Les incohérences et les mauvais calculs de Houngbédji

Depuis le 12 janvier, date à laquelle le soutien du Prd à Lionel Zinsou a été rendu public, le parti semble entré dans une zone de turbulence. La vive désapprobation des populations ne semble faiblir et les lieutenants de Houngbédji envoyés en urgence sur le terrain peinent à convaincre et à défendre les incohérences du discours de leur président. 

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En 1996, le Prd avait, lors de l’élection présidentielle, fait le choix de soutenir Kérékou contre Soglo. Il entrera au gouvernement avant d’en ressortir en 1998 pour des raisons plus égoïstes que politiques. Pendant les vingt ans qui vont suivre, le parti vivra ce choix comme un fardeau. Pour beaucoup, c’est le choix de la malédiction et de la traîtrise dont la conséquence est d’avoir fait de son président, l’éternel perdant de toutes les élections présidentielles qui vont suivre. En 2001, 2006 et 2011, Houngbédji sera à un doigt d’entrer à la Marina mais à chaque fois un dernier avatar vient gâcher son affaire. Le parti et son leader vivront-ils encore le choix de Lionel Zinsou, vingt ans après, comme une nouvelle malédiction ? Question banale mais qui revient de plus en plus ces derniers jours au regard de la vive désapprobation réservée au choix du Prd de soutenir le premier ministre. « Comment peut-il nous demander de soutenir le candidat de Boni Yayi qu’il a combattu lui-même pendant dix ans et dont les deux quinquennats nous ont fait tant de mal ? », entend-on inlassablement de plusieurs personnes. « Lorsque j’ai appris que le Prd n’aura pas un candidat je me suis dit que Houngbédji veut faire une pagaille », se désole un membre fondateur du parti. Pétrifié par la situation, Adrien Houngbédji a dû convoquer en urgence samedi 16 janvier 2016 une réunion avec les membres des sections, sous- sections Prd de la ville de Porto- Novo, les conseillers communaux et locaux Prd de la ville pour leur parler des raisons de son choix et des griefs qu’il avait contre les candidats Patrice Talon, Sébastien Ajavon et Pascal Irenée Koupaki. Et à la fin, il leur demande d’aller annoncer  la bonne nouvelle aux populations. Des moyens ont été mis à la disposition des responsables du parti pour expliquer ce choix et pour apaiser les militants dont le refus est de plus en plus visible. Seulement voilà, le discours tenu ce samedi 16 janvier ne convainc pas grand monde. Tournés dans tous les sens, les propos du président Houngbédji, recèlent assez de contradictions et d’incohérences qui font dire à beaucoup qu’il se moque même de ses militants. Comment croire à un président qui dit être en retraite politique, n’être demandeur de rien, et n’être qu’au service de ses populations et qui pourtant accepte de se faire élire président de l’Assemblée nationale avec tous les avantages si afférents. Si l’on n’est demandeur de rien et qu’on n’en veut pas vraiment, on refuse.  Adrien Houngbédji n’était pas obligé d’accepter d’être président de l’Assemblée nationale. Quand on accepte un tel poste de responsabilité, on doit avoir un peu de retenue pour dire certaines choses. Aussi, on ne comprend pas pourquoi Houngbédji a des problèmes avec les deux hommes d’affaires. De l’un(Patrice Talon), il dit avoir attendu pendant longtemps qu’il bénéficie du soutien de grands partis avant de se rallier à lui et que ce soutien ne venant jamais, il a dû se pencher sur un autre. De l’autre (Sébastien Ajavon), il dit être le premier à lui avoir demandé s’il voulait être candidat et qu’il a refusé d’abord avant d’accepter après. On peut se demander pourquoi Me Adrien Houngbédji est le seul président de parti à avoir des problèmes avec les deux hommes d’affaires entrés en politique ? Doit-on croire comme beaucoup le disent, qu’il est celui qui a suscité leur candidature respective ? On doit réfléchir à cette question puisque ni Amoussou, président de l’Un, ni Yayi(Fcbe), ni Lehady Soglo(Rb) n’ont eu autant de problèmes avec les deux milliardaires.

Tissu de contradictions et d’incohérences

Tout porte à croire que les propos tenus par Houngbédji le 16 janvier est un  savant tissu de contradictions. Voici quelques morceaux choisis. « Nous, notre candidat n’est pas Yayi et on ne votera jamais pour lui. Notre candidat c’est Lionel Zinsou ». On ne comprend pas cet effort du Président du Prd de dissocier Lionel Zinsou de Yayi dans la mesure où le candidat Zinsou s’est proprement compromis lui-même en disant qu’il est le candidat de la continuité. Mieux, il est le candidat désigné par les Fcbe dont le slogan est « après nous, c’est nous ». Par quelle alchimie le leader des Tchoco tchoco réussira-t-il à dissocier Zinsou de Yayi ?

« On dit qu’il est métis. Qui n’a pas de métis dans sa famille ?(…) Obama est quoi ? … ». Le président du Prd tromperait bien ses militants en leur faisant  comprendre que c’est la couleur de sa peau qui est en cause. Ce qui est reproché  à Lionel Zinsou c’est le fait que non seulement il est français de nationalité mais il a servi l’Etat français jusqu’à soixante ans et a occupé de hautes fonctions. Il aura réalisé le rêve d’Obama s’il avait réussi à se faire élire président de la France. Obama n’est pas retourné au Kenya pour chercher à être président, il est élu dans le pays où il est né, où il a travaillé, d’où il a pris la culture et où on le connaît le plus. Et pour Zinsou c’est bien la France.

«Et puis voyons, notre pays sera dirigé par un commerçant et quand ses marchandises viendront au port, les douaniers vont commencer à trembler ». Houngbédji ne savait-il pas cela lorsqu’il demandait à Ajavon s’il voulait être candidat et à Talon de chercher le soutien des partis avant qu’il ne le soutienne lui-même. Drôle d’incohérence.

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« Koupaki est allé me voir et je lui ai dit d’aller sur le terrain et  de travailler mais quand j’ai suivi son travail j’ai vu que c’est insuffisant ». Ridicule. Comment Houngbédji mesure-t-il la force d’un candidat qui n’a pas encore été aux élections ? Par sa présence dans la presse ? Le nombre de déclarations de soutien ou de ralliement en sa faveur ? Ou les chiffres issus des scrutins ?

« Les gens dont on parle, c’est uniquement l’argent qui est leur force de persuasion. S’ils vous amènent, prenez et bouffez ». Chose curieuse, Patrice Talon est l’un des rares candidats qui se promène depuis des semaines pour parler de son programme de société et a même rencontré beaucoup de corps sociaux pour ça : les universitaires, les chefs d’entreprise, les femmes, les étudiants, les professionnels des médias, les enseignants…Quid de Lionel Zinsou qui n’a pu brandir un feuillet de propositions et qui se promène partout pour parler de continuité ?

« Vous m’avez dit que vous ne voulez plus rester dans l’opposition. Ou bien ce n’est pas ça ? ». Cette ambition des militants suffit-elle pour prendre une décision aussi grave ? Si Adrien Houngbédji n’éprouve aucune  gaucherie de voir le logo arc-en-ciel associé au cauris et de soutenir le candidat de celui qu’il a combattu pendant des années, pour beaucoup c’est l’exemple d’un homme inconséquent envers lui-même. Plus que cela, c’est le signe annonciateur de la fin politique d’un homme poussé par son seul égo.

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