Bouffe, bourse, bamboula ou les »3B »

Ici, c’est le Bénin. Celui-ci est un Béninois. Voilà deux propositions à partir desquelles nombre de nos compatriotes s’autorisent de dire que le Bénin est un pays particulier habité par un peuple singulier. Autrement dit, le Bénin ne ressemblerait à aucun autre pays et les Béninois ne seraient assimilables à aucun peuple sur la terre.  Pour une fois, jouons les Saint Thomas. Pas de preuve, pas de certitude.

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Partons de l’hypothèse que les trois composantes de ce qu’on tient pour le bonheur au Bénin ou de ce qui fait le bonheur du Béninois, c’est la bouffe : manger à satiété. C’est la bourse : avoir de l’argent. C’est faire la bamboula : faire la fête. Le gouvernement qui assurera aux Béninois la bouffe, la bourse, la bamboula ou les « 3B, gagnera-t-il, pour autant, la confiance de ceux-ci ? Convoquons quelques faits. Ils tendent tous à souligner la complexité du Bénin et des Béninois.

Premier cas de figure. Le gouvernement réussit à mettre à la disposition des Béninois de la bouffe à gogo, une bourse sans limite, la bamboula en continu. Mais cet exploit est assorti, pour chaque citoyen, de la condition expresse de ne choisir qu’un élément de ce tiercé des bienheureux.

Les Béninois se seraient crus réduits au triste destin de l’âne de Buridan. Il s’agit, selon la fable, de cet âne qui se trouve placé entre un seau d’eau et une botte de foin. Mais à hésiter à choisir l’un ou l’autre, l’âne finit par mourir de soif et de faim. C’est clair, le gouvernement qui mettrait des limites au droit des Béninois au bonheur, devrait se préparer à enregistrer une forte opposition. Il ne manquerait pas de s’attirer les foudres des Béninois.

Deuxième cas de figure. Le gouvernement met à la disposition des Béninois les trois composantes de leur bonheur.  Il les invite alors à manger à loisir, à s’en mettre   plein les poches, pour que la fête dure et perdure.

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Les Béninois, aussi bons vivants que bons viveurs, ne se priveraient point. Mais attention au retour de la manivelle : hypertension par-ci, surcharge pondérale par-là, désordre partout. On critiquerait ce gouvernement qui ouvre le Bénin au désordre et à tous les excès. On blâmerait la myopie de dirigeants qui auront oublié que gouverner c’est prévoir.

Troisième cas de figure. Le gouvernement met à la disposition des Béninois, mais à dose intelligente et acceptable, les trois composantes de leur bonheur. En somme, tout à la disposition de tous. Mais, avant tout, tout en consommation modérée, tout en usage raisonnable.

Réaction prévisible : levée générale de boucliers assortie de questions tous azimuts. De quel droit rationne-t-on en bonheur un peuple ? Pourquoi un gouvernement sans vision et sans ambition cherche-t-il à faire payer au peuple sa myopie ? Tirons quelques enseignements de nos trois hypothèses de travail.

1- Le bonheur n’est ni un prêt à porter ni un prêt à consommer. Dans la cité, c’est chacun qui doit s’appliquer à construire son bonheur. Si possible, avec l’aide du gouvernement. Celui-ci peut apporter des briques pour l’édification de la maison du bonheur. Mais il n’en fera pas plus. Il ne peut en faire plus. C’est à chacun qu’il revient de se servir de ces briques pour construire une maison à son goût, à sa convenance, tenant compte de ses moyens et de ses ressources. On n’est jamais heureux au compte d’autrui. Tout comme on ne peut pas être heureux tout seul.

2- Le bonheur n’a pas un contenu unique et univoque. Le bonheur n’est ni préétabli ni prédéterminé. Parce que le bonheur n’a pas les spécifications d’un produit standard, d’une formule universelle. Chacun marque le bonheur du sceau de son identité. Chacun imprime à son bonheur sa personnalité. Le tout en accord avec sa vision de l’avenir.

3 – Le bonheur est une denrée modulable qui prend en compte toutes les spécificités. Ce qui fait le bonheur d’un bédouin du désert ne rencontre pas forcément ce qui fait le bonheur d’un cadre moyen béninois, vivant à Cotonou. Il s’y ajoute que le bonheur est une quête permanente, sans fin. On ne peut épuiser les besoins d’un peuple ni ses aspirations au meilleur. Tous les peuples, sans exception, sous l’angle du bonheur, sont en développement. Le produit intérieur brut (PIB) n’a rien à y voir. C’est à l’arrivée qu’on juge. Photo-finish à l’appui

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