Exclusivité : Djimon Hounsou confie ses heurs et malheurs à la recherche du vodoun (vidéo)

A la recherche du vodoun comme l’indique son film documentaire dont la réalisation est en cours, l’acteur hollywoodien d’origine béninoise, Djimon Hounsou était sur sa terre natale où il est allé à la rencontre des dignitaires du culte traditionnel du Bénin. Après le très conservateur village de Hèvê dans le sud-ouest du pays, il a également pris part à la fête du vodoun le 10 janvier dans la ville de Savalou au centre du Bénin. Rencontré dans le luxueux hôtel F&F de Savalou, à la veille de cette fête, Djimon Hounsou confie à La Nouvelle Tribune la quintessence de sa recherche et ses impressions, les unes réjouissantes, les autres déplorables. Lisez plutôt.

Djimon Hounsou, tu es ici dans la ville de Savalou pour prendre part à la fête du Vodoun mais aussi dans le cadre de la réalisation de votre film documentaire « à la recherche du Vodoun, des racines au paradis » selon la traduction en Français, comment est-ce que ça se passe ?

C’est une chose qui est difficile plus ou moins à démontrer. Enfin, mon but c’est de montrer comment notre culture a imprégné d’autres cultures dans le monde. Surtout dans la diaspora qui a quitté le Bénin, la côte ouest à cause de l’esclavage, et qui se trouve plus ou moins à Haïti, au Brésil, à Cuba et autres et qui parle aussi notre langue sans savoir ce qu’ils disent. Après des années d’exploitation de l’homme noir, six siècles après, on parle toujours du Vodoun à Haïti, au Cuba, au Brésil, au Caraïbe, et même au Nouvel-Orléans.

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Un peu partout

Oui justement ! Et c’est d’ailleurs cela qui m’a inspiré, qui m’a donné l’envie de montrer une autre facette de quelque chose qui a été présentée comme diabolique. Comprendre comment se fait-il qu’une telle chose, six siècles après, soit toujours aussi vivante.

Lire Djimon Hounsou : le vodoun n’est pas diable

Très bien ! « Dans cette démarche-là vous étiez dans un village, Hèvè où vous avez pu rencontrer des dignitaires vodoun, où vous avez fait un certain nombre de choses, qu’est-ce que vous avez déjà vu et fait sur le terrain ?

On a concrètement pas vu grand-chose. Juste une cérémonie et autres. Mais concrètement, on était plus ou moins confronté à un challenge avec certains jeunes qui nous ont poussé à…

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Aviez-vous touché certaines choses ?

Je ne sais si on a touché certaines choses ou c’est certaines choses qui nous ont touchés (rire). Tu vois ? On a été dans des endroits où c’est de la puissance qui n’est pas visuelle. Donc, tout est virtuel. Ce qui fait que c’est assez difficile de savoir à quoi tu as à faire et il y a aussi des jeunes qui ont un certain pouvoir dont ils n’hésitent pas à faire usage. Il y a tout ça et c’est un chemin qu’il faut parcourir délicatement.

Tu veux montrer ce qui se passe dans le Vodoun dont tout le monde parle un peu partout, et tu es arrivé au Bénin, est-ce que tu veux faire un pont entre le vodoun qui se pratique au Benin et le vodoun qui se pratique au Brésil, en Haiti, et ailleurs ? 

Oui, je veux faire un pont mais je veux surtout démontrer à quel point le Vodoun n’est pas nécessairement comme on le qualifie dans les films, soit disant diabolique, soit disant satanique et tout ça ; donc, c’est l’ensemble de nos manières de vivre depuis la nuit des temps, et je voulais au moins démontrer son côté qui est simplement et purement un instrument de vie pour s’améliorer dans la vie, pour mieux avancer. Donc, c’est démontrer ces attributs qui sont propres au Vodoun. Donc, c’est ça qui est la confusion, c’est ça que je n’ai pas encore compris, je ne sais pas si encore on peut toujours le qualifier de religion ou pas.

Alors, dans cette démarche, est-ce que tu as déjà vu des choses qui peuvent te permettre de dire que le Vodoun c’est bien, c’est du bon, sur le terrain ?

