Affaire Talon – Sodeco : La justice béninoise se déclare incompétente

Saisi par le gouvernement, dans le  dossier de portage de 17,5% du capital de la Sodeco qui oppose l’Etat béninois à Patrice Talon, le tribunal de première instance de Cotonou a rendu son verdict ce lundi 09 novembre 2015. Les trois juges en charge du dossier ont déclaré l’incompétence du tribunal de connaitre d’une telle affaire. Plutôt une mauvaise nouvelle pour le plaignant.

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Un énième camouflet ! L’Etat béninois, du moins Boni Yayi, vient d’enregistrer une nouvelle défaite dans la guerre politico-juridique qui l’oppose à Patrice Talon depuis 2012. Cette défaite concerne un pan du dossier Sodeco. Il s’agit plus spécifiquement du bras de fer sur le portage de 17,5% des parts du capital de la Société pour le développement du coton (Sodeco).  

Pour rappel, en 2008, lors de la privatisation de l’outil industriel de la Sonapra, le gouvernement avait promis de céder un an plus tard, 17,5% du capital de la nouvelle société-la Sodeco- à l’adjudicataire. Cet adjudicataire était la Société Commune de Participation (Scp) de l’homme d’affaires Patrice Talon.  En 2009, le gouvernement a tenu sa promesse. La cession avait été faite pour le compte des publics béninois et étranger. La convention de cession a été signée le 24 décembre 2009. Avec cette transaction, Patrice Talon devenait l’actionnaire majoritaire de la Sodeco. Suite à la brouille entre Boni Yayi et son  ancien bras financier électoral, Patrice Talon, le gouvernement a décidé de ramener dans le giron de l’Etat ces 17,5%.  

«Les 17,5% qui au départ étaient prévus à être cédés sur la bourse de genre des valeurs immobilières, n’ont pas été cédés», constatait Marcel de Souza en janvier 2014. Alors ministre du développement, il se prononçait au sortir d’un Conseil des ministres à l’issue duquel le gouvernement avait décidé de réquisitionner les usines de la Sodeco et de reprendre les 17,5% du capital de la société. « Au bout d’un an, la convention prévoit qu’on puisse céder à la Scp, ce que l’Etat a fait, avait-il rappelé.  On a cédé donc les 17,5% revenant au secteur privé à la Scp, mais nous avons pris soin de faire signer un acte par lequel la SCP avait deux ans pour les céder au secteur privé. Au bout de deux ans c’est-à-dire fin décembre 2011, nous notons que pour des raisons ou d’une autre, on ne veut pas rentrer dans le détail, les 17,5% n’ont pas été cédés. (…) Mais face à la situation de blocage, le gouvernement se voit dans l’obligation de prendre ses responsabilités : les 17,5% qu’il a cédés au secteur privé et qui n’ont pas été rétrocédés au publique comme prévu par la Brvm (Bourse régionale des valeurs mobilières) doivent être repris.»  

Violation de la convention ?

La volonté de Boni Yayi et les siens avait donné lieu une bataille médiatique entre le gouvernement et les représentants de Talon dans les instances dirigeantes de la Sodeco. Puisqu’accusé de crimes économiques et de tentative de destitution du régime Yayi (affaires coup d’Etat et empoisonnement), le magnat du coton s’était exilé à Paris.

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Le 25 avril 2014, l’Etat a saisi le tribunal de première instance de Cotonou, contre la Sodeco, la Scp et Patrice Talon. Dans sa plainte, l’Etat a formulé trois requêtes. Primo, « l’isolement provisoire et la suspension » des votes en vertu desquels la Scp de Talon est majoritaire de la Sodeco. Secundo, l’annulation de cession de 17,5% d’actions à la Scp ou à défaut la cession des actions querellées aux publics béninois et étrangers. Tertio,  un audit de gestion et des comptes de la Sodeco Sa par application des dispositions de l’article 159 de l’Ohada.

Après plusieurs audiences, la chambre commerciale du tribunal a rendu son verdict ce lundi 9 novembre 2015. Les juges, au nombre de trois, ont déclaré l’incompétence du tribunal à connaitre du dossier. Fallait-il s’attendre à une décision contraire ? Selon l’un des avocats de Patrice Talon, la convention liant l’Etat béninois à la Scp stipule clairement que la voie de résolution d’éventuels litiges est l’arbitrage. Cette décision du tribunal de Cotonou confirme la Société commune de participation (Scp) dans ses droits. Patrice Talon demeure l’actionnaire majoritaire de la Sodeco. L’Etat béninois a désormais deux voies de recours ; faire appel ou saisir la Cour commune de justice et d’arbitrage (Ccja) de l’Ohada. Pourtant, en réaction à la récente décision de la Ccja dans l’affaire Pvi, le gouvernement et son chef ont qualifié cette juridiction de corrompue. Osera-t-il la saisir? Qui vivra, verra!

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