Dans les coulisses oubliées de la culture

Quelle place pour la culture dans le Programme d’action du Gouvernement ? Jusqu’à plus ample informé, nous affirmons que la culture ne tient pas le haut du pavé. C’est notre conviction : la culture mérite d’être mieux lotie.

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Le résumé exécutif du programme d’actions du gouvernement précise (Citation) : « Des investissements massifs seront effectués dans l’agriculture, le tourisme et la culture, l’économie numérique et les TICs, l’énergie, les infrastructures de transport et les unités de transformation » (Fin de citation).

Dans la pratique, on semble privilégier le couple tourisme/ culture. C’est comme si le premier devait servir de locomotive à la seconde, la tractant tel un wagon. Cette position en retrait réduirait la culture à un produit de consommation plié au goût d’un public déterminé. Difficile alors d’en faire un support d’éducation participant à la formulation et à l’affirmation de l’identité du Béninois.

Quand c’est le tourisme qui pilote et tracte la culture, on s’inscrit d’emblée dans une logique économique. Dans ce cas, on pourra dire, sous peu, qu’au Bénin, la culture nourrit son homme de Béninois. Mais on ferait mieux si la culture tenait plus d’un instrument de promotion humaine et de développement que d’un facteur de croissance économique. Dans ce cas, on devra pouvoir dire, sous peu, qu’au Bénin, le Béninois se nourrit de sa culture, se posant objectivement comme un acteur de changement de sa société. Parce que nous aurons compris que « la culture est au début et à la fin de tout vrai développement ».  La ligne de partage entre l’une et l’autre option est claire et précise. Elle se situe entre les deux propositions que voici : vivre de la culture ou vivre sa culture. L’idéal eut été d’allier et de relier les deux.

Pour la première option, le touriste qui sert de tiroir-caisse avec les devises qu’il est censé apporter au pays fera sûrement vivre de milliers de Béninois. Ceux-ci se verront pris en charge par la dynamique nouvelle impulsée à la sphère culturelle. Le Bénin deviendra une destination plus attractive. Nous habitera le souci d’un retour sur investissement avec nos lieux de mémoire réhabilités, nos sites historiques restaurés, nos espaces balnéaires tirés du néant, nos parcours cynégétiques revus et corrigés, notre artisanat ressuscité.

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Pour la deuxième option, le touriste s’en fout de savoir que nous faisons de nos langues nationales des outils d’intégration nationale et de participation du plus grand nombre au débat national, au développement du pays. Le touriste s’en fout de savoir que nous prenons à cœur le problème de la formation. Et Dieu sait que nous avons besoin de former des profils divers, distincts et spécialisés de personnels culturels : animateurs culturels, conservateurs et gestionnaires du patrimoine, professeurs d’art, artistes-créateurs, administrateurs, conseillers, entrepreneurs culturels, bibliothécaires, documentalistes, archivistes …etc. Le touriste s’en fout de savoir que nous avons besoin de promouvoir un Béninois de type nouveau, nanti d’une nouvelle personnalité, affirmant une nouvelle conscience, capable d’édifier du neuf sur les décombres de l’ancien. L’enfant grandit autrement dans un pays qui s’est soucié de le nourrir, dès l’école, au lait de sa culture. L’adulte se comporte autrement dans un pays qui se soucie de son enracinement dans le terreau de sa culture et de son ouverture pour qu’il accède à l’universel sans renoncer à sa différence, à son identité foncière.

Pour dire que la culture, le développement culturel aurait pu être un volet unique et distinct du Programme d’actions du Gouvernement 2016-2021. La culture a sa place, pleine et entière, à côté des trois grands axes du Programme que sont : 1- Consolider la démocratie, l’Etat de droit et la bonne gouvernance. 2- Engager la transformation structurelle de l’économie. 3- Améliorer les conditions de vie des populations.

Si un débat devait se faire sur et autour du Programme d’actions du gouvernement 2016-2021, et nous le souhaitons de tout cœur, voilà un petit caillou jeté dans le beau jardin en fleur du gouvernement. Le silence des travailleurs du secteur de la culture serait une faute. Leur indifférence aussi. N’oublions pas, dans ce débat, les consommateurs de la culture que nous sommes tous, à des degrés divers. Notre parole compte. L’enjeu est majeur. Qui somme-nous ? Comment et sous quelle personnalité voulons-nous prendre en main notre destin ? Quel avenir voulons-nous construire ? In fine, voulons-nous seulement vivre de notre culture ou surtout vivre notre culture ?

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