Hillary Clinton ou le rêve brisé !…Non, je n’écrirai pas un nouveau livre qui portera ce titre. Mais je te dédie cette chronique que, j’espère, liront ces millions de personnes qui t’ont portée à bras le corps, ayant découvert en toi des valeurs que l’humanité recherche partout et en tous lieux. Longtemps encore, l’histoire retiendra ton nom… l’écrira en lettres d’or au panthéon des grands hommes qui se sont battus pour le bonheur des peuples.
Hillary , cette nuit-là notre rêve s’est brisé de Cotonou à Jobourg , de Kigali à Rabat en passant par Paris, Rome , Berlin, Abu-Dhabi … Bref , le monde entier était tétanisé en écoutant s’égrener les chiffres du vote des grands électeurs en faveur de ton adversaire. Et je m’interrogeais, ne pouvant dormir du sommeil du juste. Je m’interrogeais comme beaucoup d’autres : c’est quoi cette affaire de grands électeurs dont les voix supplantent celles des électeurs simples, véritables « voix des sans voix », des gens du peuple américain qui ont porté leur choix sur toi et qui se sont battus, afin que tu deviennes le 45ème président des Etats- Unis d’ Amérique ?
C’est la Constitution des USA qui le veut !
Voilà ce que m’ont répondu des personnes avisées devant mon indignation. Parce que le peuple d’en bas s’est vu voler son vote. Comme quelque part en Afrique centrale, il y a quelque temps de cela. Peut-être que là-bas aussi la Cour constitutionnelle avait pris en compte le vote de grands électeurs, pour déclarer un certain Ali Bongo Odimba vainqueur face à Jean Ping. Mais ce débat est aujourd’hui entré dans l’histoire, puisque les jeux étant faits, celui qui a été proclamé élu a demandé à tous ses frères de s’unir autour de lui, en vue de continuer l’œuvre de développement du pays.
« Les tragédies de l’Histoire révèlent les grands hommes, mais ce sont les médiocres qui provoquent les tragédies », a dit Maurice Druon dans l’introduction à son Essai Les Rois maudits. C’est une tragédie qui s’est passée ce 8 Novembre2016. Du moins, pour tous ceux qui, dès le départ avaient cru en toi, Hillary, et étaient convaincus de ta victoire, car tu incarnes les valeurs auxquelles nous croyons.
Devant les discours haineux de ton rival, nous les pestiférés du monde, je veux nommer les Africains, musulmans ou non, et les autres Latinos qu’il veut tenir à l’écart de l’Amérique blanche par un nouveau « Mur de Berlin », avions pris fait et cause pour toi. Pour nous, tu incarnes l’espoir d’un monde qui continuerait de vivre en paix, même si le pain n’est pas dans nos gamelles au quotidien. Pour toutes les femmes du monde, tu es apparue comme Jeanne d’Arc annonçant un Nouveau monde où tous nos efforts seront récompensés et à juste titre.
Hillary Clinton venait pour nous sortir de la fosse
Savez-vous que dans le « Pays des droits de l’Homme », à savoir la France, les femmes sont moins rémunérées que les hommes, à grades et responsabilités égaux ?
Chez nous au Bénin, la peinture que le chroniqueur Amoussou Constantin fait de notre genre, révèle combien ton échec a coagulé nos espoirs en un avenir meilleur.
« L’art d’aimer les femmes qui consiste à les entasser dans des bus brinquebalants , pour chanter à la gloire des hommes politiques , du matin au soir, et encaisser deux (2000) mille francs Cfa par tête ( trois dollars) est une humiliation, une infantilisation, une instrumentalisation, une déchéance humaine – le mot n’est pas trop fort – que les positionnements sur les listes électorales et le placement marginal aux postes de responsabilité viennent amplifier. » in La liberté de mourir debout ( épitres et chroniques publiés aux Editions Fous sans frontières , Août 2016.
Voici les maux qui minent notre genre, et que moi , pauvre scribouillarde propulsée sur le devant de la scène par la force de mon engagement citoyen , espérais te voir nous aider à combattre et éliminer, une fois installée dans le bureau ovale de la Maison Blanche . Que de rêves brisés ! Que d’espoirs évanouis par la faute de ces grands électeurs, des machos et des femmes blanches qui se prennent pour une nouvelle race aryenne, qui ont préféré le mâle, parce que tu trainais cette affaire de mails mal postés comme un boulet.
Ah ! Ce directeur du F.B.I, il nous aura quand même fait du tort, à nous autres femmes qui ont mis tous nos espoirs en ta victoire. Les femmes de mon pays, le Bénin, devront-elles supporter longtemps encore les mauvais positionnements sur les listes électorales et leurs placements marginaux aux postes de responsabilités ? Constantin Amoussou a usé ici d’euphémisme, car nous sommes invisibles sur les listes électorales et inexistantes lors des nominations aux postes de direction dans l’appareil de l’Etat. En effet, la plupart du temps en Conseil des ministres, c’est 1 ou 2 postes de responsables subalternes sur une trentaine voire une cinquantaine de nominations que l’on nous concède. Quelle honte ! Quelle humiliation pour notre genre ! Nous héritières des braves Amazones de Ghézo qui ont écrit les pages de l’histoire glorieuse de ce pays.