Avoir vu des choses, c’est un peu trop dit mais bon il est certain qu’il y a des divinités qui te font avancer, il y a des divinités qui te protègent, il y a des divinités qui t’ouvrent la voie pour évoluer dans la vie. Donc, tout dépend de ce dont on a besoin pour évoluer dans la vie, pour s’améliorer ou pour guérir de quelque chose dans la vie. Donc, on croit bien que c’est beaucoup à dire et puis on est en train de courir de droite à gauche à filmer tout ce qu’on veut et à poser toutes les questions qu’on puisse poser pour l’instant, le grand boulot est de rentrer et de trier tout ça et de faire la synthèse.

Tu as rencontré des difficultés particulières ?

Ah oui ! C’est inévitable, c’est un milieu qui se garde très secrètement, qui n’est pas ouvert. Et puis il y a aussi des jeunes qui ont un certain pouvoir qui veulent aussi te le démontrer. J’ai pas besoin de ces démonstrations-là. Mais toujours est-il qu’on se retrouve à des endroits, dans lieux c’est fermé, c’est très intense.

Tu déplores la diabolisation du Vodoun. Pourtant, d’autres diront que c’est vrai, qu’il y a du mauvais dedans.

Le vodoun pour les haïtiens c’est l’instrument de liberté. Donc tu as le Vodoun qui est l’instrument qui aide les gens à bien gérer leur vie, à mieux gérer leur vie. Donc évidemment, il y a un bien quelque part.

Donc tout dépend de l’usage qu’on en fait ?

Oui, de l’usage continuel que tu en fais. Et ma compréhension de la chose de nos jours est que, c’est ta femme que tu as à la maison à qui tu achètes un couteau pour mieux préparer légumes et autres, et qu’elle se fâche, et elle retourne ce même couteau contre toi. Donc, c’est pratiquement ça, les divinités. Donc, c’est les gens qui font vraiment de ça, un instrument bénéfique ou maléfique. C’est eux qui décident. Par exemple, ma compréhension de Tolègba, c’est une divinité qui ne prend pas d’alcool. Donc, quelqu’un qui passe derrière et lui donne de l’alcool en lui disant que telle personne, telle et telle personnes t’ont donné de l’alcool, évidemment cette divinité se retournera contre ces supposées personnes qui lui ont donné de l’alcool même si physiquement, ce ne sont pas elles qui étaient là et qui ont fait la chose. Donc, il y a ce côté maléfique, on utilise cet instrument, cette divinité avec qui on communique pour le bien, on peut toujours l’utiliser pour faire du mal.

Très bien ! Djimon Hounsou, quand on entend, « A la recherche du Vodoun : des racines au paradis » -traduction du titre anglais-, alors que c’est souvent dans les religions révélées qu’on parle du paradis, on se demande comment penses-tu qu’on peut trouver un lien entre le vodoun et le paradis ?

Le christianisme et l’islam ont leurs idées de paradis. Le Vodoun aussi a sa vision ou sa philosophie du paradis. Mais le Vodoun ne te demande pas que si tu fais ceci ou cela tu irais au paradis, celui qui est un adepte du Vodoun, littéralement veut être connecté à Dieu. C’est de là que certains entrent en transe. Donc, ils ne sont pas à la recherche de Dieu, ils sont déjà en contact perpétuel avec Dieu.

Tu as joué dans le film « les gardiens de la galaxie » avec des personnes qui ont des pouvoirs surnaturels avec des effets spéciaux. De cette expérience à celle du vodoun, quelle est la différence entre ce que tu vois au cinéma et ce que tu constates sur le terrain ?

Ce que je constate sur le terrain est que notre manière de vie est assez scientifique. C’est plus scientifique qu’on le dit ou qu’on lui donne crédit. Mais il y a le côté évidemment des Européens où on aime fantasmer dans les films. Ça se dit que tous ces pouvoirs sont à la portée de l’homme, mais il n’y a que dans le vodoun que tu peux avoir l’expérience. Les démonstrations qu’ils font des fois que ce soit de zangbéto, des Egoungouns et tout ça, c’est vraiment de la science. Et évidemment nous on est à la recherche de savoir qu’est-ce que le vodoun ? Qu’est-ce qui définit les attributs du vodoun, quels sont les attributs du vodoun ? souvent les sages qui sont dans le milieu disent que vodoun c’est juste la connaissance de l’herbe. Mais c’est une connaissance approfondie de l’interaction qu’on a avec la vie, les animaux, la nature et autres.

