Initiative des défenseurs des droits humains épris de paix et de justice, l’association Nouveaux droits de l’homme Bénin (Ndl-Bénin), a été lancée ce samedi 26 août 2017 à la Bourse du travail. Dans son discours à l’ouverture des travaux de l’assemblée générale constitutive, le président du comité préparatoire Dieudonné Lokossou, a fait remarquer un certain nombre de préoccupations qui ont motivé la création de l’association.
Il a fait le tour d’horizon de la situation des droits de l’homme sous le régime actuel. Lisez ci-dessous l’intégralité du discours.
DISCOURS D’OUVERTURE DE L’ASSEMBLEE GENERALE CONSTITUTIVE DE L’ASSOCIATION « NOUVEAUX DROITS DE L’HOMME BENIN »
– Monsieur le Ministre de la Justice et des Droits de l’Homme ;
– Mesdames et Messieurs les éminentes personnalités invitées, en vos qualités et grades respectifs ;
– Monsieur le Président de Nouveaux Droits de l’Homme-Togo ;
– Mesdames et Messieurs les Représentants des structures de combats contre les différentes privations ;
– Messieurs les Secrétaires Généraux des Centrales et Confédérations syndicales du Bénin ;
– Messieurs les Anciens Secrétaires Généraux des Centrales et Confédérations Syndicales ;
– Monsieur le Président de l’OHDP ;
– Monsieur le Président de LDH ;
– Mesdames et Messieurs les Délégués ;
Au nom des Initiateurs de la présente rencontre, je voudrais vous souhaiter la bienvenue, et vous remercier pour l’intérêt que vous avez accordé à cet évènement spécial, qui fera date dans l’histoire de notre combat contre toutes sortes de privations et d’injustices sociales au Bénin. D’emblée, nous répondons à la question que chacun de vous s’est posée à la réception de notre carton ou coup de fil d’invitation. Pourquoi une association dédiée uniquement aux droits de l’homme ?
Les droits de l’homme constituent en effet une question préjudicielle pour tous les peuples qui aspirent à la paix et à la liberté. C’est une préoccupation majeure pour toutes les organisations qui défendent la cause des populations exploitées à travers le monde entier. Notre pays le Bénin n’échappe pas à cette lutte, et c’est pourquoi un groupe de personnes averties de la situation de la défense des droits de l’homme, s’est engagé à réfléchir pour créer un cadre de concertation au sujet des nouveaux droits de l’homme, à l’instar de nos amis du Togo, du Cameroun, du Ghana, de l’Argentine et de la France, pour ne citer que ces pays.
Je voudrais spécialement témoigner ma profonde gratitude à nos frères togolais, et particulièrement au Président de « Nouveaux Droits de l’Homme du Togo ». Ils nous ont beaucoup assistés au cours de nos réflexions, pour aboutir à notre rassemblement de ce jour.
*De l’espoir au désenchantement progressif
C’est vrai qu’il il y a quelques mois, deux (02) géants du monde syndical, le camarade Todjinou D. Pascal et moi-même, après avoir servi avec abnégation, foi et loyauté pendant plusieurs années, les travailleurs de notre pays le Bénin, au terme de nos mandats statutaires, avons régulièrement organisé les congrès à l’issue desquels nous avons passé le témoin à nos successeurs respectifs, pour poursuivre le dur combat de la défense des intérêts matériels, moraux et professionnels, des nombreux travailleurs. Depuis lors, ces deux personnalités du monde syndical sont rentrées dans l’histoire, et elles ont rejoint le prestigieux club des anciens Secrétaires Généraux qui ont eu à diriger avec brio les Centrales et Confédérations Syndicales, qui se partagent les suffrages du monde des travailleurs au Bénin.
