A peine sommes-nous arrivés au festin, que les tables sont dépouillées, les cuvettes asséchées et les convives déroutés par la foudroyante nouvelle. La rupture prend un autre envol vers un pays lointain. De la rupture nous sommes passés à l’imposture. Ça recommence !!!Un homme de tous les péchés ? Tout ce qui est possible est permis pourvu que le prince se maintienne au pouvoir. C’est un rituel qui s’entretient de crises, tout comme un fétiche se nourrit de sang. Que la république prenne feu, que les hameaux se vident, l’essentiel est que l’on ait atteint son objectif. En réalité, l’équilibre de la vie ne se mesure-t-il pas au nombre de morts ou à la taille de la répression et des exécutions extrajudiciaires ? A la justice du plus fort, ne faut-il pas opposer la volonté générale?
Monsieur le président, le pouvoir semble juteux lorsqu’on y prend goût. Il devient difficile de s’en séparer. Avisons, tenons tout le monde en respect et éloignons les concurrents redoutables du trône. C’est la politique de la ruse et de la rage. L’exhumation d’une vieille affaire classée, peut servir sait-on jamais ! La finalité est que le concurrent soit voué aux gémonies. Des logiques de maintien au pouvoir devraient-elles ramener la gouvernance au ras-du-sol ? Votre sincérité est mise en doute, cette action manque de crédibilité. Lorsque l’assertion « c’est mon frère, nous allons diriger le pays ensemble » était encore d’actualité, votre administration s’était engagée, elle s’est même exécutée. Où se trouve dans cette nouvelle démarche la vertu ? Un chef ne bouffe pas au banquet de la gabegie.
A quoi cela sert-il de se borner aux actions présentes, sans envisager leurs répercussions dans le temps ? Rien ne rassure que demain sera toujours comme aujourd’hui. Les gloires d’aujourd’hui peuvent engendrer les déboires de demain, l’idée de l’avenir peut être plus féconde que l’avenir même. Les faucons de votre régime vous donnent le bon Dieu sans confessions, et font de vous un dieu trois fois saint. Lorsque la colère de vos flagorneurs frappera, les caïds versatiles changeront la veste d’hiver pour la chemisette d’été, et entonneront l’Alléluia torrentiel « l’été est fini, voici venue la période des grincements de dents ». En ces moments là, le jouisseur d’hier appellera la mort à son secours. Quand j’ai fini de dire cela, je confie ma voix aux gazouillis enchantés des oiseaux.
Monsieur le président, la situation est critique. La sauce dont vous parlez depuis votre prestation de serment a perdu de sa saveur. La situation est tellement complexe que la douleur de la patience a fini par faire parler le clergé. Un dirigeant doit appréhender les signes d’alerte qui pourraient faire basculer son pouvoir, et en tirer les conclusions. L’instabilité politique au sommet de l’Etat n’est pas loin. Faites le bon geste. Tendez oreilles aux interpellations, aux lamentations, aux dénonciations et aux appels à la sédition. Développez l’écoute, celle du peuple, des sages, des têtes couronnées.
Monsieur le président, faites en sorte que vos actions aillent en direction de ceux qui attendent depuis des mois votre réaction, votre intervention et votre parole. Parlez, mais alors parlez juste, parlez bien. La situation appelle à l’amendement de vos attitudes, de votre perception de la réalité, de votre gestion de la mission qui vous a été confiée. Au demeurant Dieu est mort, et si vous ne faites pas de la mort de Dieu un perpétuel dépassement de vous-même, vous paierez cher cette mort.
Laisser un commentaire