Adrien Houngbédji vole au secours de la gent féminine
C’est sans doute conscient de cette réalité, que le président de l’Assemblée nationale, Adrien Houngbédji a estimé nécessaire de sonner l’alerte contre cette discrimination faite à la femme, et qui s’est amplifiée sous la Rupture, lors de la cérémonie d’ouverture de la session parlementaire. Le président du Parlement béninois ne s’est pas retenu pour se désoler, à haute voix de cette persistance coupable qui consiste à faire de la femme béninoise une citoyenne de seconde zone , alors que dans tous les pays où il se rend en sa qualité de seconde personnalité du Bénin, la représentation féminine au Parlement frôle la parité.
Qu’avons-nous fait pour mériter ce sort ? Aujourd’hui, nous voyons des commandants du navire Nouveau départ et autres matelots du canot de la Rupture bomber le torse et se répandre dans des professions de foi. Mais, où étaient –ils réellement une certaine nuit du 20 Mai 2015 quand se jouait au Parlement le sort de la Démocratie béninoise, avec en première ligne la doyenne d’âge de l’Assemblée nationale béninoise, la désormais vénérable Rosine Vieyra- Soglo. Dans un Parlement en pleine déliquescence , où des cantines bourrées d’argent devaient contribuer à faire élire le président à la place des élus du peuple, la doyenne d’âge du Parlement a su tenir la barque pour éviter le naufrage du navire Bénin, malgré son handicap visuel, malgré son âge très avancé. Ces faiblesses physiques ne l’empêchaient pas de garder toute sa lucidité, face au sort de notre Nation qui basculerait soit, dans une dictature des pilleurs du peuple ou redorerait le blason de notre démocratie, afin que le Bénin continue de mériter son nom de laboratoire de la démocratie.
Depuis cette nuit du 20 Mai, le train de la Rupture et du Nouveau départ a été mis sur les rails ; avec la détermination des femmes dont le rôle ne peut être sous-estimé. Et le président élu par les députés sait bien que la doyenne d’âge du Parlement est la figure emblématique de cette importante couche majoritaire de la population béninoise. Son vibrant plaidoyer pour rétablir enfin la femme béninoise d’élément moteur de la société doit être suivi d’effets pour ancrer le Bénin définitivement dans le sens progressiste de l’Histoire.
Hillary l’a fait, pourquoi pas moi !
Tu as combattu le bon combat et tu as été vaincue malgré ta vaillance. Mais le combat continue, car ce n’est pas seulement derrière le bureau ovale de la Maison blanche qu’il faille le mener. L’Histoire retiendra qu’une femme a osé aller jusqu’où peu d’hommes sont arrivés. Ton courage, en dépit des adversités du début à la fin du processus électoral nous a sauvées, nous femmes du Monde, du mépris et de l’arrogance des hommes. Tu nous as sauvées du doute, de notre manque de confiance et d’estime en nous-mêmes. Désormais, notre slogan sera : « Hillary l’a fait ! Pourquoi pas nous ? ».
Longtemps après ce 8 novembre, nous parlerons de tes hauts faits à nos filles et nos petites filles pour que tu serves de moteur à leurs visions du monde ; afin qu’elles soient aussi vaillantes que toi, aussi humanistes à comprendre qu’un pays n’est grand que par son rôle à rassembler le maximun de peuples autour de ses idéaux, un pays n’est grand que lorsqu’il a pour vocation de protéger les plus faibles contre les toutes les violences et autres extrémismes auxquelles ils doivent faire face. Le peuple américain ne peut se retrancher derrière un grand mur et manger tout seul son blé de prospérité, alors que le Mexique et Haïti subissent famine, ouragan, choléra à ses portes. Il s’agit de se battre pour la dignité de l’humain. Et tu portais cet espoir pour nous les petits peuples. Hélas ! Nos rêves se sont brisés ! Mais tu as su nous indiquer la voie pour continuer la lutte et préférer mourir debout, que de vivre à genoux », comme l’a écrit quelqu’un. Toute vie est lutte et toute lutte est vie ! Hillary, tu es notre égérie, à nous femmes africaines et celles du Bénin en particulier. Va ! Que ta lutte en faveur d’un monde de paix, d’humanisme et de bonheur pour le plus grand nombre irradie la terre entière. Et qu’à travers le monde le sort des femmes s’améliore, puisque désormais, elles s’écriront : « Hillary l’a fait ! Pourquoi pas moi »?
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