Système électoral au Bénin : Me Max Ahouékè propose l’intégration de kits biométriques

La Côte d’Ivoire a organisé le 25 octobre dernier, sa première élection présidentielle après les violences postélectorales de 2010-2011. Cette élection présidentielle s’est soldée par la réélection du président Alassane Dramane Ouattara alias Ado.

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Cette première élection que d’aucuns qualifie de « d’élection de sortie définitive de la crise » a mobilisé de nombreux observateurs à travers le monde. Au nombre de ces observateurs, l’ancien ministre béninois de la Communication et des technologies de l’information de la communication du gouvernement du président Boni Yayi, Me Barthélémy Max Ahouékè. Avocat professionnel dont l’intégrité ne souffre d’aucun doute (et cadre loin du champ politique) il n’a jamais organisé de marche de soutien et autre activité du genre comme le faisaient ses collègues,  l’ancien ministre Max Ahouékè a effectué la mission d’observation des élections en Côte d’Ivoire sous le couvert du Réseau panafricain pour la bonne gouvernance (Repag). Très expérimenté dans le domaine de l’observation des élections- 25 ans d’expérience-, l’avocat que certaines personnes présentent comme étant peu bavard revient dans cette interview exclusive, sur le scrutin présidentiel. Le constat général, la polémique autour du taux de participation et autres sont ici abordés par Me Barthélémy Max Ahouékè. L’ancien ministre de la Communication, au regard d’un certain nombre de constats, fait dans cette première interview depuis son départ du gouvernement, une proposition pour l’amélioration du système électoral au Bénin.   

La Nouvelle Tribune : Bonjour monsieur le ministre. Vous êtes en Côte d’Ivoire dans le cadre de l’observation du scrutin présidentiel du 25 octobre 2015. Quelle est votre appréciation du déroulement de la présidentielle ?

Me Barthélémy Max Ahouékè : Ce que nous avons observé, comme la plupart des observateurs d’ailleurs, c’est que, premièrement, le scrutin s’est déroulé dans la tranquillité, dans le calme, je dirai même, dans la transparence. Sauf que dans les bureaux de vote, il n’y avait que les représentants du président de la république sortant, du candidat du Front populaire ivoirien (FPI) et quelques fois, les représentants de KKB (Kouadio Konan Bertin). La plupart des autres candidats en compétition ont fait défaut sur ce plan. La deuxième observation, c’est que la Commission électorale indépendante (CEI) a, comme elle avait prévu, mis en place un système d’authentification de l’identité des électeurs pour éviter, justement, toute suspicion quant au déroulement du vote. Tout le monde l’a constaté, et je pense que vous-même d’ailleurs, que les tablettes qui étaient mises à la disposition des présidents de bureaux de vote pour cette authentification des identités n’étaient pas toujours fonctionnelles. Ceci, soit parce que la formation des agents électeurs a été rapide et les agents n’ont pas eu le temps d’assimiler complètement ce système informatique, soit parce que les agents sont un peu analphabètes, soit la manipulation ne se faisait pas très bien et soit que l’appareil lui-même ne fonctionnait. Est-ce parce qu’il était défaillant ? Je n’en sais rien. Mais c’est une observation d’ordre général que nous avons faite tous. Cela étant dit, moi, j’ai constaté avec mon coéquipier, qu’il y avait la bonne humeur entre les représentants des différents partis dans les bureaux de vote et même entre les électeurs. Il n’y a pas eu d’incident du tout dans les zones où nous avons observé le déroulement du scrutin. La CEI a fait un bon travail de sensibilisation, le gouvernement aussi. Et donc, la peur qui devait peut-être impacter le déroulement du scrutin a été dissipée.

Qu’en est-il de la participation ?

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Comme dans la plupart des pays africains, le matin, les gens ne viennent pas voter. Ce fut le cas. Comme vous le savez, le dimanche, beaucoup vont à la messe et ce n’est que l’après-midi qu’il y a de l’affluence. Donc, on peut dire qu’à partir de 15-16 heures, nous avons constaté une grande affluence dans les bureaux de vote. Ce qui n’était pas le cas le matin.

Toujours au sujet de la participation, il y a eu une polémique avec l’annonce de trois différents chiffres.

Qu’est-ce que vous pensez de cette disparité des chiffres ?

J’ai entendu cette polémique et je pense qu’elle ne devrait pas avoir lieu. Puisque, selon le code électoral, la majorité absolue, c’est 51% pour le taux de participation. Et celui qui a 51% du suffrage exprimé est élu. Donc, la polémique est inutile et superflue. D’autant plus que le président de la Commission électorale, dans un communiqué a démenti les chiffres qui circulaient et a rectifié le tir.

Est-ce qu’on peut dire aujourd’hui que le syndrome de 2010-2011 est définitivement passé ?

Absolument. La vie a repris aujourd’hui à Abidjan. Les gens avaient peur que le syndrome de 2011 réapparaisse mais heureusement cela n’a pas été le cas. Globalement, je peux dire que ce qui a joué en faveur de ce scrutin, c’est premièrement la sensibilisation de la population. Deuxièmement, la peur du syndrome de 2011 qui n’a pas eu lieu et troisièmement, l’introduction des tablettes. C’est une innovation technologique (la tablette) que la CEI a introduite dans son système pour contrôler le déroulement des opérations et surtout pour éviter la suspicion et la fraude.

Quelle leçon faut-il tirer de cette élection pour le Bénin ?

Je pense que notre pays, le Bénin, dont nous sommes toujours très fiers gagnerait à introduire dans son dispositif électoral, au moins pour le déroulement du scrutin, ce genre d’innovation technologique qui évite la suspicion. Vous savez que dans presque tous les pays africains, c’est la ‘’suspectomanie’’ qui caractérisent les élections quelles qu’elles soient.  Les Africains contestent toujours les élections. Les perdants contestent presque toujours la victoire de leur adversaire. Pour donc éviter cette polémique contestataire qui débouche souvent sur la guerre civile avec pour conséquence, la mort de nombreux innocents, je pense que notre CENA (Commission électorale nationale autonome) qui est très compétente en matière d’organisation d’élections, gagnerait à se rapprocher de son homologue ivoirienne pour s’approprier cette technologie. Je ne sais pas si à moins de quatre mois de la présidentielle du 28 février, cette innovation pourrait être introduite dans son système électoral. C’est à souhaiter mais il vaut mieux être réaliste. Cependant, comme la CENA est là pour sept (07) ans, c’est-à-dire qu’elle aura à connaître d’autres élections, elle pourra se préparer à introduire cette innovation dans son système. Le Bénin y gagnera beaucoup, notamment en crédibilité et en transparence. Ceci, afin d’éviter tout affrontement inutile. Vous avez constaté qu’après la proclamation des résultats, les candidats perdants à la présidentielle ivoirienne ont tous félicité le vainqueur. Je dis chapeau pour la Côte d’Ivoire et je souhaite cela pour notre beau pays, le Bénin.  

Réalisation : Yao Hervé Kingbêwé, de retour d’Abidjan

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