Fidel Castro : L’internationaliste qui osa défier la superpuissance américaine

L’homme qui défia la Superpuissance américaine ! Au-delà de toutes les opinions controversées sur Fidel Castro qui s’est éteint dans la nuit du vendredi 25 Novembre à La Havane, à l’âge de 90 ans, c’est sans aucun doute cette posture de l’homme qui retient le plus l’attention.

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Une posture dans laquelle il va, littéralement, user onze (11) présidents des États-Unis d’ Amérique qui ne réussiront pas à le faire plier pendant les cinquante ans que durera le bras-de-fer qui va l’opposer aux différents présidents américains deux années à peine après la victoire du mouvement révolutionnaire cubain contre le dictateur Fulgencio Batista, le 1er Janvier 1959.

 Révolutionnaire intransigeant et internationaliste conséquent dans ses choix –aux plans interne et international – pour ses partisans et admirateurs sur tous les continents, dictateur démagogue pour ses opposants et détracteurs, Fidel Castro est rentré dans l’Histoire en faisant triompher ses idéaux de liberté et de dignité pour son pays qui était considéré , en ces années 1950, comme une arrière cour de la grande Amérique dont les citoyens , plus ou moins fortunés , venaient prendre du bon temps dans les casinos et autres lupanars gérés par les mafias américaines qui tenaient Cuba en coupes réglées.

La victoire des jeunes révolutionnaires cubains- leur chef Fidel était un trentenaire quand ils chassèrent le dictateur Batista du pouvoir- est intervenue alors que la décolonisation de la plupart des territoires africains allait commencer, dans des conditions plus ou moins cahoteuses. Ce n’est pas étonnant que beaucoup de jeunes intellectuels des pays africains des années 1960-1970 ne vont pas hésiter à s’identifier , très tôt , à cette action qui, à certains égards, avait des allures d’un romantisme révolutionnaire que son principal initiateur était parvenu à traduire dans la réalité malgré la puissance de l’adversaire , et de ses soutiens dont en particulier les Etats-Unis d’Amérique.

 Très vite donc, Fidel Castro va devenir une référence pour des générations de militants anti-impérialistes africains qui voyait dans Cuba, débarrassé de son dictateur ami des hommes d’affaires américains, un exemple dont ils pourraient s’inspirer dans leurs pays pour engager les populations dans la voie du progrès social. Dans les années 1960, c’est surtout dans le cadre de l’éphémère Tricontinentale (Conférence de solidarité avec les peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine) que le père de la révolution cubaine va manifester son engagement pour l’Afrique. Comme son nom l’indique, cette organisation se voulait le porte-flambeau des luttes de libération et d’émancipation des peuples qui souffrent le plus des conséquences du colonialisme sur les trois continents concernés. Il fait de La Havane la capitale de la Tricontinentale dont l’un des figures emblématique est le Marocain Medhi Ben Barka, enlevé à Paris et assassiné le 29 Octobre 1965 alors qu’il préparait la conférence de La Havane. Son corps n’a jamais été retrouvé. Quand on sait que La Tricontinentale désigne expressément les Etats-Unis comme l’ennemi principal, et dénonce tout aussi formellement le blocus américain contre Cuba mis en œuvre dès 1962, on comprend la disparition rapide de l’organisation de la scène mondiale. L’administration de Washington sait être radicale quand elle considère que ses intérêts sont menacés.

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L’engagement de Fidel Castro pour l’Afrique s’est aussi manifesté dans le soutient résolu aux mouvements armés dans les colonies portugaises d’Afrique , particulièrement en Angola , au lendemain de l’indépendance, où un impressionnant corps expéditionnaire cubain a été envoyé pour empêcher l’invasion du pays par l’armée du régime de l’ Afrique du Sud raciste qui voyait dans le nouvel Etat africain indépendant une menace pour la pérennisation du système de l’ apartheid. Sans l’intervention des troupes cubaines , alors que l’armée sud-africaine envahissait déjà l’ Angola , l’indépendance de ce pays aurait été compromise et la géopolitique de la région bouleversée sans aucun doute irrémédiablement , avec des incidences fâcheuses durables sur l’action du Congrès national africain ( African national congrès) d’Afrique du sud qui a constamment bénéficié de l’aide sous toutes les formes de Cuba jusqu’à la chute du régime de l’apartheid.

 L’homme que les Cubains vont conduire à sa dernière demeure samedi prochain a , incontestablement , marqué non seulement leur histoire , mais celle d’autres peuples dans sa vision de l’internationalisme militant . Et, c’est cette vision qui l’a très tôt opposé aux différentes administrations américaines qui n’entendent pas se voir discuter leur hégémonie sur l’Amérique latine considérée pendant des siècles comme leur chasse gardée.

Face aux controverses qu’il suscite, il n’est pas sans intérêt de relever cette analyse qu’il faisait en 1966 dans une de ses interventions fleuve dont il avait le secret : «…Ceux qui commencent une révolution ont généralement un grand prestige auprès du peuple, une grande autorité sur le peuple, et avec cette autorité, ils peuvent faire beaucoup de bien, mais ils peuvent également arriver à faire beaucoup de mal.Espérons qu’à l’avenir, très peu d’hommes, ou pas un seul, n’auront l’autorité que nous avons eue au début de la Révolution, parce qu’il est dangereux que des hommes aient autant d’autorité. »

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