Combien de temps vas-tu consacrer au vodoun dans ton documentaire ? Sera-ce suffisant pour rattraper toutes ces longues années de diabolisation du vodoun ?

Je pense déjà ça leur a pris quatre siècles de nous diaboliser, de diaboliser notre manière de vivre et autres. Mais ça va prendre quand même un grand nombre de temps avant qu’on puisse corriger cela. Même nous les Africains on a peur de la chose. On a un sentiment égaré de la chose. Il semblerait que beaucoup d’hommes d’affaire, de politiciens se cachent la nuit pour aller se refaire. Il y a une certaine hypocrisie vis-à-vis de la chose.

Tu penses que ton documentaire va apporter quelque chose de particulier ?

J’espère qu’au moins ça va ouvrir les yeux à nos confrères et à la diaspora qu’il est évident. Certes je suis en plein milieu du document donc il y des choses que je suis en train d’assimiler… Je commence par penser que ce n’est peut-être pas une religion je ne sais pas comment le qualifier pour l’instant. Toujours est-il que le but de ce documentaire c’est qu’on ait tous, une prise de conscience de nos valeurs africaines. Et il est temps que finalement quelque part on enseigne l’alphabet africain et que nos religions sont pas leurs religions, nos traditions, nos manières de vivre ne sont pas leurs manières de vivre. Lorsqu’on enseigne à l’école, notre histoire ce n’est pas leur histoire. C’est-à-dire … notre science c’est notre science.

Quel est le budget prévisionnel de ce documentaire ?

Je ne voudrais pas en parler. Ce n’est pas des choses dont on parle comme ça. Mais retenez que c’est très cher. C’est tout ce que je peux dire.

Quand est-ce que le film sera prêt ?

Je dirais cette année. On va finir évidemment au tour du 10 janvier notre tournée puis couper le film, voit ce qu’on a, ce qu’on n’a pas. Voir s’il faut revenir filmer encore.

Sur ce film, sur ce projet, il y des cinéastes béninois qui collaborent avec toi et autres. Est ce qu’il y aura toujours la collaboration ?

Mais il faut bien la collaboration on ne peut pas venir dans un pays et amener tous ses outils et autres, son personnel. On a toujours besoin de ces collaborations. Il le faut parce qu’une des approches du documentaire c’est qu’il faut la collaboration avec les cinéastes africains dans tous les domaines.

Il y a des jeunes qui rêvent de devenir comme toi. Est-ce que tu as un projet pour tes jeunes frères béninois ?

Evidemment j’ai des projets et certains de ces projets auront besoin de la jeunesse africaine. Pour le moment il faut quand même que je mette mes pions ensemble pour pouvoir réaliser ces projets.

Tu as déjà joué dans plusieurs films. Les Béninois sont contents de te voir. Est-ce que tu as d’autres projets de films à l’avenir ?

Oui, j’ai beaucoup de films qui vont sortir cette année, que j’ai déjà tourné depuis quelques années. J’ai à peu près 3 ou 4 films qui vont sortir cette année.

Pour finir ce riche entretien, de tout ce que tu es en train de vivre aujourd’hui, quelle impression cela te laisse, comment tu as trouvé ton séjour sur le territoire béninois ?

Mon impression n’a pas été trop agréable pour l’instant avec les courses à droite à gauche et autres avec des gens qui sont plus ou moins faux jeton (ou plutôt fauchards). On a eu des gens d’une certaine renommée qui ne se sont pas bien comportés, c’est honteux. Je ne peux même pas en parler.

Ok ! Merci Djimon Hounsou, nous voudrions que tu continues à suivre La Nouvelle Tribune, à suivre l’actualité béninoise à travers La Nouvelle Tribune, depuis les Etats-Unis. Nous te souhaitons du courage bon vent et bonne suite à toi.

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