Cependant, une certaine opinion publique se perdait en conjectures quant à la destination que nous prendrions à l’issue de notre « carrière » syndicale, pour ainsi dire. Certains de nos détracteurs nous voyaient faire l’option suicidaire de l’atterrissage dans les eaux nauséabondes des partis politiques de chez nous, où le sport favori de la plupart des acteurs est le nomadisme permanent et éhonté, l’affairisme, le mensonge, les coups bas, et toute sorte de pratiques répréhensibles, à mille lieues des préoccupations des populations. D’autres ont aussi affirmé gratuitement que le retrait normal des activités des deux responsables syndicaux que nous étions, serait prémédité et serait également le fruit d’un deal noué entre les tenants de la rupture et nous. Pendant ce temps, d’autres enfin nous ont accusés d’avoir trahi les travailleurs en abandonnant la lutte syndicale, à un moment crucial du combat pour la vie et la survie démocratique. Pures affabulations !!!.
C’est pour moi l’occasion de m’inscrire solennellement en faux contre toutes ces allégations imaginaires, provenant de quelques mauvais citoyens en mission commandée et en quête de sensationnel ou de gain facile.
Bien sûr les syndicalistes convaincus que nous étions, en tant que force sociale organisée, avions pris une part active à l’époque à la lutte contre les privations des libertés, en consentant de lourds sacrifices, parfois au risque de nos vies, pour l’avènement au pouvoir du Président Talon. Mais très tôt, on a remarqué que quelques resquilleurs, surfant sur la vague de l’opportunisme politique ambiant, ont pris d’assaut sans vergogne le train de la rupture ou du nouveau départ, laissant sur le quai les véritables promoteurs de ce changement historique intervenu dans notre pays.
Reconnaissons tout de même qu’au lendemain du 06 Avril 2016, le Gouvernement du Président Talon a posé, avec courage, quelques actes d’éclat hautement appréciés par les populations, comme l’annulation des concours frauduleux et le choix des chefs-lieux de département, suivis de la nomination des préfets. Mais il n’en demeure pas moins vrai qu’aujourd’hui, ce même gouvernement que nous avions applaudi, a commencé à prendre quelques décisions graves sur le plan socio-économique. Des choix qui sont loin de faire l’unanimité, même si quelques thuriféraires du système, pour des raisons d’intérêts égoïstes, clament à l’envie que tout va pour le mieux au Bénin.
*Eviter le silence complice
Honorables invités,
Mesdames et Messieurs
Chers Délégués,
Comme l’a dit le pasteur Martin Luther King, éminent défenseur des droits civiques: « Notre vie commence à s’arrêter le jour où nous gardons le silence sur les choses graves ».
Nous ne pouvons pas, pendant des décennies, avoir défendu avec acharnement un certain nombre de valeurs citoyennes, depuis le temps de la dictature militaro-marxiste du Prpb de triste mémoire, en affrontant les Présidents Kérékou, Soglo, et ayant même bravé les exactions du Président Thomas Boni Yayi, pour ensuite fermer aujourd’hui les yeux sur ces pratiques anti-démocratiques qui se développent à une vitesse astronomique. Continuer de croiser les bras et laisser faire, permettre au Gouvernement actuel de mettre un bâillon sur les libertés d’aller et de venir consacrées par les dispositions de notre Constitution du 11 Décembre 1990, en son article 25, serait un grand recul dangereux pour notre Pays et sa démocratie.
Le droit au travail et à la vie, constituent des éléments non négociables pour tout être humain. C’est pourquoi toute personne éprise de paix et de justice sociale, ne peut que condamner et dénoncer avec véhémence les excès du pouvoir qui ont conduit le gouvernement de la rupture, à s’illustrer négativement dans les faits ci-après :
01- La multiplication des marchés gré à gré, dont les exemples les plus emblématiques sont ceux relatifs à la sécurité de l’aéroport et la désignation d’un mandataire pour l’exécution des tâches relevant du Cncb ;
02- Les cas flagrants de conflits d’intérêts pour la relance du Pvi nouvelle génération, rétrocédé à la société Bénin control, dont le président du conseil d’administration n’est autre que l’ami intime du chef de l’Etat, Olivier Boko.
