bienvenue donc et par participation à nos futurs anciens combattants. Ils n’auront gagné la moindre bataille dans une guerre perdue à l’avance. Piètre conclusion d’une aventure sans lendemain

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