L’arrêté du préfet du Littoral Modeste Toboula, portant sur l’interdiction du transport des produits pétroliers de contrebande dits « kpayo » sur l’ensemble du département du Littoral, signé le jeudi 26 octobre 2017, fait des vagues. Et pour cause, le motif de l’arrêté bien que portant sur la sécurité publique, demeure un sujet délicat. Parce que toute initiative gouvernementale visant l’interdiction du transport et par extension la vente du « Kpayo » doit être bien pensée et repensée.
L’arrêté du préfet sur l’interdiction du transport de d’essence de contrebande sur son territoire de commandement, est de prime abord une décision qui vise la sécurité publique. Puisque l’arrêt préfectoral présente les conséquences fâcheuses de ce transport anarchique qui expose les populations aux accidents et aux incendies, avec parfois des pertes en vies humaines.
Considérant ces constats du préfet, on peut apporter caution à son arrêté. Mais au-delà de la finalité, il y a l’objet de l’arrêté qui porte sur le transport de du « Kpayo ». Un produit dont la moindre variation de prix influe considérablement sur le coût des transports, voire de la vie au Bénin. La commercialisation du « kpayo » est en effet devenue une activité génératrice de revenus pour des milliers de familles sur l’ensemble du territoire, et constitue un emploi pour de nombreux jeunes. La vente du « kpayo » est selon certains analystes, comme le professeur John Igue, auteur entre autres de ‘’Bénin Etat entrepôt’’, un véritable moyen de redistribution aux populations des recettes inhérentes à la commercialisation des produits pétroliers.
Il démontre que lorsque les produits pétroliers sont distribués par la voie formelle à travers les stations d’essence, ce sont les multinationales qui en tirent des dividendes à l’instar de : Total, Oryx, Mobil, etc. Le « kpayo » bien qu’étant de l’essence de contrebande, répond au besoin de la classe laborieuse et pauvre qui est satisfaite des prix de ces produits. Il sera donc politiquement, économiquement et socialement difficile de mettre fin à la commercialisation du « kpayo », autant pour les vendeurs que pour les consommateurs.
Les premiers n’accepteront pas de perdre leur activité génératrice de revenus, pendant que les seconds ne seront pas prêts à aller s’approvisionner aux stations essence où les prix sont plus élevés. Qu’il ne vienne surtout pas en idée au gouvernement en place de se donner le challenge de réussir de mettre fin à la commercialisation du « kpayo », là où les gouvernements précédents ont échoué. La solution passerait peut être par la promotion simultanée des stations essence et du « kpayo ». Peut-être faudra-t-il seulement encadrer la commercialisation du « kpayo » en repensant les stratégies de conservation des produits, les mécanismes d’approvisionnement et de transport qui peuvent garantir plus de sécurité en vue de diminuer les risques d’accidents et d’incendies.
En organisant rationnellement la commercialisation du « kpayo », le gouvernement pourra recenser les vendeurs et percevoir si possible des taxes raisonnables, pour que les gérants de stations ne s’indignent plus, à raison, de concurrence déloyale. En laissant prospérer les deux moyens de commercialisation de produits pétroliers, le gouvernement permettra à toute la société béninoise de faire un choix, et de vivre…
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