Au plan des libertés publiques, on peut citer pêle-mêle :
1- L’interdiction de la marche pacifique organisée par des étudiants revendiquant l’amélioration de leurs conditions d’étude, et le paiement de leurs allocations ;
2- La dissolution prononcée en conseil des Ministres le 04 Octobre 2016 des associations estudiantines, sous de fallacieux prétextes, avec interdiction d’exercer leurs activités sur tous les campus universitaires du territoire national ;
3- Le tracé de lignes rouges à ne pas franchir par un Préfet, un haut cadre versé dans un excès de zèle ;
4- La fermeture du COTEB de Parakou, suivie du licenciement de trois (300) travailleurs qui y trouvaient leur pain quotidien ;
5- Le licenciement sans raison et sans droits de plus de 1000 agents contractuels de l’Etat exerçant au Ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche ;
6- La liquidation expéditive et scélérate des sociétés et offices d’Etat comme la Sonapra, l’ons, l’Onasa, la Centrale d’Achat des Intrants Agricoles, et les licenciements abusifs de travailleurs qui s’en sont suivis… D’autres travailleurs attendant avec anxiété leur tour, dans certaines sociétés d’Etat et ailleurs ;
7- La détention sélective dans les prisons civiles de quelques individus, présumés impliqués dans l’affaire SEGUB ;
8- Les dégagements sauvages des occupants des domaines publics sous contrat avec les Mairies des principales villes du Bénin, sans aucune mesure d’accompagnement, faisant ainsi croître le taux de précarité et de misère d’une façon exponentielle dans notre pays ;
9- Le manque criant de protection efficace des droits des enfants, entrainant certains parents cupides à les placer contre une poignée d’argent, auprès de négriers des temps modernes, que sont les trafiquants d’êtres humains au Nigéria ou ailleurs ;
10- La fermeture ciblée autoritaire de certains organes de presse, tels que : Sikka Tv, E-Télé, Eden TV, Chrétienne TV, Soleil FM, etc.
Par ces mesures arbitraires de restriction des libertés, on a ainsi privé de nombreux Béninois de leur droit à l’information.
Tous ces actes arbitraires, montrent à suffisance qu’il y a un grand fossé entre les actuels dirigeants de notre pays, et nous les citoyens ordinaires, non revêtus du manteau de la rupture. Ils consacrent de plus en plus le retour en force de l’autocratie et de la dictature. Si on n’y prend garde, tout le pays deviendra un empire, aux mains d’une minorité qui fait main basse sur les secteurs vitaux de notre économie.
Qu’avons-nous combattu hier, même avec certains qui sont aujourd’hui au pouvoir ? Mais que vivons-nous en ce moment, où nul ne veut piper mot sur ces dérives totalitaires, au risque de se voir infliger, soit un redressement fiscal, soit une histoire de trafic de stupéfiants, après des menaces et injures sur les réseaux sociaux, de facebook à whatsapp.
Nonobstant le vote par l’Assemblée nationale de la loi N°2012-36 du 15 Février 2013, portant création de la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CBDH), force est de reconnaitre que cette structure de combat et de promotion des droits de l’Homme, n’est pas encore fonctionnelle pour des raisons inavouables.
C’est fort de ces constats amers, que nous avons décidé en toute liberté, de mettre sur les fonts baptismaux ce jour, Samedi 26 Août 2017, une association dénommée : « Nouveaux Droits de l’Homme-Bénin », pour défendre et soutenir tous les citoyens béninois des deux sexes, qui se sentent brimés au quotidien dans leurs droits légitimes, par les plus forts. Nous estimons que la démocratie ou la rupture sans le pain, est un crime contre la nation et notre peuple.
*Soutenir les béninois et béninoises brimés
Au-delà du Bénin dit révélé, pour des questions de mauvaise gouvernance évidente en Afrique, des milliers de personnes, à cause de l’acuité de la misère et de la pauvreté, prennent des risques énormes en s’embarquant chaque jour sur des navires de fortune, conduits par des trafiquants modernes d’esclaves à destination, d’un hypothétique El-dorado en Europe. Malheureusement, ces navires chavirent dans la plupart des cas dans la Méditerranée, devenue le dernier cimetière d’accueil de nos frères aventuriers. Au Soudan du Sud, il sévit une effroyable guerre fratricide, attisée par des pays occidentaux et autres, qui exploitent le pétrole de ce pays. Leurs chaînes télévisions ne se privent d’ailleurs pas de nous gaver, tous les jours, d’images horribles d’enfants, de femmes et de vieillards faméliques, déguenillés.
Enfin au Venezuela, les populations affamées et privées de tout, se battent tous les jours comme elles le peuvent dans les rues, contre un pouvoir autocratique et féroce, instaurée par le Président Maduro. Il s’accroche désespérément au pouvoir, et reste insensible à la souffrance des vénézuéliens, qui sont abattus depuis quatre (04) mois comme des chiens dans les rues. Plus de 400 sont déjà morts. A tous ces hommes et femmes martyrs, victimes d’une gouvernance inique, en quête de liberté et de démocratie au Venezuela et partout ailleurs dans le monde, nous marquons notre solidarité agissante, et admirons leur courage et détermination, qui doivent nous inspirer.
Tirant leçon de tous ces constats amers et dégoûtants, nous, les Initiateurs de la présente assemblée générale constitutive, avons décidé en toute liberté et en toute souveraineté, de mettre sur les fonts baptismaux ce jour, Samedi 26 Août 2017, une association dénommée : « Nouveaux Droits de l’Homme-Bénin », pour défendre et soutenir tous les Béninois et Béninoises qui se sentent brimés au quotidien dans leurs droits légitimes de citoyens, par ceux qui nous gouvernent. Nous estimons que la démocratie ou la rupture sans le pain, est un crime contre la nation et notre peuple.
Mesdames et Messieurs,
Notre association est née avec des dents, mais nous nous engageons à travailler sans préjugé aucun, avec toutes les organisations sœurs qui partagent les mêmes points de vue que nous sur les questions des droits de l’homme, de la paix sociale et politique, et de la défense des libertés démocratiques. Aussi bien au plan national, régionale et mondial.
Nous voulons d’ores et déjà rassurer les gouvernants de la rupture ou du nouveau départ, que nous ne sommes pas un cercle d’opposition, mais une organisation de veille citoyenne avec un agenda bien chargé qui nous permettra d’intervenir à temps et à contre temps, dans l’information de l’opinion publique nationale et internationale, chaque fois que nous constaterons les abus du pouvoir sur le plan politique, le déficit de la démocratie, les persécutions de citoyens libres de leurs opinions, les privations sans cause des libertés ; bref, la violation des droits des citoyens sous toutes les formes.
Dans un Etat qui se veut de droit, l’on ne peut s’offusquer de la libre expression des opinions, quelles qu’elles soient, ni même se montrer frileux à l’égard de ceux qui s’insurgent contre la pensée unique déguisée, que l’on tente depuis un certain moment d’imposer « avec la rage et la ruse » à notre peuple, pourtant connu pour sa longue tradition de lutte, léguée à lui par Béhanzin, Bio Guéra, Kaba, et bien d’autres héros.
Après cette mise au point assez claire et limpide, il est loisible à ceux qui ont des dons d’ubiquité selon la police de leur conscience, de coller une main invisible à notre jeune association, comme il est de coutume ces derniers temps ici… Lorsque l’on exprime une opinion qui n’est pas partagée par le pouvoir et ses hommes de main et de plume.
Mais, nous pouvons vous certifier sur l’honneur ici et maintenant, que cette association échappera à toute récupération politique, et ne pourra pas non plus se muer par opportunisme en un parti politique, pour servir des intérêts diaboliques, en tournant le dos à notre peuple. Enfin, nous sommes viscéralement opposés au monolithisme, nocif à toute avancée démocratique. Et c’est fort des expériences acquises par les uns et les autres, que nous vous invitons à avoir le courage nécessaire pour nous mobiliser contre la fatalité, car « ici c’est le Bénin », comme l’a dit l’autre, fort opportunément.
C’est sur cette note d’espoir que, rassurés, je déclare officiellement ouverts les travaux de l’association « Nouveaux Droits de l’Homme-Bénin ».
Vive la liberté !
Vive la justice sociale !
Vive la démocratie !
Je vous remercie.
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